Irène Papas
Oui.
Moi, je pense, comme ça, je ne dis pas pour aucune autre
mais moi, je veux être directe et vraie quand je joue.
Et avoir la nécessité pour dire le mot, autrement, je ne le dis pas.
Quand je prends un rôle, par exemple, cet été, j'ai fait Cléopâtre, j'ai pris toutes les biographies que je peux avoir.
Je lis un peu d'histoire partout.
Et j'ai pensé :
Il faut choisir tous les moments qu'est-ce qu'elle pense ?
Pourquoi elle dit ça ?
Et qu'est-ce qu'est la relation qu'elle a avec cet homme-là qu'elle a devant elle ?
Et qu'est-ce qu'est le moment ?
Quel temps il fait ? Il fait chaud ? Il fait froid ?
Par exemple, pour mes vêtements que j'ai eus pour Cléopâtre.
Des vêtements blancs parce qu'il fait chaud en Egypte.
Et alors, ce que je voulais, c'est de l'organza parce qu'il reste, il reste comme ça.
Et alors, ça, c'est tout, parce que ça m'aide de savoir que c'est blanc, qu'il fait chaud et tout ça.
Et alors, ça, c'est mon travail sur les choses que je fais.
Et aussi, quand tu décides comment est le personnage que tu fais.
Moi, j'ai une autre idée pour Cléopâtre par exemple, et cette interprétation-là, je la fais.
Tout le monde pense que, par exemple, Cléopâtre est une femme qui fait comme ça.
Qu'elle est coquette.
Je ne trouve pas.
Elle était la plus riche à ce moment-là, et elle était la plus cultivée parce qu'il y avait...
derrière d'elle, il y avait une grande librairie, la plus grande du monde à cette époque-là.
Et qui était Jules César ?
Un commandant qui savait deux langues : grec et latin.
Elle savait 15 langues.
Alors, je crois que c'est peut-être vous qui faites de la coquetterie. Elle, elle était la plus riche.
Elle n'était pas...
Journaliste
Elle était riche, intelligente, cultivée.
Irène Papas
Reine, elle avait toute l'Egypte, elle avait tout l'or d'Egypte, elle avait tous les techniciens, tout...
Journaliste
C'est lui qui a fait...
Irène Papas
Et aussi Antoine.
Même maintenant, au XXe siècle, je pense que la femme,
c'est toujours la secrétaire qui veut gagner son...
comment ça s'appelle... chef ?
Journaliste
Son patron.
Irène Papas
Son patron.
Alors on pense comme ça.
Mais non !
Elle ne fait rien.
On fait ça.
Il faut avoir aussi l'intelligence de savoir où mettre le geste juste, où mettre l'accent dans chaque scène.
Faire tout ce travail de graduation...
Et puis, il faut maîtriser toutes les techniques, la voix, la prononciation, tout, tout, tout.
Parce qu'il faut pas « obstaculer » ?
Journaliste
Oui, mettre des obstacles.
Irène Papas
Pour toucher l'âme des gens.
C'est ça, c'est très difficile pour moi qui suis étrangère,
de jouer avec la langue quand c'est du français, de l'anglais ou de l'italien.
Je fais beaucoup beaucoup d'efforts. J'ai fait du théâtre en anglais et aussi en italien,
et j'ai eu des résultats extraordinaires mais j'ai travaillé 4 heures par jour le matin pour dire :
« Bonjour, Bonjour... », comme ça, 10 fois, 40 fois le même mot.
Et après, autre 40 fois, l'autre mot, et après, la phrase entière.
Journaliste
Jusqu'à ce qu'elle t'appartienne ?
Irène Papas
Oui, que je ne pense pas.
Alors quand je suis là, le texte...
Je ne pense pas.
Ça arrive naturellement, parce que tu sais, le moment où il y a un silence, qu'est-ce que tu fais ?
Il t'arrive un mot grec à dire, mais il faut que tu dises un mot italien ou un mot anglais.
Alors, il faut travailler beaucoup.
Pour aussi éliminer des choses, pour l'autre travail, le vrai travail,
il faut commencer avec beaucoup et éliminer, éliminer et garder les choses justes.
Je pense que ça, tu peux y arriver avec beaucoup beaucoup de travail.
Parce que je ne pense pas que c'est seulement l'instinct qui travaille à ce moment,
et je trouve que l'art, c'est un choix complètement spirituel et mental.
Pour moi, mais il faut arriver à le faire...
Journaliste
Comme si c'était facile ?
Irène Papas
Oui.