Les accords franco-tunisiens et la fête des eaux à Rangoon
Notice
Habib Bourguiba est consulté par le président du conseil Edgar Faure dans le cadre des négociations entre la France et la Tunisie. Dans la nuit du 21 au 22 avril 1955, Faure et le Premier ministre tunisien Tahar Ben Ammar signent le protocole qui doit conduire aux conventions d'autonomie interne. En marge de la conférence de Bandung, Nasser et Nehru participent à la fête des eaux à Rangoon.
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Éclairage
Le discours de Pierre Mendès France à Carthage le 31 juillet 1954 inaugure un long et délicat processus de négociations entre la France et la Tunisie. Admis à participer aux discussions en vue de l'autonomie interne, le Néo-Destour est enfin reconnu comme un acteur incontournable de la vie politique tunisienne. Habib Bourguiba, qui vit en résidence surveillée en France depuis 1954, est régulièrement sollicité et s'impose peu à peu comme le chef officieux de la délégation tunisienne. Les discussions ne sont pas interrompues par le renversement du gouvernement Mendès France. Le nouveau président du conseil Edgar Faure reçoit Bourguiba à Matignon le 18 puis le 21 avril 1955. La rencontre permet d'aplanir les dernières difficultés. Dans la nuit du 21 au 22 avril, Edgar Faure et le Premier ministre tunisien Tahar Ben Ammar signent le protocole qui doit conduire aux conventions d'autonomie interne. Si la plupart des Tunisiens voient dans cet accord une étape décisive vers l'indépendance, il n'est encore officiellement question que d'autonomie. Ainsi, le commentateur assure que le texte « sauvegard[e] les intérêts français ».
Le reportage fait surtout date car apparaît pour l'une des premières fois sur les écrans français l'homme qui incarne le Néo-Destour depuis les années 1930, Habib Bourguiba. La réception à l'hôtel de Matignon lui offre, en effet, une reconnaissance officielle. Ce dernier est qualifié par le commentateur de « leader incontesté de l'autonomisme tunisien » – un hommage empressé qui peut prêter à sourire car les Actualités françaises s'étaient, durant des années, abstenues d'évoquer même son nom. Pierre Mendès France lui-même n'avait rencontré Bourguiba qu'en secret. Le paria qui, moins d'un an auparavant, contemplait les goélands sur l'île de Groix, est devenu l'acteur central des négociations.
Néanmoins, la stratégie par étapes prônée par Bourguiba ne fait pas l'unanimité dans son camp et le qualificatif de « leader incontesté » apparaît comme une simplification journalistique. Appuyé par le Vieux-Destour, Salah Ben Youssef, secrétaire général du Néo-Destour, soutient le principe d'une indépendance totale et immédiate de l'ensemble du Maghreb et refuse l'idée de négociations séparées qu'il assimile à une trahison. Il n'hésite pas à faire connaître son désaccord durant la conférence de Bandoeng qui se déroule en parallèle aux pourparlers franco-tunisiens. Mais les débats qui agitent les nations afro-asiatiques n'intéressent manifestement guère les Actualités françaises qui ne montrent de l'événement que les images de Nasser et Nehru en costumes birmans participant joyeusement à une cérémonie bouddhiste à Rangoun, en marge de la conférence elle-même.