Le Maroc et l'indépendance de la Mauritanie

1960
02m 27s
Réf. 00171

Éclairage

La Mauritanie est peu représentée dans le journal des Actualités françaises, au contraire de la Tunisie, du Maroc et surtout de l'Algérie. Ce curieux reportage réalisé en 1960 semble avoir été produit par la société des Actualités françaises mais n'a jamais été diffusé en salle. La raison tient probablement à la thèse défendue par le journaliste, qui prend explicitement le parti du Maroc dans l'affaire mauritanienne.

Membre de la Communauté française, la Mauritanie accède à la pleine indépendance en 1960. Le Maroc, toutefois, dénonce dans le nouvel État une création artificielle, héritée directement de la colonisation française. Il prétend exercer sa souveraineté sur le territoire, se fondant sur la thèse d'un « Grand Maroc », défendue depuis 1955 par Allal El-Fassi. Une carte présente au spectateur ce Maroc historique, s'étendant « de Tanger jusqu'à Saint-Louis du Sénégal », dont seule la partie nord aurait été « libérée ». Mohammed V a repris ces revendications territoriales à son compte en 1958. Quelques chefs mauritaniens gagnent Rabat, parmi lesquels l'émir du Trarza, Fal Ould Oumeir, nommé ministre d'État en novembre 1960. Le journaliste ne manque pas de mettre en avant la présence de Mauritaniens dans les plus hautes instances de l'État marocain. Il oppose ces derniers au « pseudo gouvernement » de Moktar Ould Daddah qu'il décrit comme entièrement soumis à la France.

De fait, le reportage semble s'inscrire dans la campagne de presse initiée par le royaume pour défendre ses prétentions sur la Mauritanie. La perspective de l'indépendance mauritanienne donne lieu à une véritable offensive diplomatique tout au long de l'année 1960. Des missions « d'amitié et de bonne volonté » sont dépêchées aux quatre coins du monde pour défendre la thèse marocaine. Le livre blanc du 4 novembre 1960 expose les fondements historiques et juridiques de ces revendications. Le gouvernement chérifien n'hésite pas à porter la question mauritanienne devant l'Organisation des nations unies, sans guère de succès : la République islamique de Mauritanie est admise à l'ONU en octobre 1961.

Morgan Corriou

Transcription

(Musique)
Journaliste
La visite officielle de Sa Majesté Mohammed V dans le sud du pays ne constitue qu’un des aspects les plus récents de la souveraineté marocaine sur la Mauritanie. Ce vaste territoire d’un million de kilomètres carrés est peuplé d’un million d’habitants. Soucieuse de défendre ses propres intérêts, la France s’est empressée au lendemain de l’indépendance de constituer une République islamique de Mauritanie ; détachée de la souveraineté marocaine sous la conduite d’un pseudo-gouvernement. Les Mauritaniens, conscients du véritable intérêt de la Mauritanie, se trouvent actuellement à Rabat ou à Dakar, ne pouvant pratiquement rentrer chez eux sous peine d’être mis en état d’arrestation.
(Musique)
Journaliste
Le gouvernement leur a confié des postes importants. Monsieur Fal Ould Oumeir, émir du Trarza, a été nommé ministre d’Etat.
(Musique)
Journaliste
Une importante délégation mauritanienne ira défendre devant l’ONU la thèse marocaine.
(Musique)
Journaliste
Les missions d’amitié et de bonne volonté vont partir pour l’étranger afin d’entretenir les gouvernements des différents pays du problème mauritanien. Monsieur Allal El-Fassi, président du parti de l’Istiklal parcourra l’Asie. La délégation, présidée par Monsieur Abdelkebir El-Fassi, ambassadeur du Maroc en Allemagne fédérale, visitera tous les pays d’Afrique équatoriale et occidentale. Monsieur Balafrej, ancien président du conseil se rendra en Europe. Monsieur Abdelkhalek Torrès, ministre de la Justice se rendra en Amérique du Sud et en Amérique Centrale.
(Musique)
Journaliste
En 1905, Monsieur Mohamed Hassan Benyaich, actuellement chambellan de Sa Majesté le roi, remettait au nom du souverain du Maroc ; leur dahir de nomination au gouverneur des provinces mauritaniennes inquiété par une agression armée des troupes françaises. D’autres témoins vivants subsistent, des documents diplomatiques irréfutables ont été réunis, qui attestent la souveraineté marocaine sur les territoires sahariens. Le problème des frontières sur lequel le gouvernement de Sa Majesté n’a cessé de revenir depuis l’indépendance doit être réglé dans le sens de l’équité. La côte atlantique marocaine s’étend de Tanger à Saint-Louis de Sénégal. La Mauritanie tout entière fait partie intégrante du territoire marocain.