Appel à continuer la lutte

24 juin 1940
03m 33s
Réf. 00301

Notice

Résumé :

Le maréchal Pétain vient d'accepter les exigences de l'ennemi, le général de Gaulle dévoile ce qu'elles signifient dans une allocution diffusée par la BBC. Il affirme que la France, dans ses profondeurs, ne peut que refuser un tel accord. Il appelle les militaires, les ingénieurs et les ouvriers français à le rejoindre afin de continuer la lutte.

Type de média :
Date de diffusion :
24 juin 1940
Type de parole :

Éclairage

De Gaulle dénonce l'iniquité d'un armistice sollicité alors que toutes les possibilités de poursuivre la lutte n'avaient pas été épuisées, puis accepté malgré les conditions draconiennes imposées par les vainqueurs, allemand et accessoirement italien. Apparaît ici dans le discours gaullien un thème qui en demeurera un pilier fondamental au long de la guerre puis à la Libération - au moment de la reddition des comptes : avoir accepté l'armistice est et demeurera la tache indélébile de toutes celles et tous ceux qui n'auront pas su être de "bons Français". De Gaulle poursuit en appelant au sursaut pour refuser la servitude et sauver l'honneur, puis afin de reprendre la lutte dans l'Empire et aux côtés des Alliés. Il reprend l'argumentaire développé le 18 juin et invite les militaires français à le rejoindre. Elément nouveau, les ingénieurs et les ouvriers sont également sollicités sans que le Général précise qu'ils soient "spécialistes des industries d'armement" - cette précision figurait dans l'appel du 18 juin. Surtout, aux yeux de De Gaulle, ces militaires, ingénieurs et ouvriers sont les représentants des "hommes", "femmes", "jeunes gens" et "enfants" de France qui, "innombrables" ne se résignent pas. En d'autres termes, le glissement est amorcé vers une France libre conçue comme un mouvement non seulement militaire mais également politique et à vocation de rassemblement national, une France libre où "brille et brûle la flamme de la Résistance française".

Guillaume Piketty

Transcription

Charles de Gaulle
Ce soir, je dirai simplement parce qu'il faut que quelqu'un le dise, quelle honte, quelle révolte se lève dans le coeur des bons Français. Inutile d'épiloguer sur les diverses conditions des armistices franco-allemand et franco-italien. Elles se résument à ceci. La France et les Français sont pieds et poings liés livrés à l'ennemi. Mais si cette capitulation est écrite sur le papier, innombrables sont, chez nous, les hommes, les femmes, les jeunes gens, les enfants qui ne s'y résignent pas, qui ne l'admettent pas, qui n'en veulent pas. La France est comme un boxeur qu'un coup terrible a terrassé. Elle gît à terre. Mais elle sait, elle sent qu'elle vit toujours d'une vie profonde et forte. Elle sait, elle sent que l'affaire n'est pas finie, que la cause n'est pas entendue. Elle sait, elle sent qu'elle vaut beaucoup mieux que la servitude acceptée par le gouvernement de Bordeaux. Elle sait, elle sent que dans son empire, des forces puissantes de résistance sont debout pour sauver l'honneur. Déjà, en beaucoup de points des terres françaises d'outremer s'est affirmée la volonté de poursuivre la guerre. La France sait et sent que ses alliés sont plus résolus que jamais à combattre et à vaincre. Elle perçoit, dans le Nouveau Monde, mille forces immenses matérielles et morales qui, peut-être, se lèveront un jour pour écraser les ennemis de la liberté. Il faut qu'il y ait un soleil. Il faut qu'il y ait une espérance. Il faut que, quelque part, brille et brûle la flamme de la Résistance française. Officiers français, soldats français, marins français, aviateurs français, ingénieurs, ouvriers français, où que vous soyez, empressez-vous de rejoindre ceux qui veulent combattre encore. Un jour, je vous le promets, nous serons ensemble, l'armée française d'élite, l'armée mécanique, terrestre, navale, aérienne qui, en union avec nos alliés, rendra la liberté au monde et la grandeur à la patrie.