Rétrospective de la Transbaie

19 juin 2005
03m 15s
Réf. 00115

Notice

Résumé :

Rétrospective de la Transbaie, créée en 1989, 15 km aller retour en Baie de Somme entre Saint-Valery et Le Crotoy. Épreuve peu commune, c'est à la fois une ambiance et la course de la boue et de la vase.

Type de média :
Date de diffusion :
19 juin 2005
Source :

Éclairage

A partir des années 1980, des dizaines de courses à pied sont organisées en France par des promoteurs indépendants, qui cherchent à se démarquer des traditionnelles épreuves sur piste organisées par la Fédération Française d'Athlétisme. La Transbaie, née en 1989 à l'initiative d'un Valéricain, Denis Courtois, que l'on aperçoit aux côtés de la journaliste au début du reportage, s'inscrit dans ce mouvement tout en présentant des caractéristiques originales par rapport aux courses sur route et autres corridas pédestres promues à travers le territoire national. Cette épreuve, qui prend la forme d'une aller-retour long de 15 km entre Saint-Valery-sur-Somme (où sont jugés le départ et l'arrivée) et le Crotoy, amène les concurrents à traverser la Baie de Somme à marée basse. Le terrain, sablonneux et vaseux, ainsi que les différents obstacles naturels (eau, buttes, fossés), confèrent à cette course une difficulté particulière. Il reste que son succès ne se dément pas depuis sa création, si l'on en juge par le nombre croissant de participants (500 pour la première édition contre près de 6500 en 2013).

Les raisons de ce succès sont multiples.

D'une part, la Transbaie est une course ouverte à tous. Il en découle une forme d'égalité entre les participants : tous sont conviés à partir ensemble (indépendamment de leur âge, de leur sexe et de leur niveau de pratique) et tous sont récompensés à l'arrivée. Cette disposition va à contre courant de l'esprit compétitif classique, où les participants concourent par catégories et où seuls les vainqueurs sont honorés. Si un classement est bien établi à l'issue de la Transbaie, si par ailleurs les objectifs des pratiquants divergent (courir pour le résultat et la performance, se confronter aux difficultés d'un parcours sélectif, profiter de la beauté des paysages, partager un moment de convivialité), la course prend pour tous la forme d'une "épopée collective" où est mis en avant l'esprit de solidarité : les amitiés nouées pendant la course et qui se prolongent parfois après celle-ci, l'entraide des participants, le partage d'un effort intense.

D'autre part, les frontières entre finalités sportives et festives sont, dans le cadre de la Transbaie, beaucoup plus floues que dans les courses traditionnelles. Les organisateurs créent en effet autour de cette manifestation une ambiance de fête : défilés costumés, spectacles musicaux, possibilité donnée aux participants de porter un déguisement. Le départ, signifié par un coup de sifflet de la locomotive du petit train de la Baie de Somme, ajoute au pittoresque de l'épreuve. Ainsi, les coureurs, par-delà le résultat sportif, trouvent la possibilité de participer à une liesse collective, où rires et bonne humeur sont continuellement mis en exergue. Tout cela témoigne en même temps de l'ambiguïté des sensations éprouvées par les concurrents, entre la joie procurée par le partage d'un moment festif et la douleur liée à la difficulté de la course (dont témoignent les personnes interrogées, à l'instar de Bernard Kouchner).

Enfin, le succès de la Transbaie est caractéristique de l'intérêt montant pour les courses de pleine nature. Les pratiques sportives connaissent en effet, dans les années 1980, un mouvement d'"écologisation" : de nombreux coureurs recherchent de nouveaux cadres d'exercice, plus libres et situés à l'extérieur des villes. Le modèle de la "course en ligne", où les pratiquants s'affrontent dans le cadre artificiel du stade, est donc concurrencé par des épreuves "non balisées" - telles la Transbaie - qui se déroulent dans un cadre naturel et confrontent les coureurs à l'incertitude du milieu. En cela, la Transbaie préfigure le développement d'une modalité de course qui va connaître un succès grandissant à partir du milieu des années 1990, la course de trail.

Sébastien Stumpp

Transcription

Karine Hallaf
Alors la Transbaie est aussi connue pour sa boue. C’est aussi connu parce que c’est dans un cadre exceptionnel. La baie de Somme a été classée au patrimoine de l’UNESCO. C’est une des plus belles baies du monde. Et puis, la Transbaie, on va voir ce que c’est avec des images des éditions précédentes. D’habitude, dans l’émission, on fait le portrait d’un sportif. Cette semaine, on a décidé de faire le portrait d’une course. Le portrait de la Transbaie, c’est tout de suite.
(Musique)
Journaliste
Qu’il pleuve ou que le soleil brille, ce dimanche-là, à Saint-Valery, l’ambiance est toujours festive, les spectateurs nombreux, des coureurs heureux.
(Bruit)
Journaliste
Tout ça pour quoi ? Tout ça pour ça : s’aligner au départ de la désormais fameuse Transbaie, une course au succès grandissant. 500 participants, la première année, en 89. Puis 1000, 2000, 4000 et maintenant plus de 6000. Des coureurs qui n’ont pas peur de marcher dans la boue. La gadoue, la gadoue !
(Bruit)
Coureuse 1
J’aime bien l’ambiance, la boue. C’est bien.
Coureur 1
On est venu avec des copains. On vient juste pour l’ambiance. Il paraît que c’est sympathique. On va voir ça. Et puis il paraît que les bains de boue, c’est très bon pour la santé.
Journaliste
Car la boue, c’est bien ce qui fait le charme de la Transbaie. Oui, oui, j’ai bien dit le charme.
Coureur 2
Tu peux m’aider à rechercher ma grole ?
Coureuse 2
Ça coûte moins cher qu’une thalasso. Ah ah !
Coureur 3
C’est génial, c'est un peu creuvant, c'est un peu dégueulasse aussi.
Coureur 4
Ça glisse. Ça monte, ça descend. Il y a de la vase, il y a de l’eau. Il y a tout pour plaire mais c’est épuisant.
Journaliste
Un aller-retour entre Saint Valéry et le Crotoy d’environ 15 kilomètres dans la boue, dans l’eau, sur le sable et sur le bitume. Un mélange des surfaces qui fait de la Transbaie une course à part.
(Musique)
Journaliste
Un mélange des gens aussi, un mélange des genres
(Musique)
(Bruit)
Serveur
Moi, je suis chef de rang aux Champs-élysées, à Paris, dans un restaurant. Alors ça me fait de bons entraînements pour les courses des garçons de café qui se passent de France. Pour le public, ils me connaissent. Ça fait 20 ans que je cours dans cette tenue.
Journaliste
Mais là, c’est collé ?
Serveur
Non, non, regardez, il n’y a rien de collé. Le tout va arriver au bout. Même le pantalon. A tout à l’heure.
Journaliste
Et qu’ils soient chevronnés ou du dimanche, tous ces coureurs sont unanimes.
Coureur 5
Merci, monsieur !
(Bruit)
Bassidi§Lahassar
Tout, c’est difficile. Toute la course est difficile parce qu’on tombe dans l’eau, il y a la boue, on glisse…. C’est magnifique mais c’est difficile.
Kouchner§Bernard
C’est un moment dur. On se demande si on ne va pas s’arrêter, et puis y en a marre et puis qu’est-ce qu’on fait là ? Et pourquoi tant d’efforts ?
Coureur 6
Ce n’est pas de la course. C’est du cross-country. Ça casse les jambes. Mais c’est bien. Il faut le faire au moins une fois, il faut tenter.
Journaliste
Après une heure de course pour les meilleurs, beaucoup plus pour les autres, c’est la douche bien méritée pour tout le monde, surtout pour les chaussures. Oh ! Que ça fait du bien !
(Bruit)