La Biennale du design de Saint-Étienne

07 novembre 1998
02m 06s
Réf. 00298

Notice

Résumé :

Pour la première Biennale internationale du design de Saint-Étienne, des centaines d'artistes internationaux se sont rassemblés pendant une semaine. Des objets du quotidien, revisités par des créateurs à l'imagination foisonnante, animent le lieu.

Date de diffusion :
07 novembre 1998
Source :

Éclairage

En novembre 1998, Jacques Bonnaval, directeur de l'école des Beaux-Arts de Saint-Étienne, lance la Biennale internationale Design. Une manifestation regroupant designers, écoles, agences et entreprises du monde entier dont l'objectif est de sensibiliser les chefs d'entreprises à la diversité des enjeux du design, « devenu pour le monde industriel l'atout fondamental du marketing et de la compétitivité des entreprises ». Mais aussi de montrer, comme le dit joliment Jacques Bonnaval dans le JT de France 3 du 7 novembre 1998, que le design peut servir les besoins des hommes et des femmes, non pas pour qu'ils consomment plus, mais pour qu'ils consomment mieux, « en fonction d'une histoire et de rêves aussi ».

Le pari est audacieux. Pour le grand public, le design est bien souvent synonyme d'objets aux formes excentriques sans grande utilité. On oublie qu'un designer doit développer une démarche d'analyse et de création qui intègre les données techniques, commerciales et culturelles de l'entreprise pour laquelle il travaille. Il doit créer la forme la plus adaptée à son usage, à sa fabrication, aux savoir-faire spécifiques de l'entreprise concernée et, bien sûr, aux besoins des futurs utilisateurs.

Berceau de la première industrialisation, Saint-Étienne a fondé son essor et sa réputation en grande partie sur la conception et le développement d'objets manufacturés dans les secteurs-clés de son économie : arme, cycle, passementerie (rubanerie). L'école des Beaux-arts a d'ailleurs été fondée dans ce but en 1857 : répondre aux desiderata des industriels qui souhaitaient renouveler en permanence la décoration de leurs produits. Le design est donc inscrit en filigrane dans l'histoire industrielle de Saint-Étienne. Mais depuis la fin des années 1970 et la crise de l'industrie, la ville a dû travailler à sa reconversion, changer son image de « ville noire », minière et industrielle.

Pour la biennale, il était donc important de renouer avec les racines de la ville, de s'inscrire dans cette longue tradition liant art et industrie, mais aussi de s'ouvrir aux créateurs du monde entier, de favoriser les échanges entre designers des pays riches et des pays en voie d'industrialisation, de montrer que le design est le garant de la diversité culturelle. Ainsi la biennale accueille-t-elle en cette première édition plusieurs centaines d'artistes nationaux et internationaux, quelque 3 500 produits et de nombreuses manifestations (expositions, colloques, séminaires, défilés de mode, événements artistiques) organisées en plusieurs lieux de la ville.

En 2005, Saint-Étienne et son agglomération créeront la Cité du design, une institution vouée à démocratiser le design auprès de tous les publics, d'en développer les usages et les bénéfices et, plus globalement, de contribuer à dessiner le visage du Saint-Étienne de demain. L'année suivante, l'école des Beaux-Arts devient l'École supérieure d'art et design de Saint-Étienne (ESADSE). La Cité du Design est désormais chargée d'organiser la biennale. En 2008, pour le dixième anniversaire, 65 000 visiteurs se presseront confirmant que la biennale est désormais l'un des rendez-vous incontournables des amateurs de design.

En 2009, la Cité du design s'est dotée d'une nouvelle vitrine en investissant le site de l'ancienne Manufacture d'armes de Saint-Étienne (la MAS dite « la manu »). Finn Geipel et Giulia Andi de l'agence berlinoise LIN ont été chargés de réhabiliter trois bâtiments classés aux Monuments historiques et d'en construire deux nouveaux, à l'architecture contemporaine très audacieuse : la Platine (long édifice modulable couvert d'une résille d'acier et de milliers de panneaux triangulaires servant au contrôle de la lumière, de l'isolation ou de la ventilation), et la tour observatoire (qui offre un panorama à 360°).

Saint-Étienne semble donc avoir réussi son pari : pour preuve, la ville a rejoint fin 2010 le très sélect réseau des villes de design de l'Unesco, aux côtés de Berlin, Buenos Aires, Graz, Kobe, Montréal, Nagoya, Shenzhen, Shanghai ou encore Séoul.

Michelle Zancarini

Transcription

Présentatrice
Plusieurs centaines de créateurs se retrouvent à Saint-Etienne pendant une semaine à l’occasion de la première biennale du design. Au programme, 3 500 produits, beaucoup d’objets du quotidien repensés, retravaillés par ces artistes internationaux. Visite guidée en compagnie de Farid Haroud et d’Yves Aulanier.
Journaliste
L’étagère vue par un designer brésilien n’a pas grand-chose à voir avec celle qui se trouve chez vous. Quant aux fauteuils, quand ils sont créés par un sénégalais ou par un anglais, ils montrent des différences évidentes. Les objets de notre vie quotidienne présentés à la Biennale de Saint-Etienne, sortent de l’imagination de designers venus des cinq continents. Après l’uniformisation des biens de consommation, dans les années 70 et 80, la création tente de se frayer une voie entre la mondialisation de l’économie et le respect des identités culturelles.
Kacques Bonnaval
Et puis le but n’est plus seulement le succès des grandes entreprises internationales, mais aussi quels sont les besoins des hommes, là où ils vivent, il n’est pas forcément non plus de consommer plus mais de consommer mieux, de consommer en fonction de l’Histoire, de consommer en fonction d'un rêve aussi peut-être.
Journaliste
Le rêve pour cet architecte d’origine argentine est représenté pas ces habitacles. Le mariage des couleurs lui vient de souvenirs d’enfance et de son quartier de La Boca, à Buenos Aires. Mais au-delà de ce concept de la maison, il développe d’autres objets destinés à la production en série. C’est le paradoxe de l’entente entre designers et industriels.
Nestor Perkal
Ils sont amenés tous les deux à se comprendre. Mais moi je crois qu’elle est nécessaire, elle est indispensable en même temps qu’un renouveau technologique, un renouveau créatif est indispensable dans notre vie de tous les jours sinon les entreprises, notamment en France, s’il n’y avait pas de création, elles n’existeraient plus.
Journaliste
Le design constitue désormais un atout du marketing des entreprises industrielles. Tous les domaines de la consommation sont concernés. Sans nier les enjeux économiques, l’un des buts de la biennale consiste à rappeler que la mondialisation génère à coup sûr, la banalisation. Les designers sont donc en quelque sorte les garants de la diversité humaine, en tout cas tant qu’ils auront des idées.