Le plan Séguin

01 juillet 1986
01m 46s
Réf. 00042

Notice

Résumé :

Encore un plan de financement de la Sécurité sociale. Il porte le nom de son auteur, Philippe Séguin qui fut un des plus grands ministres de la Sécurité sociale, comme en témoignent ses funérailles nationales organisées lors de son décès. Le principe directeur de ce plan est la lutte contre la dérive vers le 100 %. Cette problématique est toujours d'une brûlante actualité.

Date de diffusion :
01 juillet 1986
Source :
FR3 (Collection: SOIR 3 )
Personnalité(s) :

Éclairage

Avec le changement de couleur politique du Gouvernement après les élections de mars 1986, Philippe Séguin devient Ministre des Affaires sociales avec les attributions les plus larges, puisque son ministère comprend, outre la Sécurité sociale, la santé, la famille, le travail et l'emploi.

Dans l'histoire du ministère, cette configuration a été plutôt rare. On peut citer Edgar Faure au début des années soixante-dix et Pierre Bérégovoy à la fin des années quatre-vingt, où le ministère prit cette taille maximum. La Sécurité sociale fut au début de son histoire rattachée au ministère du travail et dans les décennies les plus récentes au ministère de la santé.

Après s'être, pendant les premiers mois, consacré au dossier Travail – Emploi, car le chômage ne cesse d'augmenter, Philippe Séguin s'attaque au dossier de la Sécurité sociale. Il constate un déficit considérable. Ce type de constatation va devenir tellement habituel que l'on peut se demander si accoler Sécurité sociale et déficit ne constitue pas une forme de pléonasme.

Philippe Séguin décide donc de lancer des Etats généraux de la Sécurité sociale, une campagne symbolisée par une baleine en train de plonger. La symbolique était très forte : la baleine est un animal énorme - comme la Sécurité sociale -, la baleine a une image sympathique dans le public - comme la Sécurité sociale -, la baleine est représentée alors qu'elle plonge vers les abysses - comme le trou abyssal de la Sécurité sociale -, la baleine est une espèce menacée - comme la Sécurité sociale est menacée par tous ses détracteurs.

En dehors des mesures classiques que l'on retrouve dans tous les plans de financement de la Sécurité sociale, le plan Séguin a un axe fort. C'est celui de la dérive vers le 100 % en Assurance maladie.

En effet, les ordonnances de 1945 ont instauré, il faut le rappeler, le ticket modérateur. Le principe fondateur de la Sécurité sociale n'était pas, et d'ailleurs n'a jamais été, la prise en charge des dépenses maladie en totalité, c'est-à-dire à 100 %, sans ticket modérateur. Mais, dès 1945 une exception a été mise en place pour les Affections de Longues Durées (ALD), que l'on désigne également sous le vocable de « Thérapeutiques particulièrement longues et coûteuses ». C'est ce que l'on a appelé la règle de la 26e maladie. Il y avait en effet 25 maladies (aujourd'hui 30) particulièrement graves et énumérées nominativement, plus une « 26e maladie », non définie mais représentant pour l'assuré des coûts élevés. Ces 26 maladies bénéficient de l'exonération du ticket modérateur.

Philippe Séguin constate que la dérive vers le 100 % ne fait que croître. Pour casser cette dérive, il décide dans son plan que seuls donneront lieu à une prise en charge à 100 %, les soins liés à la maladie exonérante : l'ALD ; le reste reste soumis au ticket modérateur (TM ) même si l'assuré est en ALD. On crée l'ordonnancier bizone, encore en vigueur aujourd'hui. Un journaliste utilise cette expression imagée : « Le rhume de cerveau du cancéreux ».

Autrement dit, cela implique que toutes les dépenses liées strictement au cancer sont exonérées du TM, mais que les autres (par exemple le rhume de cerveau) doivent se voir appliquer un TM.

Aujourd'hui le constat que fait la Cnam montre que la situation n'a fait qu'empirer : près de 65 % des dépenses de l'Assurance maladie sont des dépenses prises en charge à 100 %, et d'ici quelques années on devrait atteindre les 70 % .

Jean-François Chadelat

Transcription

Présentateur
Le gouvernement a dévoilé aujourd’hui ses remèdes pour combler une partie du déficit de la Sécurité sociale. Ce déficit est dû essentiellement à l’accroissement du chômage et à celui du nombre des retraités, du fait en particulier de l’abaissement de l’âge de la retraite. Il y avait deux façons de combler le « trou », la première, faire des économies, pour cela, des projets sont à l’étude. Dans l’immédiat Philippe Séguin, le ministre des Affaires sociales, a choisi de mettre en oeuvre la deuxième solution, c’est-à-dire, trouver des recettes nouvelles. Marie-Claire Thiers nous explique comment.
Journaliste
Pas de restauration pure et simple du 1% sur le revenu, une mesure qui aurait le mérite de faire payer tout le monde ; mais qui contredirait l’objectif de baisse de l’impôt que s’est fixé le gouvernement pour 1987. A la place, une solution mixte, d’une part, une contribution exceptionnelle de 0,4% sur le revenu imposable. Une mesure qui doit rapporter 9,7 milliards de francs d’ici la fin de l’année prochaine. D’autre part, une augmentation de 0,7% de la cotisation assurance vieillesse et cela, à partir du 1er août prochain. Ce qui doit rapporter 10,4 milliards de francs d’ici fin 87. Des mesures immédiates qui permettront de résorber le déficit de la Sécurité sociale, qui se situera pour 1986 entre 20 et 25 milliards de francs, et pour 87, entre 37 et 40 milliards. Les cotisations sont à la seule charge des salariés.
Philippe Séguin
Absolument, pour une raison bien simple, c’est que nous souhaitions être en cohérence avec d’autres aspects de notre politique. Nous pensons que ce sont les entreprises qui créent les emplois, les emplois qui assureront demain, je l’espère, la survie de la Sécurité sociale, qui y contribueront. Dans ces conditions, il faut créer un environnement favorable aux entreprises, il faut plutôt aller dans le sens de l’allègement de leurs charges plutôt que d’une aggravation.