Le Centre archéologique départemental de Ribemont-sur-Ancre

28 février 2001
03m 37s
Réf. 00616

Notice

Résumé :

Reportage au centre départemental de Recherche de Ribemont-sur-Ancre, où étudiants et chercheurs travaillent sur les chantiers de les fouilles mais aussi à l'exploitation du matériel celtique et gallo-romain retrouvé sur place. Gérard Fercoq du Leslay évoque le traitement des ossements humains de 500 guerriers découverts dans un "trophée" monumental destiné à accueillir leurs dépouilles. Parallèlement le laboratoire du centre travaille sur la restauration des armes. Jean Louis Bruno du CNRS montre un exemple de fer de lance gauloise.

Type de média :
Date de diffusion :
28 février 2001
Source :

Éclairage

Le site de Ribemont-sur-Ancre, connu depuis le XIXe siècle, a été révélé par les prospections aériennes de Roger Agache à partir de 1962. Il a été fouillé successivement par Alain Ferdière (1966-1967), Jean-Louis Cadoux et Jean-Luc Massy (1968-1987) et Jean-Louis Brunaux (1990-2005). Il s'agit d'un sanctuaire protohistorique dont l'occupation se poursuit à l'époque antique pour donner naissance à une probable agglomération secondaire gallo-romaine dont seuls les bâtiments publics et quelques structures d'habitats et artisanales ont été reconnues. Inscrit sur la liste des monuments historiques en 1993, il a été classé "site archéologique d'intérêt national" en 1995.

Sources grecques et latines à l'appui, J.L. Brunaux a reconstitué un scénario qui place l'origine du site vers 260 av. n.e : c'est en effet à cette date qu'il est investi par de nouveaux arrivants, probablement les futurs Ambiani. Ces derniers livrent victorieusement bataille aux premiers habitants.

A l'ouest ou au cœur du champ de bataille, sur un méplat de la partie haute du versant, les vainqueurs auraient aménagé, sur une superficie d'au moins trois hectares, deux « monuments commémoratifs de la victoire ». Au début du troisième quart du Ier siècle av. n.è., les bâtiments du "trophée" sont détruits partiellement par le feu.

Le site est réaménagé à la suite de la conquête de la Gaule, entre 30 av. n.è. et le début de notre ère probablement par des auxiliaires gaulois de l'armée romaine.

Le Centre archéologique départemental dont il est question dans ce reportage a été créé au début des années 90, à l'initiative de Jean-Louis Brunaux et Alain Gest, député de la Somme, afin de mieux répondre aux exigences scientifiques. L'École Normale Supérieure, le Centre National de la Recherche Scientifique, le conseil général de la Somme, la Région, l'Europe et L'État, ont contribué à l'achat du terrain dans lequel se trouve le sanctuaire celtique, à l'acquisition d'une ancienne ferme sur la place du village et à la poursuite des campagnes de fouilles. L'ancienne ferme a été restaurée afin d'accueillir et d'héberger les fouilleurs, aménager des laboratoires ainsi que des espaces de stockage pour le mobilier. Devenu trop petit, le Centre archéologique est devenu en 2008 un Centre de Conservation et d'Étude dans lequel est déposé dans les normes le mobilier archéologique de Ribemont-sur-Ancre ainsi que les collections protohistoriques du département de la Somme. Instrument de développement local, il est largement ouvert au public dans une optique pédagogique. L'une des principales activités est la restauration et la stabilisation du mobilier métallique.

J.-L.Brunaux, M.Amandry, H. Duday, G. Fercoq Du Leslay, J. Leckebusch, C. Marchand, P. Méniel, B. Petit, B. Rogéré. Ribemont-sur-Ancre (Somme) : Bilan préliminaire, nouvelles hypothèses, dans Gallia, 56, 1999, Paris, 2000, p. 177-284

J.-L. Brunaux. Les temples du sanctuaire gallo-romain de Ribemont-sur-Ancre, Ed. Commios, 2009, 319 p.

T. Ben Redjeb. Carte archéologique de la Gaule. La Somme 80/2. Paris : Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 2012, p. 646-653.

Tahar Ben Redjeb

Transcription

Yolande Malgras
Picardie Première, ce soir, c’est l’archéologie qui est à l’honneur avec tout d’abord notre premier reportage. Il est consacré au centre départemental de recherche de Ribemont-sur-Ancre, dans la Somme. Un centre où travaillent chercheurs et étudiants pour les fouilles, bien entendu, mais aussi et surtout pour l’exploitation du matériel celtique et gallo-romain retrouvé sur place.
(Bruit)
Yolande Malgras
Au IIIe siècle avant Jésus Christ, une tribu celte venue d’Europe centrale investit notre région. Ce sont les Ambiens, de farouches guerriers, qui vont livrer une bataille sans merci aux autochtones, les Péri-armoricains. Un corps-à-corps meurtrier dont les macabres traces seront retrouvées bien plus tard, à l’occasion d’un chantier de fouilles. En 1982, alors que l’on pense mettre au jour les vestiges du site gallo-romain de Ribemont-sur-Ancre, les chercheurs tombent sur un véritable charnier humain.
Gérard Fercoq-du-Leslay
Nous avons les restes d’environ 500 personnes. Il faut imaginer que ce que nous pouvons trouver, nous, archéologues, ce n’est qu’un petite partie de ce qu’il y avait. C'est-à-dire qu’en fait, c’est un affrontement militaire qui a fait plus de 500 victimes. Pour cette époque-là, c’est déjà gigantesque.
Yolande Malgras
Des ennemis dont les corps décapités, (c’est une coutume, à l’époque), seront rassemblés en un seul et même lieu et disposés d’une manière bien particulière mais non encore élucidée à ce jour.
Gérard Fercoq-du-Leslay
Ce n’est pas un lieu de culte, C’est un trophée militaire qui est édifié après une grande victoire. Evidemment, il y a un aspect cultuel. Il y a toujours un aspect cultuel quelque part mais ce n’est pas un véritable lieu de culte, dans le sens où un véritable lieu de culte, eh bien, on y trouve les traces de sacrifices animaux pour les dieux, et c’est régulier. Là, on ne trouve pas du tout. On trouve simplement les restes d’hommes et d’armes, et tout nous montre que tout a été apporté en une seule fois aux alentours de 250. C'est-à-dire que ça marque un événement.
Yolande Malgras
Des restes entreposés ici, au centre de recherche départemental. Un dépôt exploité en laboratoire notamment en période hivernale, pendant la trêve des fouilles. Avec une collection unique en Europe de 5000 armes retrouvées sur le site, c’est un véritable travail de fourmi qui s’est engagé ici depuis des années.
(Bruit)
Jean-Louis Bruno
Les fers de lance de ce type-là, ils sont pratiquement tous un petit peu sur ce modèle. Ce sont des objets qui ont été fait à partir d’un lingot unique, donc une pièce de fer unique qui a été martelée pour arriver à cet objet qui est parfait et sans soudure. Donc c’est un véritable chef-d’oeuvre de la forge de l’époque gauloise.
Yolande Malgras
Un armement si bien conçu qu’il sera même copié plus tard par l’envahisseur romain très admiratif de sa mortelle efficacité.
Gérard Fercoq-du-Leslay
Voilà donc un humerus gauche. On voit, ici, quelque chose de tout à fait anormal, une espèce de saignée dans l’os avec un éclat qui a sauté. Alors la saignée dans l’os, eh bien, c’est un impact de coup de lance qui a fait… donc qui a pénétré dans l’os et qui a fait sauter un petit éclat. Alors le coup n’est pas mortel, mais le fait qu’il n’y ait pas de réossification nous monter bien que personnage n’a pas survécu à son ultime combat.
(Musique)
Yolande Malgras
Le trophée celte de Ribemont-sur-Ancre, unique en son genre, pose bien plus de questions qu’il n’apporte de réponses sur les us et coutumes de nos ancêtres les plus lointains. Des tribus celtes dont il ne reste aucune trace écrite, seulement les fragments de leur passage sur nos terres. Elles auront emporté avec elles tout leur mystère.
(Bruit)