L'affaire du juge Renaud de Lyon

09 mars 1976
02m 18s
Réf. 00145

Notice

Résumé :

Jean-Pierre Marin a été tué par la police mardi 9 mars à Champagne-au-Mont-d'Or. On le soupçonne de faire partie du gang des Lyonnais accusé d'avoir provoqué le meurtre du juge Renaud et le rapt de Christophe Mérieux.

Date de diffusion :
09 mars 1976
Source :
TF1 (Collection: IT1 20H )
Thèmes :

Éclairage

François Renaud devient en 1972, premier juge au Palais de Justice de Lyon. Il instruit de nombreuses affaires. Celui qui est surnommé le sheriff par les truands et les journalistes est en charge de toute une série d'affaires explosives où se mêlent officines politiques (le service d'action civique, le SAC), grand banditisme, trafic de drogue, hold-up, prostitution, gang des lyonnais, enlèvements. Ses méthodes ne sont pas classiques, il fréquente les même bars que les truands, emploie volontiers leur vocabulaire, utilise de nombreux indicateurs, mène une vie nocturne agitée. C'est d'ailleurs en revenant chez lui vers trois heures du matin, le 3 juillet 1975, qu'il est abattu de deux balles dans la tête.

Des services de police laissent filtrer les noms, Marin et de Lamouret, de ses possibles assassins avant que l'information ne soit démentie. Un an après l'assassinat du juge Renaud, ils sont impliqués dans l'enlèvement du petit Christophe Mérieux. Ce dernier, âgé de neuf ans a été enlevé sur le chemin de l'école. Son père Alain Mérieux est le patron de Biomérieux. Une rançon de 20 millions de francs est versée. L'affaire a été l'occasion de tensions entre le ministre de l'Intérieur, Michel Poniatowski, hostile à son versement et le Premier ministre, Jacques Chirac, qui n'en interdit pas le versement à son ami Alain Mérieux. La presse ne révèle l'affaire qu'une fois la libération de l'enfant confirmée le 12 décembre 1975. L'un des ravisseurs serait Jean Pierre Marin qui l'aurait séquestré dans un appartement d'Oullins. Moins de trois mois après cet épisode, il est abattu par la police à Champagne-au-Mont-d'Or, au nord de Lyon. C'est cet événement qui justifie le reportage.

La longue introduction du reportage par le présentateur du journal, souligne bien la complexité d'un dossier qui vaut à Lyon le surnom de Chicago sur Saône ou de Chicago sur Rhône. Le ministre de l'Intérieur, Michel Poniatowski, qui après l'assassinat du juge aurait entendu, selon certains articles, utiliser cette affaire pour liquider les séquelles de l'Etat UDR où depuis la fin de la guerre d'Algérie auraient interféré officines politiques, banditisme et services secrets. En 1977, le cinéaste Yves Boisset en tire le film « Le juge Fayard dit le Shériff » avec l'acteur Patrick Dewaere.

L'assassinat du juge Renaud n'a jamais été totalement éclairci malgré de nombreuses enquêtes publiées, entre autre dans l'Express sous la plume de Jacques Derogy. La volonté d'étouffer, voire d'enterrer ces affaires a-t-elle effectivement existé ? L'affaire du juge Renaud a été instruite pas six magistrats successifs et 23 ans après les faits, le 17 septembre 1992, elle a été classée sans suite. Depuis les faits ont été prescrits.

Jean-Luc Pinol

Transcription

Présentateur
Lyon/Chicago, le rapprochement est peut-être un peu trop simple. Et la tendance à comparer deux situations surtout à deux époques différentes, cette tendance est sans doute trop facile. La criminalité dans les villes se développe en fait de façon parallèle dans tous les grands centres européens, que ce soit à Francfort, à Manchester ou Milan. Il n’empêche que l’on reparle ce soir de Lyon et de la fameuse affaire du Juge Renaud, puisque l’un des suspects pouvant être impliqués dans l’assassinat du juge a été abattu aujourd’hui à Champagne-au-Mont-d’Or, par les policiers sur lesquels d’ailleurs, il venait d’ouvrir le feu. Il était pris dans une véritable souricière. A Lyon, en réalité, tout se tient. Cette souricière avait été tendue dans le cadre de l’enquête sur le rapt du petit Christophe Mérieux. Cette fusillade dans la banlieue lyonnaise va bien entendu faire rebondir l’affaire ou les affaires criminelles de Lyon, et pas seulement de Lyon, d’ailleurs aussi, peut-être. Mais pour l’instant, Eric Gilbert, qui avait suivi de près les enquêtes menées en temps utiles, nous explique comment d’est déroulé ce nouvel épisode aujourd’hui et aussi pourquoi on en est arrivé là.
Eric Gilbert
C’est dans cette voiture que Jean-Pierre Marin est mort. Depuis plusieurs jours, les policiers avaient monté une souricière autour d’une petite maison de Champagne-au-Mont-d’Or, dans la banlieue lyonnaise, où le gangster se cachait en compagnie d’une amie. Un peu avant 13 h, une jeune fille a aperçu les enquêteurs, elle est entrée dans la maison pour prévenir Marin. Il a tenté de fuir alors en forçant le passage avec sa DS. Mais les policiers avaient disposé plusieurs véhicules pour lui barrer la route. Marin a réussi à éviter un premier obstacle, mais une autre voiture a surgi en travers et une camionnette dans le même temps s’est placée derrière lui pour couper toute retraite. C’est à ce moment-là que la fusillade a éclaté. Qui a tiré en premier, Marin ou les policiers, les témoignages sur ce point restent contradictoires. Marin, un repris de justice de 32 ans, est soupçonné d’avoir participé au rapt du petit Mérieux. Il a été abattu dans le cadre de cette affaire, mais la mort de Jean-Pierre Marin, c’est quand même une pièce du dossier du juge Renaud. Souvenez-vous, le juge Renaud est abattu à Lyon dans la nuit du 4 juillet alors qu’il regagne son domicile après un dîner à la campagne. Emotion intense dans le pays tout entier, mais black-out total sur l’affaire. Et puis, début janvier, une rumeur. La police a identifié les tueurs. Le préfet de police de Lyon confirme à demi-mot puis fait machine arrière. Trop tard, deux noms circulent. Et comme les enquêteurs, faute de preuves ne font rien, les deux hommes mis en cause, deux repris de justice, parlent de porter plainte.