Les Manifestations des femmes de mineurs [muet]

27 mars 1963
01m
Réf. 00451

Notice

Résumé :

Les femmes des mineurs de Saint-Etienne sont venues manifester afin de soutenir les revendications de leur mari. Elles se sont rendues à la Bourse du travail et ont été reçues à la Préfecture.

Date de diffusion :
27 mars 1963
Source :

Éclairage

L'histoire fait souvent peu de place aux femmes, oubliant le rôle qu'elles ont joué, en particulier comme épouses aux côtés de leurs maris. Elles ont le plus souvent travaillé jusqu'au mariage ou la naissance du premier enfant. Entretien du ménage, confection des repas, soins aux enfants, mais aussi couture et lavage pour les autres sont le lot des ménagères qui ont un rôle majeur dans les familles minières. Elles en sont le pivot, le « ministère des finances », car elles tiennent les cordons d'une bourse pas toujours bien remplie, se rendant disponibles, au service de leur mari : ceci est bien connu par le cliché, stéréotypé, diffusé par les cartes postales du début du XXe siècle de l'épouse lavant son mari dans une grande bassine de la cuisine familiale au retour du poste de travail au fond. Les ménagères étaient alors exclues d'une sphère syndicale purement masculine.

Ce point de vue peut être examiné au regard d'une histoire de la participation des femmes de mineurs aux grèves et aux manifestations. Sans remonter au XIXe siècle et aux pages de Zola dans Germinal, on peut souligner qu'elle s'ancre dans une histoire longue. En 1963, on a encore en mémoire la longue grève des mineurs du Nord en mai 1941 au cours de laquelle les femmes ont été largement présentes dans les piquets de grève : deux d'entre elles sont d'ailleurs condamnées à la déportation par le commandement militaire allemand d'occupation.

Dans les périodes moins dramatiques, elles ont été aussi présentes dans l'espace public en particulier à l'appel de plusieurs organisations liées plus ou moins au parti communiste français. En 1947-1948, l'Union des Femmes Françaises (UFF), l'organisation féminine de masse du PCF, est sollicitée afin qu'elle incite les femmes à s'investir au côté de leurs maris pendant les mouvements de grève. Ce fut d'abord dans les grèves de 1947-1948 par un soutien matériel apporté aux grévistes ; puis à partir de 1953, la direction du PCF décide de mettre en place des comités de « femmes de... », dans l'espoir de mobiliser les épouses aux côtés de leurs conjoints. En janvier 1953, Jeannette Vermeersch (compagne du secrétaire général du PCF Maurice Thorez) invite à « réunir les femmes de mineurs, afin qu'elles discutent des moyens d'obtenir que leurs maris aient de meilleures conditions de salaires, de pension, de logement ». Les comités de femmes de mineurs se manifestent de nouveau à la fin du mois de mars 1963. Le quotidien du PCF, L'Humanité, évoque des manifestations féminines les 23, 25 et 27 mars 1963 dans la Loire, la Lorraine et le Nord. En effet, les comités de femmes ont été réactivés avec cependant une certaine hétérogénéité de situations. En Lorraine, ces comités sont impulsés et patronnés par la CGT ; ainsi une militante communiste lorraine, Henriette Simonetto (1931-2004) devient secrétaire régionale CGT des femmes de mineurs en mars 1963. Alors que dans le Nord, c'est l'UFF - et non la CGT ou le PCF - qui prend en charge la mobilisation.

Le reportage du 27 mars montre la manifestation des femmes de mineurs à Saint-Étienne précédées – comme conduites - par des dirigeants syndicaux ayant saisi des mains fragiles des femmes la banderole de tête proclamant « Toutes unies dans la lutte avec nos maris jusqu'à la victoire ». Nombre d'entre elles portent un foulard - car à cette date toute femme convenable ne sortait pas hors de son quartier « en cheveux » (tête nue) -, elles se rendent en manifestation puis, encadrés par des syndicalistes hommes, en délégation à la préfecture de la Loire, place Jean Jaurès. Les pancartes évoquent la santé des hommes (la silicose) et les salaires. Les images du début et de la fin contextualisent la situation : elles montrent le carreau de la mine à l'arrêt (immobiles le chevalement et sa mollette comme les wagonnets vides).

Bibliographie :

- Dominique Le Tirant, Femmes à la mine, femmes de mineurs, éd. du Centre historique minier, Lewarde, coll. “ Mémoires de Gaillette ”, 2002.

- Sandra Fayolle, « Ne soyez pas le bras qui retient mais le bras qui soutient !' La place des militantes de l'union des femmes françaises dans les grèves de l'après-guerre », Sens critique, 22 mai 2009.

Michelle Zancarini

Transcription

(Silence)