Simone Veil et la maîtrise des dépenses de santé

13 avril 1977
03m 33s
Réf. 00024

Notice

Résumé :

Pour assurer l'équilibre financier de l'Assurance maladie et face à la progression rapide des dépenses de santé, la ministre Simone Veil distingue celles « de confort » et les « indispensables ».

Date de diffusion :
13 avril 1977
Source :
FR3 (Collection: FR3 dernière )
Personnalité(s) :

Éclairage

A la fin des années 1970, les régimes sociaux connaissent déjà un déséquilibre financier, les recettes ne couvrant pas les dépenses engagées. L'accroissement conséquent des dépenses de santé résulte notamment de l'évolution des méthodes de soins et l'apparition de techniques médicales particulièrement coûteuses (rein artificiel, examens sophistiqués, lits de réanimation...).

Les pouvoirs publics sont conscients qu'à défaut de réduire ces dépenses d'Assurance maladie, il faut freiner leur croissance et apprendre à la maîtriser.

Tout concourt en effet à leur augmentation, une population vieillissante entraînant des frais liés à l'âge, les progrès médicaux déjà évoqués qui bénéficient à tous les assurés quel que soit leur revenu, la création ou la modernisation de nombreux établissements hospitaliers, ou encore à l'époque l'augmentation du nombre de médecins, désignée comme un facteur de dépenses, la consommation suivant la même tendance que l'offre de soins.

S'y ajoutent les transferts nets du Régime général des salariés au profit des régimes spéciaux et autonomes, en vue de combler leurs déficits dans le cadre de la compensation démographique (rapport entre cotisants et bénéficiaires) généralisée par la loi du 24 décembre 1974, dont les montants se sont fortement accrus, compte tenu de la réduction progressive du nombre d'actifs dans certaines catégories professionnelles (voir La Compensation démographique).

Au niveau des ressources quasi-exclusivement basées sur les salaires, il est déjà évoqué la nécessité d'une croissance économique forte pour permettre une évolution de l'emploi suffisamment marquée chaque année, alors que les effectifs salariés connaissent le mouvement inverse depuis 1975, et bien sûr un relèvement des taux de cotisations, tout en soulignant les conséquences dommageables, en particulier sur la compétitivité et l'emploi, d'une augmentation des charges sociales.

En dépit du plan de redressement des finances de septembre 1976 qui a simplement permis de réduire ponctuellement le déficit par des rentrées supplémentaires de cotisations et un ralentissement des dépenses de santé, Simone Veil, Ministre de la santé et de la Sécurité sociale, est amenée dès le printemps 1977 à présenter de nouvelles mesures. Très partiellement appliquées, elles sont aussitôt suivies d'un deuxième plan Veil en décembre 1978, dont les mesures « doivent permettre de rétablir, sur des bases stables, le financement de la Sécurité sociale pour les trois prochaines années ».

En réalité dès juillet 1979 son successeur, Jacques Barrot, présente un nouveau plan nécessité par le déficit connu pour 1978 – dont la moitié vise la branche Maladie – et de ses perspectives d'évolution, évoquant l' « urgence à parer aux conséquences financières de ces évolutions qui, s'il n'y était pas porté immédiatement remède, engendreraient, dès le mois de septembre prochain, des crises de trésorerie d'une ampleur telle que le risque de cessation de paiement des prestations de l'ensemble du système ne pourraient être exclu ». Voir à ce sujet Le plan Barrot de 1979.

Et face à la persistance de ces difficultés, les réformes gouvernementales vont se succéder, jusqu'à la création des lois de financement de la Sécurité sociale en 1996 et la compétence donnée au Parlement pour se prononcer sur son équilibre financier (voir La Constitution est modifiée pour les LFSS).

Christiane Talbot

Transcription

Présentatrice
Mesdames et messieurs, bonsoir. La Sécurité sociale ne se porte pas si mal que ça, elle se porte en tout cas mieux que prévu. Le déficit de a Sécurité sociale n’atteindra que 400 millions de francs en 77, c’est important mais on s’attendait à 12 milliards de déficit. Cependant, l’an prochain, compte tenu de l’entrée en vigueur du complément familial, le déficit sera sans doute de 5 à 6 milliards. Il faut donc résorber ce déficit et le ministre de la Santé, Madame Simone Veil, a présenté aujourd’hui une série de mesures. La suppression de tout ticket modérateur pour les médicaments irremplaçables, qui seraient ainsi remboursés à 100%. En revanche, les médicaments dits de confort seraient, eux, limités dans le remboursement pour éviter leur surconsommation. Cette mesure a été vivement critiquée par la CGT et la CFDT entre autres. Autre mesure, le gouvernement envisage d’instituer un forfait journalier dans les hôpitaux. Ceci consisterait à demander à tous les malades une somme forfaitaire égale pour tous quel que soit le motif du séjour. A la sortie de l’hôpital, on paierait une somme totale correspondant à ce forfait journalier multiplié par le nombre de jours d’hospitalisation. Nous consacrerons demain soir notre édition spéciale Un journal, un événement à ce problème de la Sécurité sociale, nous aurons donc l’occasion d’entrer plus avant dans le détail des mesures envisagées. Le gouvernement vise surtout à une maîtrise des dépenses et une gestion plus rigoureuse. Cependant, Simone Veil réfute les termes de gaspillage et de déficit chronique appliqués à la Sécurité sociale.
Simone Veil
Non, je crois que je n’aime pas employer les mots gaspillage et irresponsabilité, parce qu’ils ont un sens péjoratif que cela n’a pas. Je crois que les Français ne sont pas toujours conscients du fait que la santé coûte cher et qu’il faut donc essayer de prendre en charge ces dépenses pour les économiser au maximum. Depuis dix ans, les dépenses de santé ont augmenté considérablement pour des causes démographiques, en raison du progrès médical, en raison de l’amélioration apportée aux hôpitaux et les ressources de la Sécurité sociale n’ont pas du tout augmenté en conséquence. Il faut donc que ces dépenses qui sont faites soient le mieux rentabilisées possible. Et que jusqu’ici, certaines dépenses qui pouvaient être considérées comme un confort et qui n’avaient pas toujours un caractère totalement indispensable soient évitées afin de limiter tout ce qui n’a pas un caractère totalement sérieux, et de concentrer toutes les dépenses sur celles qui sont indispensables pour conserver notre santé. C’est à ce prix que la Sécurité sociale conservera un équilibre. Car sinon, il faut bien le dire, que du fait des dépenses d’assurance maladie, ce déséquilibre que l’on a constaté l’année dernière, c’était prévu comme, que l’on pouvait craindre comme extrêmement grave pour 1977 et qui n’a d’ailleurs été compensé, et je crois qu’il faut le souligner, que parce qu’il y a eu une augmentation importante des cotisations, se retrouvera à nouveau en 1978. Or, on ne peut chaque année augmenter les cotisations. Les Français, interrogés sur ce point récemment, ont estimé que dans une très large majorité, qu’ils dépensaient assez pour leur santé. Il faut donc que cette masse qui est consacrée aux dépenses de santé soit utilisée au mieux, qu’elle soit le mieux gérée possible et que chacun ait conscience que la santé a un prix et qu’il ne faut pas en définitive mal user de ce que la collectivité mette à notre service pour améliorer notre situation.