Les vins de pays en Ardèche

08 octobre 1975
04m 58s
Réf. 00125

Notice

Résumé :

La consommation des vins en France diminue, mais à la quantité les français préfèrent la qualité. Les vins de pays sont une solution pleine de promesse et se développent notamment en Ardèche.

Date de diffusion :
08 octobre 1975
Source :
Thèmes :

Éclairage

A la fin des années 1960, les modes de consommation du vin se transforment. Les consommateurs ont tendance à privilégier la qualité sur la quantité, à boire moins pour boire mieux. Partant les systèmes de productions viti-vinicoles qu'avait fait naître la crise du phylloxéra pendant la seconde moitié du XIXe siècle sont remis en cause. Le vignoble s'était reconstitué autour de cépages hybrides, obtenus en greffant des cépages européens sur des cépages américains moins sensibles à l'insecte phylloxera vastatrix. Les cépages hybrides particulièrement répandus en Languedoc et dans le sud de la région Rhône-Alpes, et en particulier en Ardèche, faisaient la part belle à des variétés très productives mais souvent de faible qualité, des vignes « pisse-vin », où l'aramon et parfois la grenache – mais ce cépage contribue aussi à la production de vins de grande qualité quand ses rendements sont contrôlés – ont cédé le pas, au cours des années 1970, à des cépages du nord des côtes du Rhône comme la syrah, moins productive, mais donnant des vins de plus grande qualité. Sur l'ensemble du territoire français, 400 000 hectares plantés avec des hybrides furent alors arrachés.

Entre les vins de consommation courante bien adaptés aux hybrides et les vins d'appellation d'origine contrôlée, dont les critères de sélection sont souvent trop exigeants, s'établissent alors des vins délimités de qualité supérieure et des vins de pays, aux contraintes moins draconiennes. Le législateur a défini dans les décrets du 13 septembre 1968 et du 29 novembre 1973 (le seul cité dans le reportage) les conditions d'attribution de cette dénomination. Ces décrets précisent le degré naturel minimum (11°), le rendement maximal à l'hectare (100 hl), les quantités pour lesquelles est demandée la dénomination vin de pays, la vérification de l'origine géographique de la vendange, le remplacement des hybrides par vitis vinifera (vigne européenne) à laquelle un vigneron fait allusion dans le reportage...

Le début du reportage souligne l'image d'une production vinicole rationalisée et modernisée directement liée à la grande distribution qu'élaborent alors les dirigeants des organisations professionnelles et ceux des caves coopératives. Cette stratégie construite autour d'une nouvelle gamme de produits est explicitée dans un entretien. Il s'agit sans doute d'un responsable de l'Union des vignerons des coteaux de l'Ardèche, UVICA dont le siège est à Ruoms, commune où les dirigeants de la cave coopérative sont très actifs. On comprend, à écouter les viticulteurs, combien les formations mises en œuvre par les syndicats agricoles ont contribué à faire évoluer le monde agricole.

Ruoms appartient au canton de Vallon-Pont-d'Arc et le reportage souligne la stratégie globale de développement de l'Ardèche méridionale qui parie sur le tourisme : le canton de Vallon-Pont-d'Arc est au cœur du développement du canoë-kayak dans les gorges de l'Ardèche. Les vacanciers sont aussi initiés, par le biais de dégustations gratuites, aux nouveaux vins de la région avec comme objectif avoué leur fidélisation à ces vins découverts pendant les vacances. Se lisent aussi en filigrane les animations diverses qui vont progressivement prendre place pendant les mois d'été dans le sud de l'Ardèche et en particulier dans ce canton où la population estivale va beaucoup augmenter : au début du XXIe siècle, la population estivale de ce canton est dix fois supérieure à la population qui y réside le reste de l'année.

Concernant l'évolution du vignoble dans la région Rhône-Alpes, le choix qui a été fait de la qualité par la réduction des rendements explique le faible déclin de la viticulture. Cette recherche de la qualité par l'extension de cépages souvent liés à des vignobles réputés s'est depuis développée : à partir des années 1980, des vignobles ardéchois sont encépagés en chardonnay ou en viognier.

Bibliographie :

- Anthony Tchekemian, L'impact d'une politique publique agricole européenne sur les acteurs et les territoires ruraux français. Etude du programme français de développement rural dans six territoires ruraux, Thèse, Université Joseph Fourier, Grenoble, 2008.

- Maud Hirczak, La co-construction de la qualité agroalimentaire et environnementale dans les stratégies du développement territorial, une analyse à partir des produits de la région Rhône-Alpes, thèse de géographie, Université Joseph Fourier, Grenoble, 2007.

Jean-Luc Pinol

Transcription

(Musique)
Journaliste
On pense généralement que c’est le prix qui fait régresser la consommation. Or, il est prouvé que si celle-ci diminue en volume, il n'en est pas de même en valeur. Si les Français boivent moins de vin, ils compensent cette désaffection en choisissant des bouteilles de meilleure qualité.
Intervenant1
Il est exact que les vins de consommation courante sont en déclin depuis quelques années déjà, et qu’il fallait trouver pour la couche de clientèle intéressée par le vin et le Français est intéressé par le vin, un style ou une image nouvelle pour des vins qui soient abordables. Or, les Appellations d’Origine avaient atteint des prix qui les faisaient changer des catégories de vente, en quelque sorte. Et alors, c’est là où nous avons euh, jeté un regard sur les vins de pays et les VDQS, qui pour nous faisaient un ensemble plein de promesses.
Journaliste
Ainsi, entre les vins de tables ordinaires et les Appellations d’Origine Contrôlée, vient d’apparaître une catégorie nouvelle. Les vins de pays. Ils sont nés d'efforts de qualité de certains terroirs et d’un décret du 29 novembre 1973. Ils sont issus de cépages nobles implantés dans une aire déterminée. Ils doivent avoir un degré alcoolique naturel suffisant et satisfaire à des contrôles de dégustation. En Ardèche, le touriste a sans doute été le premier à découvrir Au cul de la barrique, le charme vrai, authentique de ce produit du terroir.
Intervenant 2
Nous sommes ici en train de vendanger un cépage Syrah, qui nous a, qui nous a permis d’améliorer considérablement la qualité de notre vin car nous avions auparavant du Grenache qui madérisait trop rapidement. Cela nous a permis d’obtenir un rendement, déjà qualitatif bien supérieur, et également un prix, un prix au commerce qui a été vraiment, qui nous a remonté considérablement le tarif de nos vins.
Journaliste
En 1928, la cave coopérative de [Rouon] entrait dans ses 7 000 hectolitres, une grande majorité d’hybrides. La conversion du vignoble s’échelonna sur de longues années après la guerre.
Intervenant 3
Le département de l’Ardèche qui était ce, oui qui était un encépagement d’hybrides, se reconvertit maintenant en vin différent et cela se fait assez, dans de bonnes conditions parce qu’on a tenu à ce que le matériel végétal qui était destiné à cette amélioration soit de meilleure qualité possible.
Inconnu 1
Le sceau il est plein, là.
Inconnu 2
Ouais, d’accord. Tu me le fais passer. Apporte. Je vais te le chercher.
Inconnu 1
[Inaudible]
Intervenant 4
Cet été, nous avons testé auprès des consommateurs dans l’ensemble des villages de vacances ces vins. A l’occasion de ces opérations, nous avons constaté que les consommateurs étaient très vivement intéressés par nos vins et que le goût de la Syrah leur plaisait énormément. Nous avons ainsi touché à peu près 1 100 consommateurs à l’occasion de ces dégustations que l’on offre gracieusement aux, à l’ensemble de nos vacanciers. Ça va ? C'est pas trop lourd ?
Journaliste
[Marc Oclat], c’est rentable de faire une reconversion du vignoble ?
Intervenant 5
C’est, pour le moment, ce n’est pas rentable, mais je pense, j’espère que dans l’avenir, avec le travail que nous menons avec les, les caves coopératives réunies, je pense que dans l’avenir, ça nous apportera quelque chose. Faut l’espérer toujours.
Journaliste
Vous vendez votre vin combien le litre ?
Intervenant 5
Pour le moment, c’est de l’IVCC dans notre région, alors il vaut dans les 80 centimes le litre. Et c’est qu’il nous faudrait au moins du vin, avec ce cépage noble que nous, il faudrait au moins 1 franc 20, Ou 1 franc 30 la bouteille quoi.
Intervenant 6
L’union des caves coopératives vinicoles de l’Ardèche est l’œuvre commune de 18 caves coopératives. Notre but est le lancement des vins de pays des coteaux de l’Ardèche et nous avons fait un test original cet été disons, qui a représenté 6 000 bonbonnes qui ont été vendues aux touristes. D’un autre côté, nous avons le lancement d’une bouteille de vin de pays des coteaux de l’Ardèche que nous avons élaboré avec des moyens de fortune mais nous avons des projets d’investissements, qui vont nous permettre de déboucher sur le marché.
Intervenant 7
Je suis persuadé que celui qui va acheter un vin de pays aura la satisfaction de découvrir dans ce vin tous les souvenirs de vacances qui lui prolongeront cette ambiance qu’il va trouver dans la Basse Drôme et dans la basse Ardèche, qui sont son soleil, son accueil et son accent.
Journaliste
Le vin du pays des coteaux de l’Ardèche en réfère à un dicton. Il faut boire le vin pur le matin, à midi sans eau et le soir comme le bon Dieu l’a fait. Le bel ouvrage des vignerons, sans doute à perfectionner encore donne une valeur d’exemple pour une nouvelle et souhaitable identification du vin de table.
(Musique)