Manifestation chez Citroën
Notice
Une centaine de manifestants CGT et communistes se sont réunis devant les grilles des usines Citroën la Janais à Rennes. Après une distribution de tracts, ils ont tenu un meeting demandant notamment plus de libertés syndicales.
Éclairage
L'organisation d'un meeting devant les portes de Rennes-La Janais a lieu dans un contexte de tensions entre la direction de Citroën et les syndicats et travailleurs. Le 26 avril 1982, des travailleurs de l'usine Citroën-Aulnay se mettaient en grève pour le respect de la liberté et de la dignité dans l'entreprise. La grève durera 37 jours et sera victorieuse le 1er juin 1982. Les travailleurs obtiendront des augmentations de salaires de 400 F (pour des salaires d'environ 3 500 F), plus une prime de 100 F, soit une revalorisation des salaires d'environ 15 à 20 %. Mais surtout les travailleurs retrouveront leur dignité et une certaine liberté, y compris syndicale, dans l'entreprise.
L'histoire syndicale au sein de Citroën est fortement marquée par l'existence de la CSL, issue de la CFT. En 1947 est fondée la Confédération du travail indépendant (CTI). Elle réunit d'anciens syndicalistes communistes, des militants du courant Syndicats animé par René Belin, des membres du Rassemblement du peuple français (RPF) le parti créé par le général de Gaulle. De querelles de pouvoir en scissions, cette CTI mute dix ans plus tard, en décembre 1959, en une Confédération française du travail (CFT) qui rassemble les différentes tendances du syndicalisme indépendant, à l'exception de la Confédération générale des syndicats indépendants, qui rejoint la CFTC en 1975. Jacques Simakis est le premier secrétaire général de la CFT. Au Congrès de septembre 1975, il est évincé, et est remplacé par Auguste Blanc, fondateur et secrétaire du syndicat CFT de Citroën depuis 1968.
En 1977, suite à l'assassinat par quatre adhérents de la CFT, de Pierre Maître, militant CGT, qui travaillait aux Verreries mécaniques champenoises à Reims, Auguste Blanc décide de changer le sigle de l'organisation. C'est la naissance de la Confédération des Syndicats Libres (CSL). Au cours d'un congrès réuni à Marseille en novembre 1977, la CSL adopte un "manifeste aux travailleurs de France (...) pour un syndicalisme populaire, authentique et professionnel". La ligne politique est claire : "nous refusons le marxisme, le collectivisme et l'autogestion, nous voulons la cogestion". La CSL est implantée dans plusieurs secteurs mais c'est dans la métallurgie que sa présence est la plus forte, notamment dans l'automobile.
La CFT s'implante chez Citroën, dès 1968, avec le soutien de la direction générale de l'entreprise. Celle-ci a organisé l'élection de candidats libres en échange de faveurs. A ce propos, Marcel Caille, dans son ouvrage Les Truands du patronat (Éditions sociales, 1977), écrit : "la direction Citroën paye des dizaines de permanents de la CFT : ce sont les agents de secteur, véritable police privée chargée d'organiser la CFT et d'encadrer les commandos, chargés de mettre en condition l'encadrement hiérarchique afin de le faire intervenir dans le cadre du système répressif existant". En 1990, la Direction départementale du travail et de l'emploi d'Ille-et-Vilaine demande encore à la direction de l'usine Citroën de Rennes de faire cesser les cas de "discrimination syndicale" relevés au terme d'une enquête faisant apparaître que les délégués CGT et CFDT sont moins payés que leurs collègues de la CSL.
Au cours des années 1990, la CSL a décidé de cesser son activité à la Barre-Thomas (Rennes) parce qu'elle était en difficulté financière. Elle a commencé à rencontrer des difficultés en raison d'un changement de comportement du groupe PSA, quand Jean-Martin Folz a pris la tête de la Direction Générale. Celui ci favorise alors le dialogue avec les syndicats. En revanche, la CSL est toujours présente à La Janais (Rennes). Elle porte désormais le nom de SIA. L'établissement de la Barre Thomas n'est plus, lui, dans le giron du groupe PSA.