Le pape à Lyon

04 octobre 1986
02m 20s
Réf. 00461

Notice

Résumé :

Lors de cette première journée de la visite du pape en France, 300 000 fidèles se sont retrouvés au parc des expositions à Lyon pour entendre Jean Paul II. La cérémonie de béatification du père Antoine Chevrier, y a été célébrée.

Date de diffusion :
04 octobre 1986
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Éclairage

Jean-Paul II accomplit du 4 au 7 octobre 1986 son troisième voyage en France. Après Paris et Lourdes, il vient à Lyon et en profite pour effectuer deux déplacements à Ars et Annecy. On le voit ici l'après-midi du premier jour présider la béatification d'un prêtre du diocèse de Lyon. L'abbé Antoine Chevrier (1826-1879), nommé vicaire de la paroisse Saint-André dans le quartier de la Guillotière après son ordination en 1850, découvre qu'il suffit de traverser le pont du Rhône pour rencontrer la misère prolétarienne. Il dénonce l'exploitation des ouvriers et de leurs enfants et décide de vivre au milieu d'eux et comme eux. Il acquiert en 1860 la salle de bal du Prado qui donne son nom à une salle d'asile (école) pour enfants, puis à la société de prêtres que l'abbé lance vers 1870 et à laquelle des femmes ouvrières s'associent. La société se développe au XXe siècle, dans l'esprit de pauvreté et de solidarité de son fondateur. Dans les années 1950 elle s'engage dans l'expérience des prêtres ouvriers et réussit, grâce à son supérieur Mgr Ancel, à obtenir le droit de maintenir certains membres dans le monde du travail malgré la condamnation romaine des prêtres ouvriers. Elle se distingue aussi par ses engagements en faveur de la décolonisation ou de la fin de la guerre d'Algérie, puis pour la défense des droits des immigrés et s'implante dans le Tiers-monde.

La cérémonie se tient dans le Parc des expositions de Lyon et rassemble une foule considérable évaluée à plus de 300 000 personnes. L'affluence illustre le succès du voyage d'un pontife dont certains clercs et laïcs, notamment à Lyon, ont pourtant vivement contesté les prises de position et des initiatives qui leur semblent remettre en cause les ouvertures conciliaires. Le pape profite des circonstances et de l'exemple donné par le père Chevrier et le Prado pour souligner dans son homélie, son attachement aux exigences sociales nées de la foi chrétienne et rappeler la fécondité de la tradition catholique lyonnaise en la matière. Il apporte ainsi son soutien, au cardinal Albert Decourtray, archevêque de Lyon (1981-1994) qui a pris des positions courageuses en faveur des immigrés et des musulmans (on le voit et entend furtivement dans une incrustation). Dans un contexte social déjà dominé en France par la crise économique, il prend clairement parti pour la défense des plus fragiles, appelle les catholiques à être au premier rang dans la solidarité avec les « nouveaux pauvres » et la promotion des droits des immigrés, en particulier le droit au regroupement des familles. Autant de thèmes qu'il reprendra dans diverses encycliques. Fidèle à sa conviction que la solution des questions sociales passe par une transformation spirituelle, il insiste sur l'importance de donner une nourriture à la fois matérielle et spirituelle.

Son voyage confirme la difficulté de classer un pape hors norme. Il mêle dans ses discours retour aux sources, symbolisé le matin même de son arrivée par une cérémonie dans l'amphithéâtre des trois Gaules (à la Croix Rousse) où des chrétiens de la région avaient été martyrisés en 177, réaffirmation d'une identité catholique, défense de l'orthodoxie et de la tradition, rencontres œcuméniques, dialogue interreligieux avec le judaïsme, engagement dans la vie sociale et internationale. Soucieux de prendre ses distances avec l'air du temps, il fait applaudir par les jeunes réunis au stade de Gerland (5 octobre) un discours dont la conclusion est un éloge du modèle catholique en matière de mariage et de sexualité.

Cette visite laisse dans la région une marque durable, pour quelques-uns à cause du discours tenu, pour le plus grand nombre à cause des talents de communicateur et de la personnalité du pape. Un grand concert en son honneur, mis en scène et dirigé le soir du 5 octobre au pied de la colline de Fourvière par le Lyonnais Jean-Michel Jarre, constitue le point d'orgue d'une rencontre réussie avec la population même si elle n'inverse pas les tendances lourdes d'un catholicisme régional dont l'influence s'affaiblit.

Pour accéder au texte des discours prononcés pendant le voyage du pape, voir le site officiel du Vatican.

Claude Prudhomme

Transcription

Présentateur
Au moins 300 000 fidèles se sont retrouvés cet après-midi au parc des expositions de Lyon, à Eurexpo pour entendre Jean-Paul II, au terme d’une journée très chargée avec deux mots d’ordre en direction de l’Eglise de France : occupez vous des pauvres, occupez vous des immigrés. Compte-rendu de François Cornet et de Jean-Marie Lequertier.
Journaliste
C’est sous un soleil estival sur le parc des expositions de Lyon que Jean-Paul II, après un bref repos au séminaire Sainte-Irénée, a béni les 300 000 fidèles venus assister à la grande messe de béatification du père Antoine Chevrier ; précurseur des prêtres ouvriers, apôtre des quartiers pauvres de la banlieue de Lyon, mort le 6 octobre 1879. Cette cérémonie était le premier grand rendez-vous de masse de ce voyage pontifical.
Inconnu 1
Soyez le bienvenu dans notre ville, la ville des premiers chrétiens.
Journaliste
Après son appel ardent et pressant de ce matin pour une trêve de 24h des combats sur la terre, Jean-Paul II va inviter à Lyon les chrétiens à être au premier rang de ceux qui luttent en faveur des immigrés.
Inconnu 2
Très Saint-Père, votre visite sera pour nous tous…
Journaliste
Evoquant longuement l’œuvre du père Chevrier, le Saint-Père va consacrer son homélie aux nouveaux pauvres et aux immigrés.
Jean-Paul II
Même si les problèmes de leur intégration demeurent complexes, en considération du bien commun du pays ; l’Eglise ne se résoudra pas à ce que l’on manque de respect envers leur personne, leurs racines culturelles, ni d’équité devant leur nécessité et ceux de leur famille qui ont besoin de vivre avec eux.
Journaliste
Ce n’est plus seulement le monde ouvrier qui est touché, a ajouté le Saint-Père mais d’autres milieux. Dans une civilisation de consommation à outrance, il y a paradoxalement des nouveaux pauvres qui n’ont pas le minimum social. Une cérémonie qui s’est terminée par une communion massive à la nuit tombante.