"Le Père la Défaite"

18 septembre 1941
04m 29s
Réf. 00403

Notice

Résumé :

Après six mois passés dans les territoires français libérés, ainsi qu'en Syrie et au Liban, le géneral de Gaulle prononce un discours à la radio de Londres : il affirme que la France est maintenue à terre par l'occupant et ses complices - c'est-à-dire, en France, le "Père la Défaite" installé à Vichy -, que le monde en réalité n'a pas cessé la guerre depuis 1918, et que la France peut être fière de son passé militaire.

Type de média :
Date de diffusion :
18 septembre 1941
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Éclairage

Bientôt disponible.

Transcription

Charles de Gaulle
A présent que la France leur a été livrée, l'ennemi et ses complices font tout pour la maintenir à terre. Et de répandre à satiété le refrain d'une France décadente et coupable, qui n'a qu'à se rouler dans la poussière de la servitude, suivant les objurgations du Père-la-Défaite de Vichy. Il y a là une sinistre manoeuvre à laquelle les bons Français refusent de se prêter. La guerre contre l'Allemagne a commencé en 1914, le Traité de Versailles n'avait en fait rien terminé. Il n'y a eu, de 1918 à 1936, qu'une absurde suspension d'armes au cours de laquelle l'ennemi refit ses forces d'agression. Dès mars 1936, l'attaque allemande reprenait, sur le Rhin d'abord, puis en Autriche, ensuite en Tchécoslovaquie, opérations préparatoires aux batailles de Pologne, de Belgique et de France, lesquelles n'étaient que des préliminaires à l'offensive vers la Russie, en attendant le suprême effort contre les Anglo-Saxons. En réalité, le monde fait la guerre de trente ans : pour ou contre la domination universelle du germanisme. Eh bien, dans cette immense épreuve, le rôle passé, présent et futur de la France n'a rien qui puisse l'humilier. Bien au contraire, et je le dis fièrement aux Français et aux étrangers, pour le passé, nous n'avons qu'à dire « La Marne, Foch, Clemenceau», cela suffit ! La cause est entendue. Pour le présent, s'il est évident que nous nous sommes laissés surprendre, d'abord par une force mécanique foudroyante, ensuite par une colossale entreprise de trahison, il n'est pas moins évident que la France, toute la France, se redresse dans la résistance, en attendant qu'elle le fasse dans la vengeance organisée. A l'heure qu'il est, l'ennemi et les traîtres de Vichy sont en lutte ouverte contre le peuple français. Pour parvenir à lui imposer leurs exigences, il leur faut employer le plus atroce système d'oppression que le pays ait jamais connu dans son Histoire. Mais leur censure de terreur, leurs mensonges de propagande, leur justice rendue dans les caves, les bâillons qu'ils enfoncent dans les bouches, les chaînes qu'ils lient autour des bras, les bâches qu'ils jettent sur les morts n'empêchent pas le monde de savoir où sont les volontés de la France. En même temps, la fraction de ses territoires, de ses armes, de sa pensée, qui a pu être déjà soustraite à l'ennemi et à ses complices, continue la guerre aux côtés des Alliés. Ah ! Quand le monde pourra mesurer quels prodiges de courage fournissent les Français qui parviennent chaque jour à rallier nos drapeaux, quand il saura quel esprit anime leurs forces et leurs organisations, quand il saura ce qu'ils ont su réaliser à tous points de vue et avec quoi ? Le monde connaîtra que la décadence française n'est qu'un ignoble argument des oppresseurs. Voilà pour le présent dans cette guerre de trente ans. Quant à l'avenir, nous en répondons ! A mesure que les peuples libres, dont, depuis 1914, la France fut l'avant-garde, parviendront à l'affranchir, nous répondons que son effort guerrier ne cessera pas de grandir jusqu'à devenir, sans doute, décisif. Et quand les démocraties devront refaire le monde sur les bases sacrées de la liberté humaine, de la souveraineté des peuples et de la coopération des nations, alors on pourra voir aussi ce qu'est et ce que vaut la France. Français, nous avons, autant que personne, droit à la fierté nationale. La France, avec nous !