Le laboratoire océanographique de Concarneau

16 septembre 1970
04m 40s
Réf. 00459

Notice

Résumé :

En 1856, MM. Coste et Guillou fondent à Concarneau le laboratoire de biologie marine. Ce laboratoire est le plus ancien d'Europe. Il accueille des chercheurs en océanographie, en biologie des pêches, en biochimie et en biologie cellulaire.

Date de diffusion :
16 septembre 1970
Source :

Éclairage

Chargé par Napoléon III d'améliorer les techniques de culture de l'huître, l'embryologiste Victor Coste installe son laboratoire à Concarneau, emplacement choisi pour la qualité de l'eau de sa baie. Avec l'aide d'Etienne Guillou, armateur et pilote du port de Concarneau qui s'occupe de la construction des viviers nécessaires à l'activité du laboratoire, le professeur du collège de France Victor Coste fonde le plus ancien laboratoire de biologie marine du monde en 1859. Sa création a vu le début de la recherche en embryologie marine et aquaculture marine, travaux qui ont permis de mettre au point des techniques sur l'élevage et la croissance des huîtres.

Aujourd'hui géré par le Museum d'histoire naturelle en concertation avec le Collège de France, le laboratoire mène des recherches sur l'écologie et la biodiversité marine tout en étant un centre de recherches appliquées sur les biotechnologies liées au milieu marin, dont les résultats peuvent être utilisés notamment dans la médecine ou dans le secteur agroalimentaire.

Le laboratoire, dirigé actuellement par Dominique Doumenc collabore avec de nombreux organismes scientifiques, comme le Museum d'histoire Naturelle, l'INSERM (l'Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale), le CNRS (le Centre National de la Recherche Scientifique) ou encore le Collège de France, en accueillant des scientifiques afin qu'ils puissent mener leurs recherches. La station marine participe à un enseignement de DEA à l'Université de Bretagne Occidentale et accueille des stagiaires, sur la base d'un accord avec plusieurs universités comme celles de Birmingham ou Plymouth en Grande-Bretagne.

A l'instar de l'Océanopolis de Brest, le laboratoire de Concarneau qui fête son cent cinquantième anniversaire en 2009, dispose d'un musée, le Marinarium, afin d'exposer les résultats des recherches de la station marine et de créer ainsi un lien entre les chercheurs et les scientifiques. Entièrement rénové en 2002, le Marinarium montre sur 900 m² les résultats des travaux des scientifiques. Mais plus généralement, le musée se veut aussi être un outil d'ouverture sur le monde marin, univers à la fois riche et fragile qu'il est nécessaire de protéger.

Près de 18 000 personnes visitent chaque année le Marinarium, qui présente plusieurs expositions ainsi qu'un aquarium de 120 000 litres reconstituant les fonds marin du sud-Finistère. Au-delà du grand public, les travaux du laboratoire ont aussi une portée plus concrète avec les pêcheurs. Les travaux menés permettent de faire prendre conscience aux professionnels de la mer du fragile équilibre du milieu marin, qu'il est nécessaire de ménager afin de garantir la survie de la pêche. Le laboratoire travaille d'ailleurs en collaboration avec le port et la criée de Concarneau pour récolter les organismes vivants nécessaires à ses recherches, et fournit en retour des informations aux pêcheurs.

Frédéric Martin

Transcription

Jean-Paul Ollivier
A Concarneau, les scientifiques s'adonnent à la recherche biologique sur les lieux de pêche, accompagnent les équipages des chalutiers, étudient les migrations des poissons, en laboratoire font de la biochimie et de la biologie cellulaire. Dans l'ombre, un ancêtre illustre, le professeur Coste, qui, aidé du Concarnois Etienne Guillou, fonda le centre, aujourd'hui l'un des plus anciens entre tous. Son directeur, monsieur Le Gall, en est convaincu.
Monsieur Le Gall
Je crois que c'est le plus ancien des laboratoires maritimes en Europe tout au moins et même peut-être dans le monde. Cela date de 1852-56. Et depuis, il a été appelé à deux développements successifs, un vers 1920 où on a surélevé et doublé la surface, et le dernier où on a démoli les anciens bâtiments qui s'effondraient, et refait un bâtiment entièrement neuf et capable d'accepter tout le matériel moderne du point de vue scientifique.
Jean-Paul Ollivier
Mais la société d'aujourd'hui n'est guère plus tendre pour les poètes que pour les chercheurs. Aussi, les jeunes arrivant à Concarneau se trouvent-ils sans la moindre indemnité pour la recherche compétente qu'ils veulent mener. Néanmoins, le nouveau laboratoire reçoit à tour de rôle des équipes du Collège de France. Et en matière de biochimie, les recherches réalisées doivent permettre de réunir des éléments pour l'océanographie et la médecine. Monsieur, je voudrais vous demander tout d'abord pourquoi vous avez choisi Concarneau pour effectuer ces expériences?
Scientifique
Je n'avais pas tellement le choix. Des labos comme Concarneau, il n'y en a pas beaucoup. Et comme je suis breton, ça tombe [incompris].
Jean-Paul Ollivier
Quel intérêt présente donc Concarneau pour un chercheur en général? Il y trouve tout ce qu'il désire?
Scientifique
Ca dépend du chercheur. A Concarneau, il y a une section de biochimie, recherche fondamentale en biochimie, et que ça correspond tout à fait à ce que j'ai fait jusqu'ici.
Jean-Paul Ollivier
Quels sont les chercheurs qui viennent ici?
Monsieur Le Gall
Il y a plusieurs types de chercheurs. Il y a les chercheurs permanents qui s'occupent soit de biologie des pêches ou océanographie biologique en général, et une autre équipe qui travaille plutôt dans le domaine biochimique et biologie cellulaire. Ca, c'était pour la partie permanente. Autrement, de tous temps, les chercheurs du Collège de France installés à Paris sont venus pour des stages plus ou moins longs qui atteignent pour les biochimistes trois à quatre mois en été.
Jean-Paul Ollivier
Mais Concarneau, que présente-t-il?
Monsieur Le Gall
Quelles qualités présente-t-il, si vous voulez? Alors au point de vue travail sur le terrain, Concarneau est le troisième port de pêche au point de vue importance, mais est le premier au point de vue variété. Et un autre point très important, c'est qu'en très peu de temps, en deux heures de mer, on se trouve dans des conditions qui sont celles de tout l'Atlantique, ce qui n'est pas le cas pour beaucoup d'autres laboratoires maritimes installés ailleurs en France.
Jean-Paul Ollivier
Peut-on vous demander les perspectives d'avenir du laboratoire de biologie marine de Concarneau?
Monsieur Le Gall
Oui, bien sûr. La biochimie, comme je vous ai dit, surtout du point de vue marin est appelée à un développement extraordinaire. Ca pour plusieurs raisons. Il faut connaître comment vivent, jusque dans les mécanismes les plus fins, les organismes marins. Et il y a un deuxième problème qui est, je crois, très grave : c'est les questions de pollution, et savoir quelles peuvent être leurs répercussions sur les mécanismes biochimiques de tout ce qui est déversé en mer, pas tellement du point de vue bactérien, mais surtout du point de vue industriel et pétrole. Pour le développement du laboratoire, au point de vue matériel, le Collège de France a fait un effort très grand et il n'y a pas de problème trop important. Le développement sera surtout freiné par le manque de personnel, et c'est ce qui risque de freiner beaucoup d'autres postes de recherche en France. Ca, ce n'est pas spécial à Concarneau.
Jean-Paul Ollivier
Dans le domaine de la recherche scientifique, il faudrait aboutir dit-on, afin de donner leurs chances aux étudiants, à l'attribution de contrats ni trop longs ni trop courts. A ce moment-là, le laboratoire de Concarneau remplirait pleinement son rôle pour quitter le spectre d'un Gustave Flaubert venu à la fin de sa vie, ruiné, dans ce même établissement, pour écrire l'ultime chef-d'oeuvre qui allait être son chant du cygne.