Allocution du général de Gaulle à Quimper

02 février 1969
05m 18s
Réf. 00041

Notice

Résumé :

Le général de Gaulle prononce à Quimper un discours resté célèbre, dans lequel il évoque la régionalisation. Il annonce le référendum pour la réforme du Sénat et achève son discours en chantant la Marseillaise, accompagné par la foule.

Date de diffusion :
02 février 1969
Source :
ORTF (Collection: JT 13H )
Personnalité(s) :

Éclairage

Au début des années 1960, le Général de Gaulle émet le souhait de voir le président de la République élu au suffrage universel. Il désire assurer à son éventuel successeur la légitimité et l'accord étroit avec le peuple dont lui-même bénéficie. Pour faire passer cette idée, il multiplie les allocutions télévisés et les voyages en France. Le 28 octobre 1962, la nouvelle Constitution est acceptée : le président sera désormais élu au suffrage universel direct par tous les Français et les Françaises en âge de voter.

Réélu en 1962 pour sept ans à ce poste, le Général de Gaulle est à la tête de l'Etat lorsque éclatent les évènements de 1968. Les grèves ouvrières succèdent aux manifestations d'étudiants et, rapidement, la France est paralysée et le pouvoir du général ébranlé. A cet instant, tandis que Pompidou fait de larges concessions aux syndicats, il propose un référendum qui n'intéresse personne. Après une période de tergiversations et alors que se déroule une grande manifestation aux Champs-Élysées, il annonce à la radio la dissolution de l'Assemblée nationale. Tous ces évènements persuadent de Gaulle de ce que les Français aspirent à être à plus étroitement associés aux décisions. En fait, le chef de l'Etat est ébranlé personnellement par mai 68. La victoire gaulliste aux élections législatives de juin, suite à la dissolution, apparaît plutôt comme un sursis.

Conscient de la fragilité du résultat électoral de juin 1968 et soucieux de reprendre l'initiative, le président propose à nouveau au pays, en février 1969, un référendum. Ce dernier propose une modification du Sénat qui s'ouvrirait aux représentants des milieux économiques et sociaux et une régionalisation. Une raison plus profonde explique aussi cette initiative : les conceptions politiques du chef de l'Etat le poussent à s'assurer directement auprès des électeurs de la légitimité de son pouvoir. Il n'est alors pas surprenant de voir le Général de Gaulle commencer sa "campagne", en Bretagne où les sentiments régionalistes et gaullistes sont profonds. A Quimper, les applaudissements et l'allégresse générale en témoignent. Cependant, ni cette ambiance, ni la reprise en chœur de la Marseillaise ne sauraient annoncer le résultat du 27 avril 1969 qui est sans appel : 52 % des Français votent "non". Ce scrutin est celui de trop.

Le général s'est trouvé confronté à de multiples oppositions. Non seulement la gauche et le centre s'étaient déclarés hostiles au projet et avaient appelé à voter "non", mais, au sein même de la majorité, Valéry Giscard d'Estaing avait également préconisé le "non". L'avant-veille du scrutin, de Gaulle avait déclaré à la télévision : "Si je suis désavoué par une majorité d'entre vous, je cesserai aussitôt d'exercer mes fonctions". Le 28 avril, le général de Gaulle démissionne.

Fabien Lostec

Transcription

(Applaudissements)
Charles Gaulle (de)
L'avènement, l'avènement de la région, comme cadre nouveau, de l'initiative, du conseil et de l'action. Pour tout ce qui touche localement à la vie pratique du pays, voilà donc la grande réforme que nous devons apporter à la France. Pour que l'organe représentatif où dans chaque région seront délibérées les mesures qui la concernent, soit directement lié aux réalités. Nous devons sur la base de la participation de toutes les instances intéressées le composer, par la réunion d'élus des collectivités territoriales, conseils municipaux et conseils généraux, de déléguer des diverses catégories, économiques, sociales, universitaires et de députés à l'Assemblée nationale. Pour que cette rénovation se réalise suivant les mêmes principes au plan de la Nation comme au plan de la région, nous devons transformer le Sénat afin qu'il associe dans la préparation des lois, les mêmes sortes d'élus et les mêmes sortes de délégués, avec leur compétence et leur responsabilité. Comme cette profonde réforme concerne l'organisation de nos pouvoirs publics dans tous les domaines, y compris celui de la Constitution, nous devons soumettre le projet au peuple qui par la voie du référendum en décidera souverainement et puisqu'il s'agit d'ouvrir la voie à une espérance nouvelle, nous le ferons au Printemps.
Foule
Bravo !
Charles Gaulle (de)
En raison du passé, du présent et de l'avenir... il est de toute justice que ce soit en Bretagne que je l'annonce à la France. Vive la République !
(Applaudissements)
Charles Gaulle (de)
Vive la République ! Vive la France !
(Applaudissements)
Charles Gaulle (de)
Au long du voyage, quelques-uns uns, je l'ai entendu, nous disaient, «libérez la Bretagne», mais ils oublient que ça a été fait, il y a quelques 25 ans.
(Applaudissements)
Charles Gaulle (de)
Nous l'avons fait avec beaucoup de bons Français et d'abord avec beaucoup de Bretons. Cela étant, chantons tous ensemble l'hymne national, la Marseillaise : «Allons enfants de la Patrie, le jour de gloire est arrivé ! Contre nous de la tyrannie, l'étendard sanglant élevé, l'étendard sanglant élevé, entendez-vous dans nos campagnes mugir ces féroces soldats ? Ils viennent jusque dans vos bras, égorger nos fils et nos campagnes ! Aux armes citoyens, formez vos bataillons, marchons, marchons, qu'un sang impur, abreuve nos sillons.»
(Applaudissements)