vidéo -  Gaumont

Le départ de la "croisière noire"

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 25 oct. 1924

Le 25 octobre 1924, à Colomb-Béchar, une cérémonie militaire est organisée pour le départ de la "croisière noire". Les 8 autochenilles Citroën prennent la route à travers la Centre-Afrique, sous la caméra de Léon Poirier.

Niveaux et disciplines

Ressources pédagogiques utilisant ce média

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Gaumont
Date de diffusion du média :
25 oct. 1924
Production :
Gaumont Pathé Archives
Page publiée le :
23 juil. 2008
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001211

Contexte historique

Par Fabrice Grenard

La "croisière noire", expédition lancée par André Citroën en 1924-1925 à travers l'Afrique, s'inscrit dans un double contexte. Le premier, ce sont les progrès considérables réalisés par l'industrie automobile française depuis la Première Guerre mondiale, qui a vu la mise au point de nouveaux modèles, plus performants. A bien des égards, André Citroën apparaît depuis la fin de la guerre comme un avant-gardiste. C'est le premier à reprendre dans ses usines de Javel le principe de la chaîne tractée - qu'il avait utilisé lors de la guerre pour produire des munitions - dans le cadre de la production automobile. Cette technique lui permet d'être le premier en France à lancer une voiture de grande série, la torpédo type A de 10 CV (1919) puis la 5 CV (1922). Certains de ses modèles sont équipés de chenilles afin de s'adapter à tous les types de terrains et de reliefs (Citroën achète en 1920 le brevet du système mis au point par l'ingénieur Adolphe Kégresse). C'est également le premier à recourir aux techniques publicitaires les plus diverses afin de séduire le public et de montrer la supériorité de ses voitures sur ses concurrents.

Le second élément permettant d'expliquer l'organisation de la "croisière noire", c'est l'importance nouvelle acquise par l'Empire depuis la Première Guerre mondiale (la mobilisation de ses hommes et de ses ressources au service de la métropole a démontré toute son importance) et l'intérêt nouveau qu'il suscite auprès d'une opinion qui semblait relativement indifférente à la colonisation à la fin du XIXe siècle. L'Empire suscite désormais de nombreuses vocations, attire les entrepreneurs, les hommes d'affaires, mais aussi les géographes, les scientifiques... Le continent africain commence à intéresser de plus près André Citroën au début des années 1920. Une première expédition est organisée en décembre 1922 : la traversée du Sahara en Automobile. Son succès ouvre la porte à l'idée d'une véritable traversée de l'Afrique, Citroën souhaitant relier Colomb-Béchar (sud du Maroc) à Tananarive (Madagascar).

L'expédition demande plus d'un an de préparation. Le gouvernement français et l'armée, conscients de l'opportunité que cette expédition représente, encourage largement l'initiative. Dirigée par le directeur général de l'entreprise, Georges-Marie Haardt, assisté de l'officier méhariste Louis Audoin-Dubreuil, la "croisière noire" quitte Colomb-Béchar le 25 octobre 1924. Pendant plus d'un an, les 8 autochenilles Citroën parcourent 28 000 km à travers l'Afrique (traversant successivement l'Algérie, le Niger, le Tchad, l'Oubangui-Chari, le Congo belge, puis ralliant l'Océan indien à travers quatre itinéraires différents), suscitant un engouement inouï tant du public que des milieux scientifiques, artistiques et économiques. Afin de s'adapter aux différents types de terrains, les autochenilles Citroën ont reçu quelques perfectionnements, les distinguant des modèles fabriqués en série (système de refroidissement du moteur, six vitesses au lieu de trois, surface des chenilles plus large). Chaque voiture est dotée d'un surnom ("Scarabée d'or", la "Colombe", "Pégase"...) et est spécialisée dans un transport particulier (ravitaillement, pièces de rechanges...).

Au-delà de l'exploit technique et sportif, la "croisière noire" est également chargée de différentes missions par le ministère des Colonies, le Muséum d'Histoire naturelle, la société de géographie de France et le sous-secrétariat d'Etat à l'Aéronautique. Parmi les 17 membres de la mission se trouvent notamment le cinéaste Léon Poirier, Eugène Bergognier (ancien professeur à l'école de médecine d'Afrique occidentale), le peinte Alexandre Iacovleff. Sorti en mars 1926, le film muet de 70 mn réalisé par Léon Poirier connaît un grand succès. Sur le même modèle que la "croisière noire" est organisée en 1931 une "croisière jaune" en Asie.

Éclairage média

Par Fabrice Grenard

La présence du cinéaste Léon Poirier, filmant au jour le jour la progression de la "croisière noire" organisée par André Citroën, montre combien celle-ci s'inscrit dans le cadre d'une vaste opération destinée à séduire le public. L'expédition est d'ailleurs suivie quotidiennement par liaison TSF. Le premier objectif de l'expédition réside dans la réalisation d'une véritable prouesse technique. Les images et les commentaires insistent tout particulièrement sur les nombreux obstacles naturels auxquels doivent s'adapter les 8 autochenilles Citroën, qui progressent à travers tous les types de reliefs (traversée de fleuves et d'oued, sol pierreux, désert de sable...). A travers cette expédition, Citroën souhaite ainsi lancer un message très fort à ses principaux concurrents et démontrer aux Français l'efficacité de ses véhicules et son avance technique.

Le second objectif de l'expédition consiste à explorer des territoires largement inconnus du grand public. Le reportage de Léon Poirier montre que l'Afrique centrale apparaît comme une immense "terra incognita", à l'écart de toute civilisation. La "croisière noire" satisfait ainsi la recherche d'exotisme qui se développe en France dans l'entre-deux-guerres. Elle développe également l'idée qu'il revient à la France d'apporter le progrès et la civilisation à des territoires restant à l'écart du monde civilisé, où dominent les coutumes traditionnelles africaines. Elle permet enfin de faire découvrir au public certaines parties de l'Empire (AOF et AEF) beaucoup moins connues que les possessions d'Afrique du Nord (Algérie, Maroc, Tunisie) ou d'Asie (Indochine).

Lieux

Thèmes

Sur le même thème