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Marins abandonnés par des armateurs dans les ports français

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 30 mai 2002

Pendant 5 mois, l'équipage syrien d'un cargo naviguant sous pavillon de complaisance a été abandonné et laissé sans salaire au Tréport. L'absence de règles internationales claires empêche de trouver une issue rapide à ces situations qui se sont multipliées dans les ports français.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
30 mai 2002
Production :
INA
Page publiée le :
21 juin 2013
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001353

Contexte historique

Par Claude Robinot

La mondialisation des années 90 s'est accompagnée d'un essor du transport maritime, assuré aux 2/3 par des flottes naviguant sous des pavillons de complaisance. La législation de cette trentaine d'états dont Panama, le Libéria et les Bahamas est assez souple pour laisser naviguer des navires mal entretenus et polluants. Les autorités fiscales ferment les yeux sur les sociétés-écrans qui dissimulent le nom des armateurs et des propriétaires réels. Enfin, les équipages sont formés de marins de différentes nationalités, souvent mal payés, embarqués parfois sans contrat de travail. Cette dérèglementation sauvage permet de réduire les coûts et bénéficie aux Américains et aux Européens qui affrètent ces navires pour transporter 70 % du tonnage qu'ils commercialisent.

Cette dérèglementation a des conséquences en Europe où entre 1995 et 2000, les navires abandonnés dans les ports sont au nombre de 300 avec environ 5000 marins. En France, 35 navires étaient dans la même situation entre 1997 et 2000.

Le cas du Khalifeh One, immobilisé depuis le 14 mars 2002 au Tréport, est typique. En trois ans, ce cargo a navigué sous les couleurs du Honduras, de Sao Tomé et Principe, pour finir sous le drapeau des Iles Tonga. Une inspection a relevé plus de 57 déficiences matérielles. L'équipage syrien et libanais n'a pas perçu de salaire depuis trois mois. Le propriétaire est un anglais spécialisé dans la vente et le transport de bétail. Son navire est saisi et bloqué suite à la plainte de créanciers. Les marins sont bloqués à bord, s'ils partent ils risquent de perdre les 83 000 $ de salaires impayés. Pendant les cinq mois que dure l'affaire, ils vivent de la charité d'associations locales. Le tribunal finit par condamner le propriétaire et ordonne la saisie du cargo. C'est la revente de ce dernier qui permettra de couvrir les frais de rapatriement des marins et une avance sur salaire.

Tirant la leçon de ces situations qui ont tendance à se multiplier, le ministère des transports abonde un fonds de 305 000 €, pour permettre aux associations de parer aux situations d'urgence. A côté des Etats qui durcissent leur législation sur les pratiques des pavillons de complaisance assimilés à des paradis fiscaux, il faut souligner l'action de l'ITF (International Transport Workers Federation) : ce syndicat international des marins contribue auprès des organisations internationales à l'amélioration des législations protectrices du travail. En outre, il est assez puissant pour obtenir des armateurs 28 millions de $ en compensation des salaires non versés.

Malgré tout, le phénomène persiste : en 2012, on estime à 1500 les navires abandonnés de par le monde.

Éclairage média

Par Claude Robinot

Daniel Bilalian, présentateur du journal télévisé, annonce dans son lancement que 40 navires étrangers sont abandonnés dans les ports français, un phénomène qui prend de l'ampleur. Comme souvent dans un journal télévisé destiné au grand public, le thème général est illustré à travers un exemple : celui de marins syriens abandonnés sur un cargo retenu au Tréport. Le reportage assez complet est constitué d'images tournées sur place et d'interviews. La place la plus importante est accordée à la mobilisation des acteurs locaux en faveur de l'équipage qui reçoit une aide alimentaire et la visite d'un médecin. Les marins doivent rester à bord, car quitter le navire équivaut à perdre tout espoir de récupérer leurs salaires. Le commentaire rappelle qu'ils n'ont pas de visas qui les autorisent à séjourner en France. L'acteur majeur de ce reportage est l'ONG « Robin des Bois » qui a pris en main la défense de l'équipage en organisant, en plus de la solidarité matérielle, l'assistance juridique face au propriétaire. Il est probable que les syndicats- très impliqués dans ce combat - aient fourni une aide.

Au moment où les images sont diffusées, l'affaire du Khalifeh One est à un tournant : la saisie du navire venait d'être levée, le propriétaire pouvait théoriquement le récupérer. Grâce à un avocat mandaté par l'association Robin des Bois, le cargo est à nouveau saisi mais cette fois au profit de l'équipage. Les marins disposent désormais d'un moyen de pression pour négocier avec le propriétaire le paiement de leurs arriérés de salaires. En médiatisant le conflit, l'ONG prend une garantie supplémentaire et demande aux autorités françaises d'intervenir. Elles le feront au mois de septembre. Le reportage évoque cette éventualité et conclut, en montrant le drapeau des Iles Tonga, à la nécessité d'une législation adaptée.

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