Le TGV Atlantique, une décision "très personnelle" du Président Mitterrand

28 septembre 1990
02m 24s
Réf. 00186

Notice

Résumé :
À Poitiers, François Mitterrand confesse à propos du TGV Atlantique, dont on inaugure ce jour-là la branche Sud-Ouest, que sa mise en oeuvre relève d'une décision "très personnelle". Il explique la nécessité de faire des choix parmi des tracés en concurrence, et l'opportunité d'aménager la façade Ouest de la France.
Date de diffusion :
28 septembre 1990
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Éclairage

Durant les années 1970, la SNCF avait eu du mal à convaincre les pouvoirs publics d'appuyer son programme de train à grande vitesse. Dans les deux décennies qui suivent, la relation s'inverse : ce sont les pouvoirs publics qui poussent la SNCF à l’extension du réseau TGV. Conformément à l’annonce faite par le Président Mitterrand lors de l’inauguration en septembre 1981 de la ligne Sud-Est, au rapide succès commercial, la première extension se fait vers l’Atlantique. Face à l’opposition du Ministère des finances, le président a arbitré et décidé d'accorder d'importantes subventions publiques au projet. Ce dernier s'organise en deux branches. La branche de Paris à Rennes et Nantes est inaugurée par François Mitterrand en 1989. Celle vers l’Espagne par Tours et Bordeaux est inaugurée en septembre 1990, mais cette fois sans lui. En Poitou, il préfère dialoguer avec les agriculteurs, qui manifestent et bloquent même le train sur son parcours inaugural. Le Président évoque néanmoins le TGV Atlantique, confessant que cette réalisation relève d'"une décision (...) très personnelle". "Concurrence" entre les tracés, coût des travaux, calculs de rentabilité imposent nécessairement de faire des choix. Mitterrand revendique celui de la côte atlantique, trop longtemps négligée et si familière à lui, fils et petit-fils de chefs de gare installés en Charente.

D’autres décisions sont prises qui annoncent une couverture du territoire très ambitieuse. En octobre 1987, comme la réalisation d’un tunnel sous la Manche est actée, le gouvernement arrête le tracé de la ligne Nord. Elle sera inaugurée en 1993. En concertation avec les élus et les partenaires européens, des schémas directeurs sont élaborés prévoyant des extensions vers l’Est et la Méditerranée. À la satisfaction du constructeur Alsthom, de la SNCF qui a porté le projet depuis le début et qui trouve un répit face à la concurrence des autoroutes et du transport aérien, mais aussi de l'amour-propre des Français et de leurs élus, les années Mitterrand sont des années TGV. L’endettement de la SNCF, la hausse du coût des aménagements et la rentabilité douteuse des lignes réalisées et en projet conduiront par la suite à la révision d’un dispositif aux proportions inimaginables avant 1981.
Léonard Laborie

Transcription

Présentateur
Premier problème donc, le TGV, je voudrais ajouter une petite information à ce que vous disiez en matière de TGV, à ce que vous disiez tout à l’heure. C’est qu’effectivement, il y aurait une manifestation à l’heure qu’il est du côté de Saint-Benoît et des arbres seraient sur la voie ferrée, mais une autre manifestation serait en cours entre Ruffec et Angoulême. Alors évidemment, le comble, c’est que le Président de la République est venu aujourd’hui inaugurer, en quelque sorte, très officiellement le TGV, et que si ça continue, il ne va pas le voir parce qu’il va partir ou il risque de repartir, ou il est parti déjà par d’autres moyens de locomotion. Donc, première intervention du Président de la République concernant l’arrivée qu’il a ardemment souhaitée, a-t-il dit, du TGV dans cette région qui lui est si chère.
(Silence)
François Mitterrand
Ce TGV marque l’aboutissement d’une décision qui m’est très personnelle. Vous pensez bien qu’il y avait beaucoup de concurrence, il y en a toujours ! Pour les tracés même, les régions qui semblent protester contre un tracé sont très désireuses d’avoir un TGV, ils ont bien raison. Il faut simplement accorder les violons, faire que ces grands travaux ne soient pas trop nuisibles à un paysage ou à une cité à cause du bruit, à cause de tout ce qu’on voudra, cela doit absolument être examiné ; mais c’est quand même un progrès, en soi, c’est un progrès. Et il faut choisir, on ne peut pas tous les faire à la fois. On en fera beaucoup mais on ne peut pas les faire tous à la fois, c’est très onéreux. Et toutes les lignes de TGV ne sont pas, a priori, rentables, il y en a que nous ferons pour des intérêts nationaux et internationaux. Je pense en particulier aux TGV vers l’Est, vers Strasbourg, mais ça exigera une participation de l’État qui est peut-être un peu lourde, parce que la rentabilité n’est pas assurée. Celle-ci devrait l’être, mais il a fallu choisir, je ne veux pas dire devant les Français que j’ai choisi uniquement parce que, moi, je connaissais un peu le coin et que ça me faisait plaisir, ce serait ridicule ! Mais j’ai toujours pensé que la façade atlantique devait être mieux servie, et que les grandes liaisons de Paris, puisque pendant un temps, on pouvait dire, malheureusement, tout se reliait uniquement à Paris, devaient nécessairement atteindre l’Espagne par la façade atlantique, alors que c’eût été la façade méditerranéenne qui eût été privilégiée !