Les mouvements sociaux à Lyon et à Grenoble

20 mai 1968
02m 50s
Réf. 00234

Notice

Résumé :

Beaucoup d'entreprises de la région Rhône-Alpes sont en grève . Toute la ville de Lyon est paralysée, il n'y a plus de bus , ni de train, ni d'avion. La situation est identique à Grenoble où dans tous les domaines le personnel est en grève.

Date de diffusion :
20 mai 1968
Source :

Éclairage

Le jour du reportage de Rhône-Alpes Actualités le lundi 20 mai est, en apparence, le jour de mise en grève généralisée. Alors que la grève reste minoritaire, le sentiment dominant est que le pays entier est arrêté. Les Français ont de ce fait soif d'informations : les 20 et 21 mai représentent les plus forts taux d'écoute mensuels des journaux télévisés. Les images du panorama régional insistent sur l'occupation des usines et l'arrêt des transports et des fabrications. Les symboles forts que constituent l'arrêt des trains, des bus, des raffineries et des grosses entreprises comme Neyrpic, la Rhodiacéta ou Berliet, la fermeture des écoles et des bureaux de poste, ont sans doute accrédité dans l'opinion publique le sentiment, conforté par les nouvelles qui en sont données par la télévision, la radio et la presse, que le pays entier était arrêté. Publié le 21 mai, Le Monde titre, pleine page à la une, « L'activité du pays est totalement paralysée ». Toutes les entreprises ne sont pas en grève : le maximum est atteint dans les grandes de l'automobile et de la chimie ; le minimum dans les petites et moyennes et les industries alimentaires.

La grève nationale de la SNCF débute dans la région le 16 mai au dépôt de Givors-Badan pour la défense de l'emploi de deux intérimaires et s'étend très rapidement grâce au système de communication interne dans l'entreprise. C'est le 17 mai que les deux usines rhodaniennes de Rhodiaceta entrent en grève, en même temps que Richard-Continental, Brandt, Paris-Rhône et Rhône-Poulenc, ainsi que Berliet, le constructeur de poids lourds, qui avait déjà connu une ébauche de grève en mars 1968. L'anagramme de LIBERTÉ surplombant la porte E de l'usine Berliet-Vénissieux est devenu emblématique du mouvement gréviste (mais on ne le voit pas dans le reportage), en oubliant qu'il s'agissait d'une réminiscence de la Libération en 1944. À Lyon et dans les autres communes de l'agglomération, les services municipaux sont fermés, seule une permanence est assurée pour l'état-civil. Tous les établissements de la Sécurité sociale sont en grève, et les salariés qui souhaitent reprendre le travail en sont empêchés par un piquet de grève. Dans le secteur privé, la grève est massive. Elle touche 111 entreprises de la métallurgie employant 51 140 salariés, 21 entreprises de la chimie (16 258 salariés), 8 du textile (9 131 salariés), 10 de l'imprimerie (1 107 salariés), 26 du bâtiment (2 683 salariés) et 7 des transports (751 salariés). A l'exception de deux, tous les grands magasins de l'agglomération sont fermés. Les principaux journaux locaux cessent leur parution le 21 mai. La consigne donnée par la CGT aux salariés qui occupent leur entreprise est de veiller à l'entretien des machines et des locaux — respectabilité ouvrière oblige — mais également de refuser tout contact avec la composante étudiante du mouvement. À Grenoble, les images de la grève des trains et de la gare vide s'ajoutent à celles des mots d'ordre écrits sur les banderoles « CGT-CFDT tous unis pour une véritable démocratie », « Les travailleurs occupent l'usine », « La retraite à 60 ans », « Du travail aux jeunes et déjà !», « Garantie de l'emploi » et « libertés syndicales ».

Michelle Zancarini

Transcription

Journaliste 1
Les usines prennent aujourd’hui un autre aspect telle la raffinerie de Feyzin qui est arrêtée depuis ce matin 6 heures. Seuls restent en place les piquets de sécurité. 1200 personnes sont en grève. Fabrication, distribution sont stoppées, les locaux sont occupés. Même situation à Rhodiacéta que ce soit à Lyon Vaise, Saint Fons ou péage de Roussillon, le mouvement touche près de 10000 personnes. Autres usines touchées, Pulmann. Chez Berliet, également, 12000 personnes ont cessé le travail et occupent les ateliers exposant leurs revendications.
(Musique)
Journaliste 1
Dans les transports en commun, les bus sont restés au dépôt, grilles fermées, piquets de grève en place. De nombreuses personnes n’ont pu de ce fait se rendre à leur travail, du moins pour ceux que la grève ne touchait pas.
(Musique)
Journaliste 1
A la SNCF, les images parlent elles aussi d’elles-mêmes. Le trafic est complètement bloqué, les locaux occupés, la grève est suivie à 100% par le personnel sauf pour les équipes de sécurité. Les denrées périssables ont été acheminées dans les meilleurs délais. Images insolites aussi que celles prises par nos cameramen, à l’aéroport de Bron où le trafic est totalement paralysé. Locaux déserts tandis que sur les pistes, quelques avions bloqués au sol attendent de problématiques passagers. Ces images se répètent dans de nombreux domaines et Lyon offre par endroit le spectacle d’une ville frappée de paralysie.
(Musique)
Journaliste 2
A Grenoble, la situation est presque identique. Dans le secteur public, le mouvement est largement suivi, aux postes et télécommunications, la grève est totale. Grève totale également à la SNCF comme nous le montrent ces images. Pas un seul train n’est arrivé ou a quitté Grenoble aujourd’hui. Débrayage également à la Sécurité Sociale ainsi qu’à l’Electricité et au Gaz de France où la sécurité est néanmoins assurée. Dans le secteur privé, on compte quelques 25000 grévistes, plusieurs usines sont occupées, c’est le cas notamment à Jarrie et à Froges, dans les industries métallurgiques. A Grenoble où les images que nous vous présentons ont été recueillies en fin de matinée chez Merlin Gérin. A Grenoble toujours, le personnel municipal est en grève.
(Musique)
Journaliste 2
Les transports en commun sont arrêtés ce matin, il n’y avait pas un seul bus en service dans l’agglomération Grenobloise.