Landes, Lussagnet : le plus grand stockage de gaz naturel

26 novembre 1980
01m 45s
Réf. 00634

Notice

Résumé :

Présentation du réservoir de gaz le plus important en France. Il est situé à Lussagnet dans les Landes.

Date de diffusion :
26 novembre 1980

Éclairage

Entre Bas-Armagnac et Tursan, le nom du modeste village de Lussagnet (1) demeurerait inconnu du grand public si, à partir de 1957, le gaz naturel du gisement de Lacq, mis en exploitation la même année, n'y était pas stocké dans un aquifère (2) de 2,4 milliards de m3 de capacité.

Le stockage souterrain de gaz constitue en effet un maillon essentiel de la chaîne gazière car il faut moduler les écarts entre les approvisionnements relativement constants au cours de l'année et les besoins, variables suivant les saisons, la consommation domestique et les usages industriels.

Le gaz est injecté dans le sous-sol par un ensemble de puits d'exploitation, entre une zone de couverture étanche et un aquifère bien identifié. Selon les besoins et les paramètres météorologiques, on soutire donc, de fin octobre jusqu'aux beaux jours d'avril. Cette technique présente en effet toutes les garanties de sécurité publique et environnementale à condition, bien sûr, de ne pas perturber les utilisations multiples des eaux souterraines (thermalisme, géothermie, eaux minérales et potables ou irrigation) (3).

En cette fin d'année 1980, sept ans après le premier choc pétrolier et la fin des « Trente Glorieuses », la France cherche à augmenter son indépendance énergétique. Le développement du nucléaire civil est à son apogée mais le premier incident grave, qui se produit à Saint-Laurent-des-Eaux, dans le Loir-et-Cher (4), commence à poser le problème du « tout nucléaire ». Face à l'électricité, encore bon marché, le gaz, énergie « propre », devient concurrentiel et la demande s'accroît ; d'où l'extension du centre de stockage le plus important de France vers un second pôle, à Izaute, à quelques kilomètres de là.

Les projets évoqués ont bien été réalisés puisque, si la production de gaz de Lacq n'a cessé de décliner au cours des décennies suivantes (5), les deux sites aquitains contribuent toujours, en 2013, à alimenter les réseaux de transport et de distribution du Grand Sud-Ouest, d'une partie de l'Espagne et du reste de la France.

Symbolisant l'importance stratégique de ce lieu, le doublement du gazoduc entre Lussagnet et Captieux, en Gironde, annoncé fin 2012, confirme bien la place de ce centre qui représente encore 22% des capacités nationales de stockage souterrain de gaz naturel. Exploitant encore pour une trentaine d'années les 3 % du gisement restant, Total continuera de distribuer le gaz de Lacq aux seuls industriels de la région. D'où la mise en place de ces infrastructures, malgré le tarissement de la source en amont.

(1) Comme son homonyme béarnais (Lucenhet, XIIe s.), Lussagnet s'explique par le nom patronymique latin Lucianius, associé au suffixe diminutif -et, indiquant une occupation à haute époque.

(2) Formation géologique contenant de façon temporaire ou permanente de l'eau mobilisable, constituée de roches perméables et capable de la restituer naturellement et/ou par exploitation

(3) Avant de rejoindre le réseau de transport, le gaz soutiré subit trois opérations : la déshydratation qui consiste à extraire du gaz l'eau qui l'a saturé pendant sa période de stockage, la désulfuration qui permet d'extraire les traces d'Hydrogène sulfuré (H2S) présentes dans le gaz stocké et enfin l'odorisation par l'ajout de THT (TétraHydroThiophène) qui permet la détection olfactive du gaz par les usagers.

Après traitement, le gaz soutiré et comprimé à une pression suffisante pour être distribué dans le réseau de transport.

(4) Le 13 mars 1980, un accident conduisit à la fusion de 20 kg de dioxyde d'uranium du réacteur graphite-gaz no 2. Gravement endommagé, le réacteur fut indisponible pendant trois ans et demi environ. Cet accident nucléaire, porté au niveau 4 de l'échelle INES, est le plus grave jamais répertorié sur un réacteur en France

(5) Dans les années 1970, la France produit un tiers de sa consommation de gaz naturel, qui est distribué par gazoducs dans toute la France, à partir de 1965. Le gisement de Lacq, contribue alors grandement à l'essor industriel national, remplaçant le gaz de ville domestique qui était produit à partir du charbon dans des usines à gaz. Mais les réserves s'épuisent : assurant 15 % de l'approvisionnement gazier du pays dans ces années-là mais seulement 1 % en 2010.

Bénédicte Boyrie-Fénié

Transcription

Jimmy Jonquard
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, bonsoir. Un petit village des Landes, Lussagnet est devenu en quelques années la capitale française des réserves de gaz. D’ici à 1985, le gaz qui est stocké dans ce sous-sol landais, et qui constitue d’ores et déjà le plus grand réservoir naturel de notre pays sera doublé.
Journaliste
Blotti dans les collines de l’Armagnac, ceinturé par des champs de maïs qui s’étalent à perte de vue, le petit village de Lussagnet dans les Landes n’est pas un village comme les autres. En quelques années, Lussagnet est en effet devenu une sorte d’annexe du complexe de lac. C’est ce site géologique privilégié qu’ont choisi Gaz de France et Elf Aquitaine pour y implanter un gigantesque gisement de gaz naturel en sous-sol. Il s’agit ici de gaz épuré et non de brut, acheminé de Lac à Lussagnet par un pipeline long de 59 kilomètres. Le gaz ainsi acheminé est alors injecté avec une pression de 70 kilos dans un réservoir naturel à une profondeur d’environ 500 mètres. Sa capacité annuelle un milliard 150 millions de mètres cubes. L’intérêt de ce système, servir de soupape de régulation pour pallier à des incidents imprévisibles de production et faire face aux crêtes de débit particulièrement en hiver. Parfaitement au point, cette méthode présente aussi tous les caractères de fiabilité et de sécurité requis pour ce type d’opération. Le complexe de Lussagnet constitue la première étape de la politique énergétique française, qui prévoit de doubler d’ici à 1985 les capacités de stockage souterrain d’énergie. D’autres satellites viendront compléter ce programme dans les prochaines années dans cette région des Landes. Relié par pipeline, l’ensemble des installations sera télécommandé depuis le centre principal de Lussagnet ; qui deviendra ainsi le plus important réservoir de gaz naturel en France. Débit prévu, 8 millions de mètres cubes par jour.