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La cité-jardin de la Butte-Rouge, une utopie urbaine

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 07 nov. 1986

A l'occasion du programme de réhabilitation de l'ensemble de logements de la Butte-Rouge à Châtenay-Malabry, le reportage propose une promenade dans la cité-jardin. Tout un pan de l'architecture et de l'urbanisme français du XXe siècle est abordé, illustré par les témoignages d'une résidente et de l'architecte de sa réhabilitation, fils de celui de sa construction.

Niveaux et disciplines

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
07 nov. 1986
Production :
INA
Page publiée le :
26 nov. 2013
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001498

Contexte historique

Par Alexandre Boza

L'urbanisme du début du XXe siècle est marqué par le mouvement des « cités-jardins ». Il faut loger les ouvriers et les classes moyennes urbaines de plus en plus nombreuses. La ville est alors associée à tous les maux sociaux et les urbanistes recherchent un modèle urbain qui conjugue les impératifs de logement d'un grand nombre d'habitants à la recherche d'un environnement sain.

Les architectes français importent une formule née à la fin du XIXe siècle en Angleterre qui vise à résoudre l'opposition entre ville et campagne. Il s'agit de créer sur les terrains municipaux une utopie offrant tous les avantages (contact avec la nature et vie sociale animée, hauts salaires et vie bon marché, emplois et travail accessibles, hygiène, loisirs) sans leurs inconvénients (exploitation des travailleurs, taudis insalubres, concentration industrielle). Ils élaborent un modèle de lotissement à la population régulée, ponctué d'espaces verts pour la détente et ouvert sur le reste du territoire.

La destruction des murs d'enceinte dans Paris en 1919 et l'extension de la ville nourrissent la réflexion sur un nouvel urbanisme, notamment dans les arrondissements périphériques où est construit le « mur de brique » de la ceinture d'Habitations Bon Marché avec des écoles et des parcs le long des boulevards des Maréchaux.

Léon Jaussely et Roger-Henri Expert remportent le concours d'aménagement et proposent de structurer la banlieue, en réglementant les constructions par zones. La création de cités-jardins doit également beaucoup à l'action du maire socialiste de Suresnes et administrateur délégué de l'Office public d'H.B.M. de la Seine, Henri Sellier. L'idée de Sellier est de diminuer la macrocéphalie parisienne en construisant « des agglomérations propres à assurer la décongestion de Paris et de ses faubourgs [...] présentant le maximum de confort matériel et d'hygiène ». Les cités-jardins doivent aussi redonner vie aux banlieues et apporter confort à une « population laborieuse, manuelle et intellectuelle ».

En 1932 est créée la Région parisienne qui assure une continuité entre la capitale et sa périphérie ou « banlieue ». En 1934, de grandes voies de circulation sont planifiées pour structurer l'agglomération, préservant la « nature agricole et forestière » des environs de Paris. Ces aménagements mettent un terme au rêve d'autonomie de la banlieue . Vingt et une cités-jardins voient le jour selon le plan d'implantation de l'Office Public d'Habitations du Département de la Seine en 1935, dont Suresnes, Vanves, Châtenay-Malabry, Le Plessis-Robinson, Le Pré-Saint-Gervais, Gennevilliers, Drancy-La muette, Charenton, Maisons Alfort.

Ce modèle est fortement critiqué par Le Corbusier comme une fausse nature en réaction à la peur de l'urbanisation. Il s'impose pourtant dans l'entre-deux-guerre pour le logement social et après la Seconde Guerre mondiale dans les « villes nouvelles » en Angleterre, au Pays-Bas, en Allemagne et en France (Cergy-Pontoise, Marne-la-Vallée ou Saint-Quentin-en-Yvelines). Il cède ensuite la place à une politique des grands ensembles moins gourmande en espace et moins coûteuse mais retrouve une nouvelle vigueur dans le cadre de la réflexion sur la ville durable.

Éclairage média

Par Alexandre Boza

Le projet de la Butte-Rouge est porté financièrement par l'Office départemental d'HLM de la Seine. Il bénéficie de la loi Loucheur de 1928 sur le logement social qui visait à résoudre le problème du mal logement des classes populaires. Le lotissement fut réalisé en deux tranches conçues par trois architectes : Bassompierre, de Rutté et surtout Paul Sirvin. Une première tranche de 1550 logements est réalisée entre 1930 et 1940 sur le modèle de la cité-jardin et une seconde tranche de 2200 logements de 1945 à 1965. L'ensemble accueille 15 000 habitants en 1986.

La Butte-Rouge est composée exclusivement de petits immeubles collectifs identiques, de style international (symétrie, pilotis) et qui n'excèdent pas plus de quatre étages. Ils sont distribués autour du square Henri Sellier et disposent progressivement du confort moderne (vide ordure, chauffage central, salle de bain). Le site est équipé d'une piscine, d'une école, d'un collège, d'équipements sportifs et sociaux, d'une crèche, d'une maison des associations et de quelques commerces (une boucherie, un cordonnier, une pharmacie). Il y aussi des jardins familiaux afin de produire et de récolter des produits frais. Ces équipements collectifs créent du lien social et sont reliés par des allées qui dissuadent d'utiliser la voiture, rejetée vers des parkings sur l'extérieur du lotissement.

La végétation composée par le paysagiste André Riousse participe activement à la composition urbaine de la cité-jardin. Le végétal est plus qu'un décor, il organise la cité : de grands peupliers renforcent l'alignement rectiligne des immeubles tout en préservant une certaine intimité aux habitants. Diverses essences touffues (platanes, érables, tilleuls) assurent la transition entre habitations et voirie sans masquer le lotissement. Les immeubles ne sont jamais au contact direct de la chaussée mais entourés de pelouse et distants les uns des autres.

Le site est bien desservi, en bordure de la route nationale de Versailles. Il est à la fois proche de la capitale, mais enserré entre deux espaces verts, le parc de la Vallée aux Loups et la forêt domaniale de Verrières. Le terrain se présente comme une longue bande est-ouest de 1 km sur 500 m. Le site est gardé intact, les collines ne sont pas arasées et l'architecture s'y adapte. Le logement n'est pas un espace fermé. L'absence de haies ou de clôtures confère à la cité une sentiment de liberté. L'accent est mis sur l'ouverture de l'environnement à l'habitant, et des habitants entre eux, suscitant un fort attachement qu'exprime Marcelle Geoffroy, installée en 1937. La Butte-Rouge a été inscrite en 1986 au titre des monuments historiques et une réhabilitation globale a été faite de 1986 à 1995 sous la direction de Pierre Sirvin, le fils de l'architecte qui l'a réalisée.

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