La fabrication du Picodon dans la Drôme à Crest

18 juillet 1987
02m 15s
Réf. 00278

Notice

Résumé :

La coopérative laitière de Crest fabrique du Picodon à grande échelle qui est ensuite vendu en France ou à l'étranger. Bien que l'ouverture des frontières avec l'Europe ait menacé le fromage, les producteurs ne sont pas inquiets.

Date de diffusion :
18 juillet 1987
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Éclairage

Un fromage qui pique un petit peu, voici, semble-t-il, l'étymologie du picodon, un palet de chèvre à pâte molle blanche ou jaune que l'on fabrique entre Drôme et Ardèche, « picaudou », « picauoudou » ou « picaïdon », en occitan.

Le picodon est l'un des 46 fromages bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée en France (2010). L'AOC picodon a été officiellement reconnue par décret en juillet 1983, mais le cahier des charges définissait les grandes lignes de la production et de la fabrication. La réforme de la politique agricole commune (PAC) annoncée pour 1992 attise déjà, en ce mois de juillet 1987, comme nous l'expose le reportage de France 3, les craintes des agriculteurs et des producteurs de picodons qui craignent la concurrence étrangère.

Le combat des producteurs locaux auprès de l'INAO, créée en 1990, et la mise en place de l'appellation d'origine protégée (AOP) par l'Europe, sous l'impulsion de la France, en juillet 1992, va permettre d'harmoniser les différents systèmes de protection nationaux et de protéger « la dénomination d'un produit dont la production, la transformation et l'élaboration doivent avoir lieu dans une aire géographique déterminée avec un savoir-faire reconnu et constaté ». Le combat sera définitivement gagné le 25 août 2000, par la publication d'un décret au Journal officiel. L'aire géographique est désormais clairement définie : ne pourront se prévaloir de l'appellation « picodon » que les fromages produits selon le cahier des charges dans les départements de l'Ardèche et de la Drôme ainsi que le canton de Barjac pour le Gard et l'enclave de Valréas pour le Vaucluse.

Le picodon s'enorgueillit d'une histoire pluricentenaire. En effet, les premières traces écrites, retrouvées dans la région, dateraient du XIVe siècle. On raconte même que Ronsard en aurait dégusté au château de Tournon, deux siècles plus tard, alors qu'il était le page du dauphin (à l'époque le poète est à peine âgé de 12 ans).

Réservée à une consommation familiale, le picodon commence à se répandre sur les tables de la région à la fin du XIXe siècle, grâce notamment au petit train du picodon entre Dieulefit et Montélimar. Il fait même son entrée dans le Littré en 1883, avec la définition suivante : « nom d'un fromage estimé qui se fabrique dans le Drome [sic] ». Et en 1933, le célèbre « prince des gastronomes » Curnonsky lui donne une place de choix dans son Trésor gastronomique de France.

Le picodon est encore fabriqué selon des méthodes ancestrales. C'est un fromage caillé en bassine, coagulé par emprésurage, moulé à la louche dans des faisselles, salé et tourné plusieurs fois, avant d'être séché et affiné. Il existe deux types d'affinages : classique avec une croûte fleurie blanche ou bleue et Dieulefit avec une croûte lavée et un affinage prolongé (au moins un mois).

De nos jours, la tradition est perpétuée par les transformateurs, les affineurs et les producteurs fermiers. Il y a 125 producteurs fermiers dont 40 livrant aux affineurs, 260 producteurs de lait, 4 affineurs et 4 entreprises.

Depuis avril 2000, le financement d'un Programme intégré de développement agricole par la Région Rhône-Alpes, abondé par les conseils généraux d'Ardèche et de Drôme, soutient les actions d'investissement de promotion et de notoriété.

Michelle Zancarini

Transcription

(Bruit)
Journaliste
Pour ces 2 picodons, une seule appellation d’origine, Picodon de la Drôme. Le premier vient de la coopérative laitière de Crest. Il y est produit à grande échelle tout en respectant l’essentiel de la tradition, moulé, retourné, salé et séché. La coopérative fabrique 3 picodons plus ou moins secs et moelleux avec ou sans fleur. Production en 86, plus de 3 millions de pièces, la clientèle des centrales d’achat, des crémiers, des restaurateurs et des pays étrangers, Etats-Unis, Belgique ou Allemagne. L’Europe justement menace le picodon. 1992, abolition des frontières, les laits de chèvre espagnols ou autres peuvent envahir la France. Résultat, des fromages de chèvre moins typés, mais surtout moins chers. Pour conserver son appellation d’origine, la coopérative doit, elle, rester fidèle à ses méthodes et à ses 400 producteurs de lait de la Drôme, d’où des coûts de production difficiles à réduire. Pour l’instant, pas de quoi s’affoler, la concurrence s’annonce sévère, mais le picodon a encore 5 années devant lui pour imposer sa qualité.
(Bruit)
Intervenant
Je crois qu’on fait tous le même picodon, et je crois que c’est justement tous ensemble et pour qu’on voie notre produit de la Drôme que l’on doit œuvrer.
Journaliste
Tous, c'est-à-dire la coopérative et les fermiers indépendants. Monsieur et Madame Manier possèdent 85 chèvres, ils fabriquent des picodons fermiers depuis plus de 20 ans. Comme 80 autres producteurs, ils font partie de l’association de défense et de promotion du picodon. Leur clientèle, différente de celle de la coopérative, ils vendent essentiellement à des particuliers. Des résultats en baisse très nette l’année passée, les producteurs se sont regroupés pour défendre un label de qualité. Action positive, puisqu’il y a 2 ans, ils ont réussi à empêcher les Chiliens de déposer un brevet de fabrication. Reste à trouver une solution pour vendre plus et plus loin. L’enjeu, occuper le marché avant que la concurrence européenne s’en empare.
(Bruit)