L'ouverture du musée mauriennais de l'aluminium

02 décembre 2007
02m 02s
Réf. 00079

Notice

Résumé :

Le tourisme industriel attire de plus en plus. A Saint Michel de Maurienne, le musée de l'aluminium, unique au monde, a ouvert ses portes en 2007. Auparavant, en 1992, des anciens employés de l'entreprise Péchiney et des passionnés fondent l'Association du musée mauriennais de l'aluminium. Ils collectent de nombreux objets afin de garder une trace de ce patrimoine. Ceux-ci sont aujourd'hui exposés au musée.

Date de diffusion :
02 décembre 2007
Source :

Éclairage

Cet extrait du journal des Alpes de 2007 évoque une forme de tourisme présentée comme en plein essor, le tourisme industriel, à travers l'inauguration du Musée Espace Alu, situé à Saint Michel de Maurienne (Savoie), « premier musée entièrement dédié à l'aluminium ». La vallée de la Maurienne a été un des premiers et des principaux sites de production d'aluminium en Europe, jusqu'à six usines d'électrolyse (1) y ont fonctionné entre 1892 et le milieu des années 1980. Ce territoire a donc été fortement marqué économiquement par cette industrie et socialement par l'entreprise Péchiney, propriétaire des usines et initiatrice d'une politique sociale de type paternaliste comme nombre de grandes entreprises à cette période. A la date du reportage, seule l'usine de Saint Jean de Maurienne était encore en activité, sous l'égide du groupe Rio Tinto Alcan. En 2014, cette usine fonctionne toujours, reprise par le groupe allemand Trimet.

Une première interview donne la parole à Louis Françon, ancien agent de maîtrise présenté comme issu d'une lignée d'ouvriers de l'aluminium, expliquant à son fils ce que fut son travail. Son accueil du musée est ambivalent : « joie » de voir son expérience reconnue « tristesse » au souvenir de la dureté et de la dangerosité des conditions de travail. Le musée est ici présenté comme support de mémoire, de transmission et de reconnaissance.

La parole passe ensuite à Gérard Rayrolles, président de l'association du musée de l'aluminium en Maurienne (AMMA) qui justifie l'existence du musée par la place de l'industrie de l'aluminium dans la vallée : « tout le monde a vécu ici directement ou indirectement de l'alu depuis un siècle ». Cette affirmation, si elle masque l'existence d'autres industries et d'activités non industrielles, agricoles et touristiques notamment, articulées dans des systèmes pluriactifs, illustre néanmoins l'ampleur des mutations économiques et sociales induites par cette activité et par l'entreprise Péchiney. Employant plus de 3000 ouvriers dans les années 1970, offrant logement, loisirs, et une forte intégration relayée par le comité d'entreprise, son impact a été considérable, et celui de sa dislocation également.

Mais si ce musée est bien le résultat d'une longue action associative pour garder trace de cette activité dans la vallée, il a aussi pour objectif de promouvoir les savoirs historiques, techniques, sociaux sur ce métal et ses applications. En effet, contrairement à ce que la première interview peut laisser croire, de même que la présentation de l'association comme regroupant des « anciens de Péchiney », le musée n'est pas centré sur le travail et les usines mais sur le métal lui-même. Installé dans un ancien presbytère dont on aperçoit quelques images (et non dans un ancien bâtiment industriel), le musée dispose d'une scénographie de qualité et d'une très belle collection d'objets en aluminium qui permet d'aborder la multiplicité de ses usages. Il répond donc aussi à des fonctions de découverte et connaissance qui inscrivent la vallée dans un contexte plus large. La conclusion du reportage relie industrie et tourisme, faisant du musée un pont « entre industrie à préserver et tourisme à développer ». Au-delà de la question du tourisme industriel, c'est celle de la cohabitation possible, et ici discrètement souhaitée, entre industrie et tourisme qui est posée.

(1) La fabrication de l'aluminium s'effectue en plusieurs étapes : extraction du minerai de bauxite, transformation de la bauxite en alumine, transformation de l'alumine en aluminium par électrolyse. Seule cette dernière étape, très consommatrice d'électricité, a été localisée en Maurienne, pour bénéficier du potentiel hydroélectrique de la vallée développé pour les usages industriels puis domestiques depuis la fin du XIXe siècle. Cette activité a été très polluante jusqu'aux années 1980, sujet qui n'est pas abordé.

Anne Dalmasso

Transcription

Sorya Khaldoun
C’est une forme de tourisme qui attire de plus en plus, le tourisme industriel. Ces musées qui proposent de découvrir l’histoire d’un pays ou d’une région à travers ses spécificités industrielles. A Saint-Michel de Maurienne, c’est bien sûr l’aluminium qui s’expose, le musée de l’aluminium, unique en son genre, vient d’ouvrir ses portes. Claudine Longhi et Serge Worreth.
Claudine Longhi
Son grand-père et son père avant lui, ont travaillé dans les usines de la vallée. Alors forcément, Louis Françon sait de quoi il parle quand il explique à son fils ce qu’a été sa vie ; et forcément, ce musée pour lui, c’est important.
Louis Françon
Ça procure de la joie, mais aussi également de la tristesse. Dans ces usines, ce n’était pas facile hein ! C’était un travail qui était assez difficile, vous voyez ? Alors, donc on en a bavé par moment. Il y avait de la poussière, il y avait des gaz, voyez, puis de la chaleur aussi. Alors l’été, c’était la chaleur, l’hiver, ben des fois, c’était le froid, parce que c’était des ateliers à quatre courants d’air aussi hein.
Claudine Longhi
L’aventure du musée, elle, a commencé en 1992. Un groupe de passionnés d’histoire et de retraités de l’usine Péchiney fondent l’association du musée mauriennais de l’aluminium et collecte des milliers d’objets, des photos et du matériel. Son but, préserver l’identité d’une vallée.
Gérard Rayrolles
Ça été une bonne partie de ma vie puisqu'il y a 40 ans que j’habite ici. En plus, tout le monde est très attaché à l’aluminium et surtout à Péchiney, à Paul Héroult et à ses descendants ; car tout le monde a vécu directement ou indirectement de l’aluminium depuis un siècle dans cette partie de la Maurienne.
Claudine Longhi
Sur 600 mètres carrés et trois étages, l’ancien presbytère de la commune arbore aujourd’hui une couleur rouge bauxite et un bardage en aluminium. La scénographie invite, de manière conviviale, ludique et interactive à la découverte des différentes propriétés du métal, son process de fabrication, les usines d’hier et d’aujourd’hui ; sans oublier ses applications dans la vie quotidienne. La municipalité a investi plus de un million d’euros dans ce projet dont elle a pressenti la portée. Unique musée au monde entièrement consacré à l’aluminium, l’espace alu est un beau trait d’union entre le passé et le futur de la vallée de la Maurienne, entre industrie à préserver et tourisme à développer.