Sécurité sociale : les conditions de l'équilibre

29 décembre 1980
03m 29s
Réf. 00095

Notice

Résumé :

Le plan Barrot amène la Sécurité sociale à l'équilibre, mais cet équilibre est fragile et précaire. Les travaux du 8e plan font apparaître que les dépenses croissent et croîtront plus vite que les recettes.

Date de diffusion :
29 décembre 1980
Source :
TF1 (Collection: IT1 20H )
Personnalité(s) :

Éclairage

Six mois avant l'élection de François Mitterrand, le journaliste fait un point de situation sur le plan de financement de Jacques Barrot, Ministre en charge de la Sécurité sociale, lancé un an plus tôt. Il note qu'aux dires du ministre le budget de la Sécurité sociale serait à l'équilibre. Dans la bouche du journaliste le mot "inattendu" pour caractériser cette situation marque à la fois la surprise et le scepticisme.

Il est vrai que ce plan, qui comporte d'une part une hausse d'un point de cotisation (sur 18 mois), et un ensemble de mesures de maîtrise de la consommation médicale et de freinage des dépenses de santé, peut assurer un certain équilibre financier, mais seulement à titre temporaire.

L'important dans la démonstration présentée est qu'en matière de protection sociale les dépenses croissent plus vite que les recettes, et on dépensera de plus en plus. Les travaux du 8ème plan sont cités à ce sujet, mais ce type de constatation est repris très régulièrement depuis 35 ans.

Dès lors se pose la terrible question du rétablissement des finances de la Sécurité sociale.

Comme l'évolution des recettes est totalement liée à celle de la richesse nationale, il faut donc agir sur les dépenses.

Les dépenses de protection sociale représentent 30 % du PIB, et ce chiffre augmente. Réduire les dépenses, s'est se faire accuser de toucher aux avantages sociaux. L'exercice de freinage des dépenses est donc extrêmement périlleux pour un gouvernement.

C'est pourtant la voie raisonnable, car la hausse des recettes a atteint ses limites : ces propos ont été tenus en 1980.

Les entreprises payent déjà plus de la moitié des recettes de la Sécurité sociale, et aggraver leur contribution pénalise mécaniquement la croissance et fait donc augmenter le chômage.

Jean-François Chadelat

Transcription

Présentateur
En France maintenant, une bonne nouvelle pour la Sécurité sociale, son budget est en équilibre. C’est une nouvelle inattendue, si l’on songe que l’an dernier, on prévoyait un déficit de 24 milliards de francs. Le trou a été comblé de deux façons, un peu plus de recettes et un peu moins de dépenses. Un peu plus de recettes avec le 1 % du prélèvement exceptionnel, un peu moins de dépenses grâce à une consommation médicale plus raisonnable. Cela étant dit, il ne faut pas encore crier victoire, le ministre de la Santé Monsieur Barrot déclare tout simplement que la Sécurité sociale se porte mieux. Il l’a dit sur TF1 aujourd’hui à 13 heures en répondant aux questions de Jean-Pierre Pernaut et d’Emmanuel de la Taille ; qui analysent maintenant les raisons du redressement et les problèmes qui subsistent.
Journaliste
Sécurité sociale, le gouvernement a réussi un premier redressement, mais la défense de notre système social restera l’un des problèmes majeurs des prochaines années. Là, le rééquilibrage s’est effectué à la fois par un freinage des dépenses de santé, qui a économisé 10 milliards ; et par un accroissement des recettes par l’augmentation des cotisations sociales et de la part de l’État, qui a rapporté 15 milliards de plus. C’est ce qui a permis de boucher un trou de 24 milliards avec même une petite avance pour limiter le déficit en principe léger prévu l’an prochain. Cela dit, la défense de la Sécurité sociale est loin d’être assurée contre les dangers de l’avenir. Regardons notre système. Pour protéger les Français, contre les misères d’autrefois, la maladie, la retraite, les familles sans ressource ou le chômage ; nous utilisons 30 %, un chiffre énorme, de notre production de nos revenus en dépense de prestations sociales, qui à la fois soutiennent et chargent l’économie. Mais voilà le problème crucial, ces avantages sociaux ont été basés sur des années de forte croissance du gâteau national. Or maintenant, suivant le 8ème plan, avec la crise, il y aura une tendance durable à ce que les dépenses augmentent beaucoup plus rapidement que les recettes. D’où les deux risques, réduire les dépenses, donc les avantages sociaux, et accroître les recettes, donc les charges. Regardons côté dépenses, la maladie, le quart des dépenses. On a commencé le freinage, notamment par une meilleure gestion hospitalière. On peut continuer sur la prévention de l’alcoolisme, mais c’est long. Retraite, un gros tiers des dépenses, là problème capital, on le sait. A l’avenir, il y aura de plus en plus de retraités. Famille, le sixième des dépenses, si l’on veut encourager la natalité, il faut, comme on le fait, augmenter les prestations familiales. Enfin, plus le chômage augmente, plus les dépenses s’alourdissent, 44 milliards l’an prochain. Le freinage des dépenses est donc une opération extrêmement périlleuse. Quant aux recettes, qui paie les charges ? Finalement, nous tous, les assurés, salariés ou non, le cinquième, par les cotisations. Et puis, l’État, le cinquième que nous payons par des impôts. Et enfin, les entreprises, plus de la moitié par les charges, ce que nous payons par les prix et des handicaps pour les entreprises. Or justement, suivant le 8ème plan, la condition première du salut, c’est de ne pas surcharger les entreprises de façon à accélérer la croissance et réduire le chômage. Le redressement dans la crise de la défense de notre protection sociale demandera donc encore de longs efforts de gestion, et sans doute de meilleures répartitions des cotisations. Mais pour le moment, comme promis, on nous supprime le point supplémentaire de cotisation sociale le 31 janvier.