Remise d'une Francisque au Maréchal Pétain

21 août 1942
38s
Réf. 00481

Notice

Résumé :

Le Maréchal Pétain reçoit à Vichy une délégation d'ouvriers bretons qui lui remettent une francisque.

Type de média :
Date de diffusion :
21 août 1942
Source :
(Collection: France Actualités )

Éclairage

Suite à la signature de l'armistice du 22 juin 1940 et à l'occupation de plus de la moitié du territoire français par les troupes allemandes, la IIIe République est remise en question. Le 10 juillet 1940, à l'exception de sept représentants Finistériens, presque tous les parlementaires bretons présents à Vichy votent les pleins pouvoirs au maréchal Pétain et donc la fin de la IIIe République. En Bretagne, sauf exceptions ou révocations, les élites locales de droite ou de gauche se rallient majoritairement au nouveau régime. La Révolution nationale lancée par le maréchal Pétain entre 1940 et 1942 prône la reconstruction d'une société sur des valeurs autoritaires et conservatrices. Exaltant le "Travail", la "Famille", la "Patrie", le régime de Vichy tente de remodeler la société française, grâce à la propagande. Hostile au libéralisme économique, l'État français veut réorganiser les structures économiques du pays sur des assises corporatistes. Pour y parvenir, il brise les opposants potentiels (les syndicats ouvriers) à sa volonté d'encadrement et aux réformes : dès novembre 1940, la grève est interdite et les confédérations syndicales ouvrières et patronales sont dissoutes au profit de syndicats uniques, d'après la loi d'août 1942.

Cette séquence de propagande et de culte au Maréchal est diffusée par l'intermédiaire de "France actualités", société de production créée en 1942 grâce à des capitaux français et allemands. Cette coopération financière visant à soutenir l'appareil de propagande de l'Etat français illustre ainsi une collaboration de plus en plus marquée entre le régime de Vichy et les nazis. D'un point de vue technique, cette œuvre de communication politique est particulièrement bien construite et montée : le journaliste use de pédagogie et de persuasion, les différents plans sur Pétain et les symboles du régime (sept étoiles du Maréchal, francisque...) s'enchaînent astucieusement. D'un point de vue historique, la manipulation est manifeste : cette "dévotion" d'ouvriers bretons au Maréchal à l'hôtel du parc de Vichy ne correspond pas à l'état d'esprit ouvrier d'alors, dans la région. En effet, en ce mois d'août 1942, mois où les syndicats uniques sont théoriquement créés, il n'y a aucune adhésion du monde ouvrier breton à la politique économique de Vichy. Malgré la suppression des confédérations syndicales en 1940, le syndicalisme breton poursuit tout d'abord localement ses missions et sa représentation des travailleurs jusqu'en 1942. Ensuite, il ne semble pas que des syndicats ouvriers uniques aient été constitués ou s'ils l'ont été, aient eu une inaluence réelle dans la région. A l'exception de quelques cadres de la Confédération Générale du Travail ou de la Confédération Française des Travailleurs Chrétiens, les ouvriers se désintéressent de la Charte du Travail d'octobre 1941. Le patronat fait lui-même preuve d'inertie à partir de 1942. Enfin, la mise en place de la "Relève" par Laval en juin 1942 (échange d'un prisonnier français contre trois ouvriers français partis travailler en Allemagne) est de fait massivement rejetée par le monde ouvrier breton.

Malgré un accord théorique entre un régime prônant la reconstruction d'une société sur des valeurs autoritaires et conservatrices et une région bretonne politiquement modérée de droite et dominée par des forces traditionnelles, on constate dès 1941 une fissure entre l'opinion publique en Bretagne et le gouvernement de Vichy. Le "vent mauvais" dénoncé par Pétain le 12 août 1941 souffle en effet dans la région. Cette fissure se transforme rapidement en rupture à partir de 1942 : la propagande en faveur de la Révolution nationale et de la collaboration se révèle bien inefficace au regard des difficultés quotidiennes et des violences et réquisitions françaises et allemandes qui se multiplient.

Bibliographie :

Christian Bougeard, Occupation, résistance et libération en Bretagne en 30 questions, La Crèche, Geste éditions, 2005.

Henry Rousso, Le Régime de Vichy, Paris, PUF, "Que sais-je ?", 2007.

Fabien Lostec

Transcription

Commentateur
Voilà une glorification du travail que cette réception à Vichy. Nous voyons le Chef de l'Etat accueillir une délégation d'ouvriers bretons. Parmi tant d'autres, modestement, ceux-là aussi ont apporté leur part d'effort et leur peine à la reconstruction nationale, à l'unanimité française. L'unanimité française, elle était une réalité, elle est devenue une mystique le jour où le Maréchal a prononcé ces mots :
Philippe Pétain
« La France est un grand pays que l'infortune ne saurait abattre. Ensemble et d'un même choeur, crions notre amour de la patrie ! Vive la France ! »
(Musique)