L'appel du général de Gaulle lors de la semaine des barricades

03 février 1960
02m 06s
Réf. 00222

Notice

Résumé :

Pendant la semaine des barricades, le général de Gaulle reprend l'initiative en paraissant en uniforme à la télévision pour réaffirmer sa volonté de s'en tenir à la politique d'autodétermination.

Date de diffusion :
03 février 1960
Date d'événement :
29 janvier 1960
Personnalité(s) :

Éclairage

Le discours de de Gaulle du 16 septembre 1959 sur l'autodétermination provoque la stupeur à Alger. Les défenseurs de l'Algérie française savaient que la majorité des musulmans choisiraient la sécession et ils n'imaginaient pas pouvoir rester en Algérie, à un contre dix, sans le soutien de la métropole. Pour les chefs militaires, le sentiment commence à poindre qu'ils ont été trahis. Le limogeage de Massu met le feu aux poudres : c'est la "semaine des barricades", qui voit le peuple algérois protester contre les "bradeurs" sur le plateau des Glières, et des activistes de l'Algérie française (Ortiz, Susini, Lagaillarde) tenter de transformer Alger en place forte de la résistance au pouvoir gaulliste.

C'est dans ce contexte que le général de Gaulle prend la parole, le 29 janvier 1960. Il réaffirme sa volonté de s'en tenir à la politique d'autodétermination, renvoyant dos à dos le FLN ("l'organisation rebelle qui prétend ne cesser le feu que si au préalable je traite par privilège avec elle de l'avenir politique de l'Algérie") et les hommes des barricades qui rejettent cette option ("certains Français de souche exigent que je renonce à l'autodétermination"). Tandis qu'il s'efforce de rassurer les pieds-noirs en affirmant la solidité des liens entre la France et l'Algérie, il rappelle en termes énergiques les militaires à leur devoir d'obéissance ("Je dis à tous les soldats français : votre mission ne comporte aucune équivoque").

Tout concourt à dramatiser l'événement que constitue l'appel du général de Gaulle. Le document montre à quel point le discours du chef de l'Etat est attendu par tous les acteurs du drame algérien (plans successifs de civils, parachutistes et militaires de tous grades écoutant la radio), le commentaire jouant même de la répétition ("Tout le monde attend de la même attente"). "Et de Gaulle parle". Le commentaire se fait solennel, l'heure est grave.

Le général paraît en uniforme sur le petit écran pour rasseoir son autorité et lever toute équivoque : "C'est moi qui porte le destin du pays". Il tient le langage de la fermeté ("Cela je ne le ferai pas"/"Je ne le ferai pas non plus"), joignant le geste à la parole pour mieux frapper les téléspectateurs. Les plans alternés montrent un public algérois écoutant gravement, suspendu aux lèvres de celui dont dépend leur destin.

Eve Bonnivard

Transcription

Commentateur
Dans la nuit d'Alger, ce soir de vendredi, tout le monde attend, aux barricades comme dans les postes de garde. Insurgés et militaires, tout le monde attend d'une même attente le discours que va prononcer le général de Gaulle. Et de Gaulle parle.
Charles (de) Gaulle
J'ai pris au nom de la France la décision que voici : les Algériens disposeront librement de leur destin. Or, deux catégories de gens ne veulent pas de ce libre choix. D'abord l'organisation rebelle qui prétend ne cesser le feu que si au préalable je traite avec elle par privilège de l'avenir politique de l'Algérie : cela, je ne le ferai pas. D'autre part, certains Français de souche exigent que je renonce à l'autodétermination, que je dise que tout est fait, que le sort des Algériens est d'ors et déjà décidé : cela non plus je ne le ferai pas. Mais alors, pour imposer à la France, à l'Etat, à moi-même leurs prétentions, certains à Alger sont entrés en insurrection ; ils ont tiré sur le service d'ordre ; ils ont tués de bons soldats ; ils se dressent en armes contre l'autorité de la France. Je dis à tous les soldats français : «Votre mission ne comporte aucune équivoque et aucune interprétation». C'est moi qui porte le destin du pays. Tous les soldats français doivent donc m'obéir.