Les mineurs ensevelis à Pecquencourt

29 novembre 1969
02m 14s
Réf. 00146

Notice

Résumé :

A Pecquencourt les travaux se poursuivent pour sortir les quatre mineurs emmurés. Le point de la situation avec Claude Laplaud à la recette du jour. Interview d'un sauveteur très ému. M Legrand qui dirige les travaux de sauvetage déclare : "Nous avons découvert une lampe à flamme ainsi qu'un sac... nous n'avons pas encore entendu aucun signe de vie". Il reste néanmoins toujours de l'espoir de les retrouver vivants.

Date de diffusion :
29 novembre 1969
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Éclairage

Les dangers de la mine sont multiples, du coup de grisou ou de poussière à la chute dans un puits en passant par l'éboulement d'une partie des galeries d'extraction. Ce dernier cas de figure est ressenti d'autant plus durement que l'événement est bien souvent imprévisible, qu'il relève de la "catastrophe naturelle". C'est semble-t-il le cas ici à Pecquencourt (Nord), sur le site de la fosse Barrois de la Compagnie des mines d'Aniche, l'une des plus anciennement exploitées du bassin du Nord-Pas-de-Calais.

Quatre mineurs dont un "porion", cet agent de maîtrise en poste au fond, se trouvent "emmurés", coincés derrière des blocs de roche de plusieurs tonnes depuis plus de 30 heures. Si les chances effectives de les retrouver vivants sont minces, a fortiori après de délai, l'espoir est de mise : l'éboulement a pu former une caverne naturelle dont les mineurs sont certes prisonniers mais qui leur assure quelques heures, quelques jours, de répit. C'est en tout cas ce qu'espèrent les équipes de sauveteurs qui se relaient pour tenter de les dégager : chaque équipe, composée d'une dizaine de membres et associant ouvriers, ingénieur et personnel para-médical, s'emploie à déblayer les blocs qui obstruent le passage pour tenter d'accéder aux mineurs ensevelis. Dans ce contexte, les découvertes faites au cours de la progression (des lampes à flamme, une chemise, une sacoche contenant le casse-croûte du porion, appelé aussi le"briquet") sont autant de traces encourageantes sans constituer des preuves de vie pour autant. L'émotion est palpable mais elle cède la place à la solidarité qui demeure une valeur sur laquelle chacun sait pouvoir compter : tout sera tenté pour venir en aide aux malheureux mineurs.

Au bout de trois jours et un travail acharné on découvre un premier corps qui laisse peu de doutes quant au sort des trois autres qui seront découverts quelques heures plus tard.

Matthieu de Oliveira

Transcription

Claude Laplaud
Il y a maintenant plus de trente heures que nous sommes sans nouvelle des quatre emmurés de la fosse Barrois. Nous savons que les opérations de sauvetage se poursuivent avec beaucoup d’acharnement. Ici, nous sommes ce que l’on appelle dans les mines, la recette du jour. C’est ici que remontent les wagonnets de charbon ainsi que le personnel. Et nous attendons d’un moment à l’autre deux ingénieurs qui dirigent les opérations de sauvetage. Est-ce que vous avancez actuellement ?
Intervenant
C’est très dur, parce qu’il y a de gros cailloux tenus, franchement c’est dur.
Claude Laplaud
On a parlé de blocs de pierre de 4 à 5 tonnes, est-ce exact ?
Intervenant
Bien sûr que c’est exact, plus gros même.
Claude Laplaud
Vous avez l’air très ému, Monsieur. Monsieur Legrand, vous dirigez les travaux de sauvetage au fond de la fosse Barrois.
Legrand
J’ai dirigé les travaux de sauvetage ce matin.
Claude Laplaud
Combien de sauveteurs êtes-vous au fond, actuellement ?
Legrand
Par poste une équipe de huit sauveteurs assistés d’un agent de maîtrise, d’un ingénieur et d’un réanimateur du service sécurité.
Claude Laplaud
On ne sait pas actuellement à quel endroit où se trouvent les quatre emmurés ?
Legrand
Absolument pas.
Claude Laplaud
Est-ce que vous avez l’impression qu’il y a encore de l’espoir ?
Legrand
Il y a toujours de l’espoir tant qu’on n’a pas la preuve du contraire.
Claude Laplaud
Ce matin, vous avez fait des découvertes au fond.
Legrand
Oui, nous avons d’abord découvert une lampe à flamme et une chemise d’un côté, juste en face ; de l’autre côté, une autre lampe à flamme ainsi que la sacoche du porion dans laquelle se trouvait son briquet.
Claude Laplaud
Alors ces découvertes, qu’est-ce que ça signifie pour vous ?
Legrand
Pour l’instant, rien, parce que les lampes à flamme étaient accrochées au soutènement. Donc, à mon avis, elles avaient été abandonnées temporairement par leurs possesseurs.
Claude Laplaud
Vous n’avez encore entendu aucun signe de vie ?
Legrand
Aucun signe de vie.
Claude Laplaud
Est-ce que vous pensez que justement, ces grosses pierres peuvent former écran ?
Legrand
Disons que l’espoir que l’on a, c’est que ces grosses pierres aient formé une caverne à l’intérieur desquelles puissent se trouver ces ouvriers.
Claude Laplaud
Et ce qui signifie que si ces ouvriers étaient encore vivants et qu’ils frappaient, il est fort possible que vous ne puissiez entendre ces sons.
Legrand
Il est possible qu’on ne puisse pas les entendre.
Claude Laplaud
Donc, il y a toujours de l’espoir ?
Legrand
Il y a toujours de l’espoir.