Les médecins déconventionnés

18 juillet 1974
02m 05s
Réf. 00088

Notice

Résumé :

Les relations entre la Sécurité sociale et le corps médical reposent sur des conventions. La première convention nationale fut signée en 1971. L'immense majorité des médecins ont adhéré à la convention. La convention suppose des droits et des devoirs. Un médecin est toujours libre de ne pas y adhérer, il est alors dit non conventionné. Les organismes de sécurité sociale peuvent sanctionner les médecins. La sanction la plus grave est le déconventionnement.

Date de diffusion :
18 juillet 1974
Source :
ORTF (Collection: JT 13H )

Éclairage

Dire que les relations entre la Sécurité sociale et le corps médical se passent dans un climat serein relève de l'euphémisme.

Ce n'est pas parce que, depuis plus de 40 ans, les syndicats médicaux signent tous les 5 ans une convention avec la Sécurité sociale que les plus de 100 000 médecins libéraux français entretiennent tous avec elle de bonnes relations.

Le problème de base réside dans l'originalité du système français, où d'une part, la médecine est libérale, avec tout ce que cela implique : liberté d'installation, liberté de prescription, liberté de choix du médecin, et d'autre part un financement socialisé remplissant toutes les conditions liées aux dépenses publiques.

Responsables d'argent public, les caisses de Sécurité sociale ont le droit et surtout le devoir, de demander au médecin, sinon des comptes, du moins des explications, lorsque le comportement des dits médecins leur paraît anormal ou déviant.

Alain Juppé en 1996, Martine Aubry en 1999, ont introduit, sans succès, des sanctions à l'égard des médecins lorsque leurs dépenses étaient telles qu'elles mettaient en péril l'Ondam (Objectif national des dépenses d'Assurance maladie).

Les sanctions que peuvent prononcer les organismes de Sécurité sociale sont juridiquement réduites. La loi HPST (voir La loi Bachelot ou loi HPST) tenta de donner davantage de pouvoirs aux directeurs des organismes mais avec peu de succès, même si les demandes d'explication ou de justification, émanant du médecin-conseil, les avertissements, les mises sous surveillance, les mises sous entente préalable constituent des possibilités. Mais tout ceci est sans commune mesure avec l'arme lourde que constitue le déconventionnement.

Dans la mesure où il existe entre les organismes et les médecins une convention médicale, ceux qui ont des comportements contraires au principe de cette convention ne peuvent y rester.

Sanction très rare et grave, le déconventionnement consiste pour les caisses à sortir un médecin du champ conventionnel. Dans ce cas, si le praticien devient libre de pratiquer les tarifs qu'il souhaite, les assurés qui le consultent sont remboursés sur la base du tarif, symbolique, d'autorité. La perte de clientèle du praticien est quasi certaine.

On observe d'ailleurs un phénomène analogue dans le domaine du médicament ou lorsqu'il est décidé de sortir une spécialité pharmaceutique du remboursement de la Sécurité sociale. Même si son prix devient libre, on constate une chute des ventes en volume qui est de l'ordre de 60 %.

Jean-François Chadelat

Transcription

Présentateur
Va-t-on vers un conflit entre la Sécurité sociale et les médecins ? La question est posée depuis que la Caisse primaire centrale d’Assurance maladie de la région parisienne a annoncé la décision prise par les trois caisses maladie en question ; de déconventionner un certain nombre de médecins. Il est reproché à ces médecins d’avoir établi des actes médicaux sans appliquer dans plus de 50 % des cas le tarif conventionnel. Un tarif qui permet, vous le savez, le remboursement par la Sécurité sociale dans les conditions que chacun connaît. Mais voyons cela maintenant d’un peu plus près.
Journaliste
Plus de 150 médecins menacés d’être dégagés de la convention nationale par la caisse primaire centrale. On leur reproche d’avoir fait payer systématiquement à leur client des prix de visite ou de consultation supérieurs au tarif conventionnel fixés actuellement à 23 francs. Seuls ont droit à des dépassements d’honoraires les médecins qui ont une notoriété accrue par leurs titres universitaires, leurs activités hospitalières ou leurs travaux de recherche. Si un médecin est dégagé de la convention, cela signifie pour lui la perte d’avantages sociaux, un régime fiscal modifié. Il ne pourra exercer que dans des quartiers aisés. Conséquence pour le malade, les frais de visite ou de consultation ne seront plus remboursés que sur un tarif autoritaire de 4 francs, au lieu des 75 % du montant de la visite. Les frais de pharmacien ou de laboratoire étant eux remboursés normalement. En province, des caisses ont pris les mêmes décisions que celles de Paris. Des lettres de mise en garde ont été adressées à plusieurs médecins. Certains d’entre eux se sont engagés à respecter désormais les tarifs de la convention. Réactions des syndicats médicaux français, certaines de ces décisions sont irrégulières. Les dossiers doivent être transmis à la commission médicosociale paritaire. De son côté, la Caisse nationale dispose d’un mois pour entériner ou non la décision de la Caisse primaire. C’est tout le problème de la convention passée entre la Sécurité sociale et les médecins qui se trouve maintenant en cause.
(Musique)