Arrêt de travail et manifestation des salariés de la Rhodiaceta de Lyon Vaise

07 décembre 1967
01m 09s
Réf. 00232

Notice

Résumé :

Les salariés de l'usine Rhodiaceta de Lyon Vaise se sont mis en grève à l'annonce de la suppression de plusieurs milliers de postes. Après un meeting les grévistes ont décidé de se rendre à la Préfecture du Rhône.

Date de diffusion :
07 décembre 1967
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Éclairage

Fondée en 1922 par les Usines du Rhône, la société Rhodiacéta, spécialisée dans la filature d'acétate de cellulose et de polyamide (nylon), est répartie sur quatre lieux de production : au Péage-de-Roussillon (Isère), à Saint-Fons (Belle-Etoile), à Lyon-Vaise et à Besançon. En 1966, elle emploie au total 14 000 personnes dont 30% de femmes. En 1965, alors que la production de Nylon est à son apogée (10 000 tonnes), la Rhodiacéta emploie 7 000 personnes à Vaise — un effectif constitué aux trois quart d'ouvriers. Lieu de travail et de vie pour plusieurs générations, l'usine de la Rhodiaceta se distingue également dans la mémoire collective lyonnaise comme un haut lieu de luttes sociales et de contestation salariale à la fin des années 1960 célébré en chansons par Colette Magny. En février et mars 1967, par solidarité avec la Rhodiacéta de Besançon, les usines de la région lyonnaise se mettent en grève. Les manifestations se succèdent tout au long du mois de décembre. Les mouvements de grève de l'année 1967 ont très certainement cristallisé avec force un des principaux traits de l'identité de l'entreprise et du quartier lyonnais de Vaise.

En décembre 1967, l'usine Rhodiacéta connaît donc d'importantes perturbations que relate le quotidien national Le Monde du 17-18 Décembre 1967. Le 6 décembre, la direction prend la décision de supprimer plusieurs centaines voire milliers d'emplois et de réduire les salaires. Le 8 décembre, un premier arrêt de travail sans préavis a lieu de 0 h 45 à 1 h 30 dans les ateliers de filature. D'autres suivent à 4 h 30 puis à 5 h 30. Des altercations éclatent entre ouvriers et agents de maîtrise, des chariots sont renversés et des cahiers de consignes détruits, on parle même de violences physiques et de quelques coups échangés. A 9 h 45, une nouvelle équipe débraie à 100 % et entraîne les autres ateliers. Au cours de la semaine qui suit, les tensions s'accumulent. Le vendredi 15 décembre, de graves incidents éclatent à l'intérieur des ateliers. La direction décide de fermer l'usine.

Ce conflit fait de la Rhodiacéta la forteresse ouvrière de Lyon. Les travailleurs soutenus par les étudiants, n'hésitent pas à se mettre en grève, à débrayer et à « descendre en ville » manifester à la préfecture comme le montre le reportage, même si les grévistes sont arrêtés par les forces de l'ordre au pont de la Guillotière. Que le soir du 13 mai 1968, une partie des manifestants étudiants se dirigent de la place des Terreaux vers la Rhodia-Vaise n'est pas fortuit ; ils se placent en continuité avec les évènements antérieurs. Le 17 mai 1968, la Rhodiacéta est occupée par les ouvriers qui ne reprendront le travail que le 11 juin.

Michelle Zancarini

Transcription

Journaliste
Depuis hier 19 heures, le travail a cessé à l’usine Rhodiacéta de Lyon Vaise qui emploie quelques 6 000 personnes. Cette grève avait été déclenchée pour protester contre l’annonce de la suppression d’un certain nombre de postes, 2 000 environ. Suppression qui selon la direction s’imposerait en raison de difficultés que connaît la société. Ce matin, un meeting s’est tenu devant les portes closes de l’usine où plusieurs milliers de grévistes étaient rassemblés. A l’issue de ce meeting, les grévistes décidaient de se rendre en cortège à la Préfecture du Rhône, distante de plusieurs kilomètres.
(Silence)
Journaliste
En fin de matinée, les grévistes étaient stoppés sur le Pont de la Guillotière par des forces de police qui avaient dressé un barrage constitué de fourgons placés en travers de la chaussée. Aucun incident n’a été signalé et vers midi, les manifestants se dispersaient dans le calme. Cet après-midi, un meeting s’est tenu à la l’intérieur de l’usine de Vaise. Il réunissait 4 000 personnes environ. Au cours de ce meeting, il a été décidé de reprendre le travail dès demain matin mais les responsables syndicaux ont que d’autres manifestations publiques auraient lieu dans les jours qui viennent.