Le patrimoine industriel du Nord-Pas-de-Calais

11 octobre 1979
02m 37s
Réf. 00082

Notice

Résumé :

Reportage à Lille sur le colloque au sujet du patrimoine industriel du Nord - Pas-de-Calais en particulier celui des Houillères dans le Bassin minier. Des spécialistes étrangers ont présenté les résultats de leurs études. Kenneth Hudson, spécialiste anglais d'archéologie industrielle, explique que le patrimoine industriel est aussi une part importante de l'industrie touristique. Dans la deuxième journée, spécialistes et élus, dont Pierre Mauroy et Noël Josèphe président de l'Office Culturel Régional et l'Éducation Permanente (ORCEP), qui est interviewé à ce propos, s'interrogeront sur les orientations à donner dans la politique régionale. Enfin, une exposition à la mairie de Lille a été réalisée par l'Écomusée du Creusot.

Date de diffusion :
11 octobre 1979
Source :

Éclairage

Ce reportage prend une résonance particulière dans le cadre de la démarche d'inscription du Bassin minier au titre de Patrimoine mondial par l'Unesco. Il relate en effet un colloque tenu en 1979 à Lille autour de la notion, alors toute nouvelle en France, de patrimoine industriel. L'extrait s'articule autour de deux interviews entrecoupées d'images du colloque et précédées d'illustrations du paysage minier.

Les paysages présentés au début sont situés à Lens ou à proximité. Deux chevalements sont présentés : d'abord celui de la fosse n°3 du groupe de Lens, puis celui de la fosse n° 1 du groupe de Liévin, tous deux sur la commune de Liévin. Ces deux chevalements, contemporains (1922), sont aujourd'hui préservés et inscrits par l'Unesco, mais un peu isolés comme des totems mémoriaux au sein d'une vaste zone industrialo-commerciale. Les images suivantes, complétant le paysage minier, montrent les cités Saint-Pierre (ou des Provinces), attachées à la fosse n° 11 du groupe de Lens à Lens, puis l'église Saint-Pierre et le groupe scolaire Louis Pasteur dans le même quartier. Si l'église a été détruite en 1987, le groupe scolaire et la cité ouvrière environnante sont inclus dans le périmètre classé par l'Unesco depuis 2012.

Vient ensuite l'interview de Kenneth Hudson. Cet historien britannique de l'Université de Bath est un précurseur de ce que l'on appelle alors encore l'archéologie industrielle car les premiers travaux, qui ont surtout concerné l'exhumation de vestiges de la première sidérurgie du XVIIIème siècle (premiers hauts fourneaux notamment), s'apparentaient à des fouilles archéologiques. L'expression "patrimoine industriel", d'ailleurs également utilisée dans le reportage, s'est aujourd'hui largement substituée à celle "d'archéologie industrielle". Kenneth Hudson est par ailleurs le fondateur de la revue Journal of Industrial Archaeology en 1964 et de l'Association for Industrial Archaeology en 1973, toutes deux références mondiales en la matière. Son discours évoque une mise en valeur touristique du patrimoine industriel, une des premières à avoir été expérimentée au Royaume-Uni, dès les années 1970. Si le Royaume-Uni est en avance dans ce domaine, c'est parce qu'il est le berceau de la Première Révolution industrielle, et que l'industrialisation est associée à l'apogée victorienne du pays.

Suivent ensuite des images des participants au colloque (dont Pierre Mauroy, alors maire de Lille, président du Conseil Régional du Nord - Pas-de-Calais et député du Nord). Les spécialités de recherche mentionnés, l'histoire et les archives pour l'aspect mémoriel, la géographie pour l'aspect territorial et paysager, et l'architecture pour l'aspect technique, semblent un peu restrictives par rapport aux acceptions actuelles, beaucoup plus larges, du patrimoine industriel. Ses thématiques rassemblent en effet aujourd'hui bien d'autres disciplines, comme l'économie, la sociologie, l'aménagement du territoire, etc.

L'interview de Noël Josèphe, élu local alors président de l'Office Régional de la Culture et l'Éducation Permanente (ORCEP), lui permet de souligner la "nécessité de garder des traces concrètes de cette importante partie de l'histoire régionale" dans un contexte de déclin minier. En effet, si l'activité minière et la civilisation industrielle, présentées comme un "fait culturel majeur" dès le début de l'extrait, voient leur rôle économique diminuer au moment du reportage, elles restent consubstantielles de l'identité régionale.

Enfin, les dernières images du reportage présentent une exposition photographique organisée par l'équipe qui a réalisé l'Écomusée du Creusot, précurseur en matière de patrimoine industriel en France puisque créé dès 1972 au cœur du plus ancien bassin industriel français. Il s'agit ici de sensibiliser le grand public en montrant, au-delà du patrimoine seul, les possibles réutilisations des anciens bâtiments miniers et industriels.

Cette volonté de toucher le grand public semble toutefois ne pas avoir été tout de suite couronnée de succès, car les destructions ont été nombreuses durant les années 1980 et le début des années 1990, avant que les vestiges miniers soient véritablement reconnus, non seulement par les spécialistes, mais aussi par les habitants et leurs élus, comme un véritable patrimoine.

Simon Edelblutte

Transcription

Antoine Morvan
Dans la région, la civilisation industrielle est un fait culturel majeur. S’intéresser à l’architecture industrielle, ce n’est point constituer un musée avec gardiens et entrées payantes ; c’est prendre en compte, pour éviter leur disparition avec le temps, les monuments qui témoignent de la vie de travail d’une population à une époque donnée. Exemple, la vie dans le bassin minier, il y a encore quelques décades, la mine primait tout. Lorsque les Houillères, non seulement édifiaient les installations techniques mais aussi les logements des travailleurs, les écoles, les lieux de culte et cetera. A ce stade-là, l’archéologie industrielle, c’est le reflet et la mémoire d’une population au travail. Le patrimoine industriel, ce sont les monuments, mais aussi les hommes. Et c’est avec cette mémoire qu’il convient de protéger.
Kenneth Hudson
Ça fait une partie importante de l’industrie touristique parce qu’on devient un peu fatigué des cathédrales et des châteaux et des choses comme ça. Et il faut mélanger au point de vue touristique des monuments industriels aux monuments religieux et des autres choses comme ça.
Antoine Morvan
La vie est un tout, en somme ?
Kenneth Hudson
On est obligé et surtout, certainement, et nous avons trouvé que surtout les jeunes trouvent beaucoup de plaisir en visitant des choses comme ça, des monuments industriels.
Antoine Morvan
Le congrès qui s’est ouvert à Lille aujourd’hui poursuivra ses travaux demain et après-demain. Aujourd’hui, des spécialistes étrangers à la région ont présenté leurs études et leurs réalisations. Demain, élus locaux, historiens, géographes, archivistes et architectes de la région étudieront les orientations à donner à la politique régionale en matière de patrimoine industriel. Après-demain, visite sur le terrain.
Noël Josèphe
Ce colloque consacré au patrimoine industriel, à son devenir, a été voulu par l’Etablissement public régional et par le Conseil régional plus particulièrement ; en raison de l’importance considérable de la révolution, de la première révolution industrielle de notre région et de la nécessité de garder des traces concrètes de cette importante partie de notre histoire régionale.
Antoine Morvan
Pour le public lillois, une exposition est ouverte à la Mairie de Lille. Réalisée par l’équipe qui a constitué l’écomusée du Creusot, cette exposition montre les bâtiments industriels régionaux et les projets de réutilisation de ces bâtiments. Et puis, les films sur ce sujet du patrimoine industriel sont projetés au public au CRDP et à la Maison d’Education Permanente.