1975, premier déficit : les exonérations bas salaires

28 octobre 1975
02m 34s
Réf. 00020

Notice

Résumé :

Avec le choc pétrolier de 1974, la Sécurité sociale est rentrée dans l'ère des déficits chroniques, des plans de financement et surtout dans la problématique du poids des charges sociales, avec leurs conséquences sur le chômage. D'où l'idée d'alléger le poids des charges sur les bas salaires, car c'est sur la main-d'œuvre peu qualifiée que les risques de chômage sont les plus élevés.

Date de diffusion :
28 octobre 1975
Source :
TF1 (Collection: IT1 20H )
Personnalité(s) :

Éclairage

La période des Trente Glorieuses (1945 - 1975) où la croissance de la richesse nationale évoluait au taux moyen de + 6 % par an, fut stoppée net avec le premier choc pétrolier de 1974. A ces Trente Glorieuses succèdent les « quarante piteuses » (1975 - aujourd'hui) où la croissance moyenne annuelle se situe un peu en dessous de + 2 %.

La conséquence directe de cet écroulement de la croissance est l'explosion du nombre de chômeurs. Alors qu'au début des années 1970 la France était en situation de plein emploi, avec un taux de chômage de 4 % (ce que l'on appelle le chômage frictionnel), le taux de chômage a grimpé fortement pour dépasser aujourd'hui le seuil symbolique des 10 %.

Qui dit plus de chômeurs, dit moins d'actifs, et donc moins de cotisants à la Sécurité sociale.

La Sécurité sociale a été accusée d'être responsable de cette poussée du chômage, en raison du poids des charges sociales pesant sur les salaires, et donc pénalisant l'embauche.

En 1975, par le jeu du plafond de la Sécurité sociale, le poids des charges sociales était beaucoup plus lourd sur les bas salaires que sur les hauts salaires. Or les bas salaires sont ceux qui sont le plus touchés par le chômage, car il s'agit de la population active la moins qualifiée.

Deux grandes séries de mesure, dont la mise en place s'étala pendant presque trente ans, furent alors mises en œuvre et confortées, quelle que soit la couleur politique du gouvernement, droite ou gauche.

Le premier train de mesures concerne le déplafonnement des cotisations, qui visait à demander davantage de cotisations aux hauts salaires et moins de cotisations aux bas salaires. Commencé en 1978 avec Simone Veil et achevé en 1992 avec Michel Rocard, sous quatre alternances politiques, toutes les cotisations - Maladie, Famille et Accidents du travail - furent déplafonnées.

Le second train de mesures consista à mettre en place des exonérations de cotisations. Cet allégement de charges sociales commença dès 1975 de manière ciblée avec le textile et la sidérurgie. Les exonérations ciblées relatives à un secteur d'activité furent condamnées par la réglementation européenne et progressivement abandonnées. Il y eut également des exonérations géographiques, pour telle ou telle zone particulièrement touchée par une crise économique plus grave que la moyenne nationale.

Il y eut enfin et surtout les exonérations dites « Bas salaires ». La première en date fut l'exonération des cotisations d'allocation familiale créée par Edouard Balladur en 1993. Avec le plan Juppé, on mit en place une exonération dégressive (maximum au niveau du Smic et nulle à 1,3 Smic). Martine Aubry, dans le cadre de la mise en œuvre des trente-cinq heures, poursuivit le travail d'Alain Juppé, sous quasiment la même forme. Enfin, ces dispositifs fusionnèrent en 2003 dans ce que l'on appelle aujourd'hui les « Exo bas salaire Fillon » qui sont dégressives jusqu'à 1,6 Smic.

Jean-François Chadelat

Transcription

Présentateur
Tous les Français connaissent bien sûr la Sécurité sociale parce qu’elle intervient tous les jours dans leur vie. Eh bien, la Sécurité sociale, créée en octobre 45, fête son trentième anniversaire. Et la CGT, je vous l’ai dit, a célébré l’événement à sa façon, elle a tenu meeting aujourd’hui à Paris pour mettre en échec, selon une formule entendue à la tribune, les intentions du pouvoir qui sont de remettre en cause la protection sociale des Français. Et toujours aujourd’hui, Yvon Chotard, le vice-président du CNPF a mis l’accent, lui, sur la réforme de la Sécurité sociale, conditions des progrès sociaux à venir, a-t-il dit, l’âge de la retraite, par exemple. Pour cela, il faut, a ajouté Monsieur Chotard, changer les méthodes de gestion et mieux distribuer les charges entre la Nation toute entière et les entreprises, c’est l’avis du patronat. En tous cas, vous l’avez compris, il y a des nuages pour ce trentième anniversaire de la Sécurité sociale parce que de ce côté-là aussi, il y a des ennuis financiers, François Gault.
Inconnue 1
Et vous avez repris le travail à quelle date ?
Journaliste
Pour la première fois, en 1975, la Sécurité sociale sera en déficit de 4,5 milliards de francs. Et pour 1976, l’avenir est encore plus préoccupant puisque l’on prévoit un déficit de 7 à 9 milliards de francs. Trois raisons à cela : un, l’accroissement rapide des dépenses maladie et vieillesse, pharmacie, plus 14% en un an, maladie, plus 18%, hospitalisation, plus 21%, vieillesse, plus 30%. Deux, la crise de l’emploi, depuis deux ans, elle provoque une diminution des cotisations, par conséquent, des ressources de la Sécurité sociale. Trois, les charges indues. Le Régime général de la Sécurité sociale supporte en effet des charges qui ne le concernent pas. C’est le cas, par exemple, pour les dépenses consacrées à l’équipement ou à l’enseignement hospitalier. C’est aussi le cas pour les régimes spéciaux, c’est-à-dire, pour la Sécurité sociale des agriculteurs, des commerçants, des mineurs, des cheminots, dont le Régime général supporte les différents déficits. Conséquences, il va falloir améliorer et renforcer le financement actuel de la Sécurité sociale. On peut augmenter les cotisations mais elles sont très lourdes et particulièrement pour les entreprises qui fournissent au Régime général près de 80% de ses recettes. On peut aussi assurer la prise en charge de certaines dépenses par la collectivité nationale, par l’impôt. En fait, c’est un choix difficile et il concerne tous les Français.