L'Isle d'Abeau, une ville nouvelle
Notice
René Rossi, le chef de la mission à L'Isle d'Abeau, nous donne la définition d'une ville nouvelle. Puis, cartes à l'appui, il nous explique le choix du site de L'Isle d'Abeau et de ses grands axes de développement.
Éclairage
Dès le XIXe siècle, la croissance urbaine a effrayé plus d'un observateur. Les fortes densités urbaines, les mauvaises conditions de logement, les difficultés sanitaires et la congestion des transports sont autant de symptômes des difficultés de la vie citadine. Un théoricien britannique, Ebenezer Howard envisage alors le développement des Garden-Cities pour contenir la croissance londonienne. Dans ces nouvelles créations, toutes les fonctions urbaines existeraient : habiter, travailler, se cultiver, se divertir... En France, le terme cité-jardin ne retient pas cette complexité et certaines cités-jardins de l'entre-deux-guerres ne sont que des cités dortoirs. Au Royaume-Uni, un New Towns Act est adopté en 1946.
En France, une autre politique urbaine a été mise en place dans le cadre de l'aménagement du territoire. Neuf villes nouvelles sont planifiées entre 1965 et 1968 : cinq en région parisienne et quatre en province. Celle de l'Isle d'Abeau, à 30 km à l'est de Lyon, dans le département de l'Isère est programmée en 1968. Cette politique des villes nouvelles a pour objectif de répondre aux problèmes de logement et d'aménagement du territoire que la politique de la Reconstruction n'avait pas réussi à résoudre, pas plus d'ailleurs que les politiques mises en œuvre pour la réalisation des grands ensembles (1954-1973). Les villes nouvelles s'intègrent aux schémas régionaux d'aménagement dont le tracé relève de la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (la DATAR, créée en 1963) et des Organisations d'études et d'aménagement des aires métropolitaines (OREAM) qu'évoque René Rossi, directeur, depuis juin 1968, de la mission d'aménagement de la ville nouvelle de l'Isle d'Abeau après avoir été chargé de mission pour les Jeux Olympiques de Grenoble.
Ce polytechnicien, ancien de l'École nationale des Ponts et Chaussées est tout à fait représentatif des fonctionnaires qui eurent à mettre en œuvre la politique des villes nouvelles. Son discours est tout à la fois marqué par la méfiance vis-à-vis des grands ensembles et par la référence implicite aux théories d'Ebenezer Howard qui étaient apparues comme la solution à tous les maux de la ville avant que ne s'imposent les théories du mouvement moderne (Ebenezer Howard est mort en 1928, l'année même où se mettent en place les Congrès internationaux d'architecture moderne qui devaient déboucher sur la Charte d'Athènes et, à terme, sur les grands ensembles). Ainsi son discours lorsqu'il veut donner la définition d'une ville nouvelle commence par les éléments qui différencient une ville nouvelle des grands ensembles et il insiste ensuite sur le fait qu'une ville nouvelle doit comporter « l'ensemble des fonctions urbaines ».
Lorsque ce reportage est diffusé, en avril 1970, le projet de l'Isle d'Abeau est encore dans les limbes. A l'époque une entité de 150 000 habitants est envisagée. En 1972 est constitué l'établissement public d'aménagement de l'Isle d'Abeau et, la même année, le syndicat communautaire d'aménagement qui regroupe 21 communes ; aujourd'hui il ne reste que cinq communes dans ce qui a constitué la ville nouvelle : Four, Saint-Quentin-Fallavier, Vaulx-Milieu, Villefontaine et L'Isle-d'Abeau. Ces cinq communes rassemblaient 4000 habitants en 1968, elles en comptent plus de 40 000 en 2003. On est loin des 150 000 habitants prévus mais la ville nouvelle a aussi drainé des emplois : elle a réussi à être plus qu'une cité-dortoir et elle possède toutes les fonctions urbaines.
Bibliographie :
- Yves Chalas (dir.), 2004, La Ville nouvelle de l'Isle d'Abeau : origines, évolutions et perspectives, mai 2004, 344 p. [Rapport de Recherche pour le Ministère de l'Equipement, Programme consacré à l'histoire et à l'évaluation des villes nouvelles françaises].