Exposition Gueules de mineurs au musée de la mine à La Machine

22 mars 2008
02m 12s
Réf. 00005

Notice

Résumé :

Le Musée de la mine à La Machine consacre une exposition complète sur les "gueules noires". Une cinquantaine d'œuvres retracent la vie des mineurs de la Nièvre et du pays tout entier. Aldino Della Taffola, fils de mineur, visite l'exposition et se souvient de son père. Parmi les œuvres, la tristesse et un univers de douleur des mineurs du début du XXe siècle ressort des dessins et tableaux de Lucien Jonas. Plus tard le mineur aura figure de héros. Ces deux aspects sont représentés dans l'exposition à travers des statues, des tableaux et des affiches. Francis Dreyer, attaché de conservation parle de la solidarité de la corporation.

Date de diffusion :
22 mars 2008
Source :
Personnalité(s) :

Éclairage

La mine et les mineurs ont inspiré de nombreux artistes tels que les peintres Lucien Jonas, Maximilien Luce, Alfred Roll, Théophile Steinlein, Vincent Van Gogh, ou encore le sculpteur Constantin Meunier, pour ne parler que d'artistes français, belge, suisse ou néerlandais, parmi les plus connus. Ces œuvres dispersées, ici et là, dans des collections publiques ou privées, font très rarement l'objet d'expositions thématiques, ce qui fait tout l'intérêt de celle organisée, en 2008, à La Machine, dans le département de la Nièvre. Jusqu'en 1974, le charbon y était extrait d'une veine riche dont les prolongements constituent à quelques kilomètres de là, sous les communes de Cossaye et de Lucenay-les-Aix, une importante réserve de houille.

L'ensemble des collections peintures, sculptures, affiches... proviennent des différents musées de la région du Nord-Pas-de-Calais. On y voit en particulier différents fusains et tableaux de Lucien Jonas. Né à Anzin en 1880, il entre aux Beaux Arts de Paris, mais doit retourner s'occuper de la distillerie familiale. Il peint les gens et les ouvriers qui l'entourent, il reçoit son premier prix avec Les Consolations inspiré d'un drame de la mine. Peintre officiel du ministère des Armées et de la Marine, il continue à peindre et illustrer le pays minier et plus particulièrement les mineurs. Pour la Banque de France, il réalise un billet de 10 Francs illustré par un mineur piqueur en 1933. C'est dans cette période où il donne à son ami le publiciste Jean Mineur, le dessin d'un mineur qui représentera Jean Mineur Publicités jusque dans les années 50.

De ces œuvres de la fin du XIX° siècle et des affiches illustrant la période de la Bataille du charbon (1945-1948), fille du stakhanovisme russe des années 1930-1950, représentant des portraits de "gueules noires" ou des mineurs au travail, émanent deux types de représentations très éloignées l'une de l'autre. D'un côté, il y a la souffrance qu'exhale le mineur, tel qu'il a été mis en scène par Émile Zola dans Germinal, puis illustrée par Lucien Jonas dans certains de ses tableaux. De l'autre, il y a le houilleur présenté comme un héros, fort, soudé à sa communauté et à son équipe de travail, solidaire de ses camarades dans le travail quotidien, comme dans l'adversité. Ces deux images correspondent à deux visions opposées du monde du travail. Elles sont représentatives de deux époques différentes. Toutes deux militantes elles visent, chacune à leur façon, à défendre la cause des ouvriers. La première, celle de Zola et de ceux qui reprennent à leur compte sa façon de considérer ce milieu, montre les difficiles conditions du labeur au fond, la seconde cherche à redonner à ces "prolétaires" leur dignité perdue. La vérité se situe, sans doute, quelque part entre ces deux interprétations.

Diana Cooper-Richet

Transcription

Julie Valin
Le Musée de la Mine à la Machine dans la Nièvre consacre jusqu’au 2 novembre une exposition complète sur les gueules noires. Une cinquantaine d’œuvres qui retracent la vie des mineurs de la Nièvre et du pays tout entier. Gerald Teissier et Régis Guillon.
(Musique)
Gérald Teissier
Il avait 7 ans quand sa famille arrive à La Machine, Aldino Della Taffola verra pendant un quart de siècle son père revenir de la mine. Une vraie gueule de mineur mais aussi une gueule de bonheur pour Aldino. Après guerre, le charbon nationalisé fut synonyme d’opulence pour nombre d’ouvriers.
Aldino Della-Taffola
Nous allions quand même assez souvent les voir à la remontée du puits et bien souvent on ne les reconnaissait pas, parce qu’ils étaient noirs ; mais on en voit qui ont l’air triste là, alors que il n’y avait pas tellement de tristesse en fin de compte dans le mineur, hein !
(Musique)
Gérald Teissier
La tristesse, on la retrouve au début du siècle sous le fusain du peintre Lucien Jonas. A cette époque, la mine connaît encore Germinal et les tableaux reflètent un univers de douleur. Plus tard, la France, en plein recrutement, fera du mineur un héros. Deux époques, deux visages que tente de transmettre l’exposition machinoise.
(Musique)
Francis Dreyer
D’un côté, le mineur qui trime, qui est enfermé dans, au fond du puit, dans des conditions de travail qui sont, au début du siècle, extrêmement difficiles. Mais on a aussi cette figure importante du mineur qui réussit, qui est là, qui est fort, et qui est très soudé au sein de son propre bassin. Les mineurs forment une famille importante, il existe une solidarité et cette solidarité se retrouve à ce moment-là dans ces portraits, dans ces figures et dans ces gestes.
Gérald Teissier
Une solidarité qui mènera à la révolte puis à la résignation quand les puits fermeront. Des archives télévisées témoignent des ultimes gueules noires qui descendront au fond. A La Machine, le dernier carreau a disparu en 1974.