Helmut Berger à propos de sa carrière

29 avril 1988
04m 48s
Réf. 00149

Notice

Résumé :

Helmut Berger répond aux questions de Thierry Ardisson concernant ses débuts au cinéma avec Luchino Visconti.

Type de média :
Date de diffusion :
29 avril 1988
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Thèmes :

Éclairage

Helmut Berger, né en 1944, a quitté sa famille et l'Autriche encore adolescent pour étudier le français à Paris et voyager à Londres. C'est en Italie, après un passage à Berlin, qu'il rencontre le cinéaste Luchino Visconti. L'auteur de Rocco et ses frères (1960) et Le Guépard (1963) est au faîte de sa carrière lorsqu'il le repère et lui offre un petit rôle dans un sketch du film collectif Les Sorcières intitulé La Sorcière brûlée vive (1967).

Deux ans plus tard, il crève l'écran dans le rôle difficile de Martin von Essenbeck, chanteur travesti des Damnés, qui le révèle au public et à la presse internationale. Visconti, avec qui il vit par la suite, lui offrira deux autres rôles qui sont autant de performances : Louis II de Bavière, de sa jeunesse à son déclin et à sa paranoïa, dans Ludwig en 1972, et le fou épris de pureté de Violence et passion en 1974.

Si sa filmographie est alors florissante, le décès de Visconti en 1976 le plonge dans une grave crise personnelle, et pendant la décennie qui suit, il devient plus célèbre pour ses excès d'alcool et de drogue que pour ses rôles ; il s'en expliquera et éclairera sa relation avec Luchino Visconti dans son autobiographie parue en 1998, Ich.

Charlotte Garson

Transcription

Thierry Ardisson
On ne sait pas beaucoup de choses de toi finalement.
Helmut Berger
Ah non ?
Thierry Ardisson
Non.
Helmut Berger
Pourquoi ?
Thierry Ardisson
On ne sait même pas si ton nom c'est Berger ou Steinberger ou...
Helmut Berger
Mon vrai nom, c'est Steinberger.
Thierry Ardisson
Oui ?
Helmut Berger
C'est autrichien.
Thierry Ardisson
Oui. Qu'est-ce que tu as fait avant ? On dit que tu as fait une école d'art dramatique à Londres, on dit que...
Helmut Berger
Non, mes parents sont des hôteliers. J'ai fait une école hôtelière.
Thierry Ardisson
Oui.
Helmut Berger
Après, je suis allé à Londres pour l'école dramatique. Je n'y suis jamais allé parce que je...
Thierry Ardisson
Tu n'es pas allé à l'école ?
Helmut Berger
Non, jamais. Parce que j'ai dormi le vingtième jour.
Thierry Ardisson
Oui.
Helmut Berger
Mais quand même, j'ai pris des leçons privées. Et puis après, bon, je suis allé à Rome, j'ai fait des essais, des tests pour les petits rôles, comme tout le monde quand on a commencé comme extra.
Thierry Ardisson
Et ton premier grand film c'était quoi ?
Helmut Berger
C'est Les Damnés.
Thierry Ardisson
Tu as commencé directement avec Les Damnés ?
Helmut Berger
Non, j'ai fait un petit rôle, dans Les Sorcières. C'est un sketch. C'est Visconti, Pasolini et Fellini qui l'a fait...
Thierry Ardisson
Oui, il y a une cassette qui vient de sortir des Damnés là. Tout le monde l'achète en ce moment en France.
Helmut Berger
Ah bon ?
Thierry Ardisson
Oui, parce que ça sort en cassette. Tu l'as rencontré comment Visconti ?
Helmut Berger
Je l'ai rencontré parce que j'ai étudié l'italien à l'Université des Etrangers à Pérouse. Et là j'ai visité la Toscane, tout ça. Bon, je suis arrivé à Volterra où il tournait un film. Bon, j'étais là à regarder, j'étais fasciné. Comme je jouais du cinéma, j'étais fasciné, je voulais voir comment on tournait un film. J'ai connu la... c'était Vaghe stelle dell'Orsa avec Jean Sorel et Claudia Cardinale. En Français, ça s'appelait Sandra. Voilà.
Thierry Ardisson
Ça s'est passé comment ?
Helmut Berger
Ça s'est passé comment ?
Thierry Ardisson
Votre rencontre.
Helmut Berger
Très simple parce qu'un copain à moi, il est Napolitain, et Visconti, il a une maison à Ischia. Ce sont des amis. Bon, mon copain à moi m'a présenté : « Lui, c'est Visconti ». Il m'a dit qu'il est en pleine de préparation du film sur un écrivain autrichien, Musil, le jeune Törless. Ensuite lui, il est venu à Rome pour faire un test.
Thierry Ardisson
Tu y es allé ?
Helmut Berger
J'y suis allé, mais le film je ne l'ai jamais fait parce que c'est Volker Schlöndorff qui l'a fait. Mais après, il a cherché des sujets. Il voulait faire la Magic Moutain, la Montagne Magique de Thomas Mann et c'est pas - comment dire - allé dans le port. Il le souhaitait aussi. Bon, après, il a écrit Les Damnés.
Thierry Ardisson
Il l'a écrit en pensant à toi ?
Helmut Berger
Non, parce que j'étais... ils sont très bons en ce qui... Et j'ai connu M. Krupp, Arndt von Bohlen und Halbach. Et j'ai rencontré ces personnages qui sont fascinants. J'ai présenté Arndt à M. Visconti. Après, il a pris l'idée à ces messieurs-là. Il écrit... Toute l'histoire, c'est entre Thyssen et Krupp.
Thierry Ardisson
Il a écrit cette histoire un peu pour toi finalement ?
Helmut Berger
Oui
Thierry Ardisson
C'était comment votre relation dans le travail ? Ça se passait comment ?
Helmut Berger
Tu sais, c'est très difficile à dire parce que c'était mon premier film. Et je n'ai vraiment rien compris...
Thierry Ardisson
Oui.
Helmut Berger
... au cinéma.
Thierry Ardisson
Quel âge tu avais à l'époque ?
Helmut Berger
Je crois vingt ans, vingt et un, quelque chose comme ça. Et alors, je dois dire, je n'ai rien compris.
Thierry Ardisson
Tout ce qui est arrivé ?
Helmut Berger
Oui, je faisais bien, bon acteur pas bon acteur. J'étais complètement guidé par Luchino Visconti.
Thierry Ardisson
Et après, t'en as fait combien avec lui, de films ?
Helmut Berger
Après ça, attends, j'ai fait Ludwig?
Thierry Ardisson
Le crépuscule des dieux.
Helmut Berger
Ludwig de Bavière, j'ai fait Violence et Passion. Voilà, trois.
Thierry Ardisson
Trois avec lui. Tu as conscience que tu es un mythe aujourd'hui ?
Helmut Berger
Quoi ?
Thierry Ardisson
Que tu es un mythe. Tu n'as pas conscience ?
Helmut Berger
Je ne suis pas encore mort là.
Thierry Ardisson
Non, mais t'es un mythe.
Helmut Berger
Eh bien c'est gentil.