Discours devant le Sénat

15 juillet 1959
03m 12s
Réf. 00333

Notice

Résumé :

Le général de Gaulle préside au Palais du Luxembourg la première session du Sénat de la Communauté, qui réunit des membres des Parlements des 11 républiques de l'Afrique francophone et de la république malgache.

Type de média :
Date de diffusion :
15 juillet 1959
Type de parole :

Éclairage

Le 21 décembre 1958, le général de Gaulle a été élu tout à la fois président de la République française et président de la Communauté qui réunit autour de la métropole les 11 républiques de l'Afrique francophone (à l'exception de la Guinée, devenue indépendante en septembre 1958) et la république malgache. Conçue comme l'équivalent français du Commonwealth britannique, la Communauté possède un Conseil exécutif, rassemblant sous la présidence du Chef de l'Etat français les chefs de gouvernement des Etats membres et les ministres chargés des affaires communes (Affaires Etrangères, Armée, Finances et Affaires économiques, Justice, Education nationale, Travaux publics, Transports, Postes, Télégraphes et Téléphones). En outre un Sénat, formé de parlementaires des Etats membres possède un rôle consultatif, ayant pour mission essentielle de se prononcer sur les projets de révision du titre XII de la constitution qui instaure la communauté.

C'est donc à l'ouverture de la première session du Sénat de la Communauté, réuni au palais du Luxembourg le 15 juillet 1959 que de Gaulle prononce ce discours. Il y exalte le vaste ensemble territorial dans lequel il voit l'aboutissement de l'œuvre colonisatrice de la France qui a créé des liens affectifs profonds entre la France et l'outre-mer. Mais il insiste aussi sur les raisons politiques et économiques qui justifient la création de la Communauté : un égal attachement à la liberté, au droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, illustré par le processus démocratique du référendum, une égale aversion pour les systèmes totalitaires, la nécessité de constituer de vastes ensembles au sein desquels l'aide de la métropole en matière de recherche, de technique, d'investissement et d'éducation aurait pour contrepartie le champ d'expansion ouvert à l'activité de la France.

Serge Berstein

Transcription

Charles de Gaulle
La réunion de votre sénat marque le terme de la mise en place des institutions prévues par notre constitution. Ainsi se trouve réalisé ce que nos peuples ont décidé librement, en toute indépendance, par leur référendum du 28 septembre. Cela a été fait suivant les règles démocratiques. Un pareil aboutissement, et même le refus qui lui fut opposé par l'un des territoires de l'ancienne Union française, démontrent que nos peuples ont effectivement disposé d'eux-mêmes, qu'ils ont exercé leur choix et qu'ils l'ont fait par la seule voie qui soit valable, celle du suffrage universel. Cela étant accompli, il est vrai qu'ils y ont été conduits par la raison en même temps que par le sentiment. Aujourd'hui, le progrès est indispensable à la vie. Et il est vrai que pour un peuple qui ne dispose pas, par lui-même, de moyens puissants et variés, son développement ne peut s'accomplir qu'à l'intérieur d'un grand ensemble. Or, il se trouve que le vaste effort de recherche, de technique, d'investissement, d'enseignement exige la mise en valeur des nouveaux Etats d'outremer. La France a déjà largement commencé de l'accomplir. Elle est capable de le poursuivre. Et en ce moment même, elle fait jaillir du Sahara des ressources nouvelles de prospérité dont tireront profit tous les peuples de la communauté. En revanche, ces peuples offrent un champ d'extension élargi à son activité. Et, sans doute, le jour viendra-t-il où ces peuples, à leur tour, fourniront à l'ancienne métropole le concours de leurs capacités.