Inondations à Noirmoutier

02 janvier 1979
03m 38s
Réf. 00215

Notice

Résumé :
Une digue s'est rompue sur l'île de Noirmoutier, provoquant une importante inondation, phénomène prévisible du fait de la conception de la digue et du manque d'entretien. Les habitants, aujourd'hui aidés par des militaires et des engins de chantier, ne sont pas surpris car personne, propriétaires ou intercommunalité, ne pouvait assumer le coût des travaux.
Date de diffusion :
02 janvier 1979
Source :

Éclairage

Au matin du 1er janvier 1979, par grand beau temps, personne dans l’île de Noirmoutier ne s’attendait à la disparition de près de 500 ha sous l’eau. Une brèche ouverte dans la digue du polder de Sébastopol, sur la côte Est de la commune de Barbâtre provoqua en effet l’inondation de toute la plaine sud de l’île, située sous le niveau de la mer. Dans la nuit vers 6 heures du matin, la pleine mer, d’un coefficient de 105, laissait déjà prévoir une cote de marée haute de + 2,30 m repère NGF sur nos cartes d’état major (soit + 5,80 m. des cartes hydrographiques). Le passage d’un dépression creusée à 980 hectopascals sur la Manche, associée à un phénomène de houle et de vent, entraîna une surcote de marée haute de près de 70 cm. Dans la nuit, la mer atteignit donc la cote de + 3,00 m.NGF.
Au-delà des cuvettes des polders, noyées suite à la rupture de la digue dans le secteur du passage du Gois, la plaine agricole subit également des dégâts importants, la mer n’ayant été stoppée dans sa course que par le tracé de la route centrale, à grande circulation. Cette partie sud de l’île de Noirmoutier est un territoire très particulier. Sa côte ouest, sur l’océan, est constituée d’un système plage-dune dont la genèse est totalement naturelle. C’est là que se sont développés les villages paysans. En revanche, sa côte est a été totalement créée par l’homme. Du polder de La Nouvelle Brille au nord jusqu’à celui de Sébastopol au sud, ces terres ont été gagnées sur la mer entre 1830 et 1865. Cette expansion du foncier agricole a été rendue possible par une loi de 1807 qui permettait à des particuliers d’obtenir la concession de vasières, afin de les endiguer et de les drainer, pour les cultiver. La loi précisait que les concessionnaires de ces terres gagnées sur la mer avaient la charge d’entretenir leurs digues. En cas de défaillance, l’Etat était en droit de réintégrer ces espaces au domaine public maritime, c’est à dire de les rendre à la mer.
Ce protocole, tout à fait acceptable au XIXe siècle, est devenu obsolète à mesure que Noirmoutier s’est urbanisé. Autant, à l’origine, les digues ne protégeaient que les productions agricoles de leurs propriétaires, autant elles sont devenues des protections indispensables à l’ensemble du territoire engagé dans une reconversion touristique et balnéaire. C’est tout le sens des réflexions des élus au lendemain de la submersion de 1979. Avec la déprise agricole, les propriétaires se sont détournés de l’entretien des digues, dont le coût était exorbitant par rapport aux revenus qu’elles protégeaient. Le Syndicat à Vocations Multiples a bien tenté de les inciter à rénover leurs digues mais c’est vers l’Etat que Jacques Houdin, conseiller général du canton, se tourne au lendemain de la submersion pour obtenir des aides indispensables. Outre le concours de l’armée et la mobilisation des habitants pour combler la brèche en urgence, l’île reçoit finalement gain de cause et sa digue en terre, parée de moellons, est réparée.
La tempête Xynthia (2010) qui a causé 29 décès en Vendée (La Faute sur mer) a reposé le problème des digues, de leur entretien et la question de leur adaptation aux effets des changements climatiques s’est aussi invitée dans les débats. Le niveau des océans s’élève régulièrement. Il est techniquement possible d’augmenter la taille des digues en conséquence. C’est néanmoins coûteux et en cas de rupture accidentelle, plus la digue est haute, plus la violence de la submersion est à craindre. L’île de Noirmoutier n’ayant pas été touchée par  Xynthia, c’est plutôt l’oubli et le sentiment que des solutions restent possible qui semble prévaloir, quand bien même l’île a connu une quarantaine de submersions depuis le XIe siècle.
Thierry Sauzeau

Transcription

Intervenant 1
On n’est pas tellement surpris, on s’y attendait depuis longtemps, parce qu’on avait toujours dit qu’un jour, nos digues pèteraient. Puisque elles n’étaient jamais entretenues, évidemment, et ce qui, depuis longtemps, on disait toujours, à l’image du vigneron qui doit mettre du bon vin dans une barrique, il faut d’abord qu’il la cercle bien. Et nous, avant de faire beaucoup de choses dans l’île, eh bien, il fallait, effectivement, la préserver, et la préserver puisque nous sommes une cuvette ici, il fallait reconsolider toutes ce digues qui sont, qui datent de plus de 100 ans.
Journaliste
Est-ce que vous aviez adressé des mises en garde aux propriétaires de ces digues ?
Intervenant 1
Absolument, nous les mettions en garde continuellement, puisque nous nous apercevions que de plus en plus, ça se détériorait.
silence
(silence)
Intervenant 2
Le problème des digues de Noirmoutier, vous le voyez en face la composition de la digue, la digue est constituée par un noyau en terre et puis une protection en moellon sur le parement extérieur. Entre les deux, il y avait une courroie d’argile qui permettait d’assurer l’étanchéité de la digue. Alors, ce qu’il y a, c’est que ces digues périssent par submersion, c’est certainement ce qui s’est produit dimanche matin, étant donné que avec une marée de 104, on avait quand même une surcote de 70 centimètres. 70 centimètres de surcote avec une marée de 104, c’est quand même assez exceptionnel. Alors, cette digue a donc péri par submersion, le problème, c’est donc de surélever la crête de la digue et lui assurer une étanchéité, une bonne étanchéité.
silence
(silence)
Intervenant 3
Le problème, il est que le Syndicat Intercommunal à Vocation Multiple, qui a vocation à faire des travaux de défense contre la mer, ne peut le faire que si le propriétaire lui demande de le faire. Mais sinon, c’est au propriétaire de faire ses propres travaux. Et le problème est également celui-ci, c’est que il n’y a pas, à l’heure actuelle, sur l’île, que les propriétaires soient des personnes individuelles ou que les propriétaires soient des associations, de syndicats de propriétaires, il n’y a personne capable de supporter la charge financière de la réfection de ces digues. Je dis personne, même pas le SIVOM.
silence
(silence)