Présentation de l'Amiénoise par Chantal Langlacé

15 avril 2012
04m 19s
Réf. 00128

Notice

Résumé :

Karine Hallaf reçoit Chantal Langlacé championne de course à pied, recordwoman du marathon, elle a remporté le premier marathon de Paris ouvert aux femmes. Sportive "militante", elle crée en 1999 l'Amiénoise, une course destinée aux femmes qui accueille plus de 2000 participantes. Un reportage montre la nouveauté de 2012 avec un entraînement chaque lundi. Tout est mis en œuvre pour épauler ces femmes ; la coureuse de fond Saliha Rarbi se charge du coaching et une garderie est mise à disposition.

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15 avril 2012
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Éclairage

En 1999, Chantal Langlacé, plusieurs fois titrée dans les grandes compétitions nationales et internationales de marathon, prend l'initiative d'organiser une course pédestre, l'Amiénoise, ouverte tout spécialement aux femmes. Cette manifestation propose notamment des épreuves de 10 km (l'Amiénoise) et de 5 km (la Course des Licornes). Chantal Langlacé entend ainsi impulser le développement de la course à pied auprès d'un public féminin qui reste souvent en marge de la pratique sportive. En ce sens, aidée de la coureuse de fond Saliha Rarbi, elle propose, les mois qui précèdent la course, une préparation physique ouverte à toutes les participantes. La championne inscrit donc clairement l'Amiénoise dans un projet militant: transformer les représentations communes faisant du sport une "affaire d'hommes".

Les sociétés occidentales ont il est vrai opéré depuis des siècles une nette division sexuelle des rôles, attribuant aux femmes un intérêt "naturel" pour les activités douces et esthétisantes et aux hommes un penchant pour l'affrontement, la compétition, le culte de la force et du muscle. Cette vision masculine de ce que doit être la féminité est allée, dans un premier temps, à l'encontre d'une pratique féminine: le sport, considéré comme un lieu de dépassement de soi, d'opposition, de rapports physiques plutôt violents, était déconseillé aux organismes que les promoteurs (masculins) du sport considéraient comme "faibles" (les femmes, les enfants). Pierre de Coubertin, l'un des fondateurs des Jeux Olympiques modernes, affirmait ainsi en 1912 que: "[Les femmes] ne peuvent se hausser à la prétention de l'emporter sur les hommes en course à pied, en escrime, en équitation... Faire intervenir ici le principe de l'égalité théorique des sexes, ce serait donc se livrer à une manifestation platonique dépourvue de sens [...] Le véritable héros olympique est à mes yeux, l'adulte mâle individuel. Les Jeux Olympiques doivent être réservés aux hommes, le rôle des femmes devrait être avant tout, comme dans tous les concours antiques, de couronner les vainqueurs".

Néanmoins, certains facteurs vont progressivement contribuer au développement du sport féminin : l'évolution des rapports hommes-femmes dans la société française, les influences étrangères (notamment le modernisme américain), l'émergence de figures sportives telles Fanny Bullock-Workman en alpinisme ou la picarde Suzanne Lenglen en tennis.

L'accès à certaines activités va cependant relever d'un véritable parcours militant. C'est le cas notamment de la course à pied, pratique d'endurance dont les exigences (effort, souffrance, ténacité) transigent avec les représentations traditionnelles de la femme (douceur, modération). Passant outre ces normes, certaines pionnières s'engagent dans des courses de marathon alors qu'elles n'en ont officiellement pas le droit: c'est le cas de l'américaine Kathrine Switzer à Boston en 1967. En France, les performances sur cette distance (mais aussi sur l'épreuve de 100 km) de la fondatrice de l'Amiénoise, Chantal Langlacé, jouent un rôle prépondérant dans la vulgarisation de la course à pied auprès du public féminin.

Il reste que les femmes demeurent encore aujourd'hui moins nombreuses que les hommes à s'adonner au sport (notamment en compétition) et s'orientent principalement vers des activités privilégiant les valeurs esthétique et hygiénique (gymnastique, danse, fitness). En cela, l'Amiénoise joue un rôle essentiel d'ouverture vers de nouvelles manières de penser les pratiques corporelles féminines. Ce à quoi les Picardes répondent favorablement en participant par milliers à cette course.

Sébastien Stumpp

Transcription

Karine Hallaf
Donc aujourd'hui, les choses ont quand même évoluées, et heureusement. Vous, vous avez toujours été une sportive militante. Je ne sais pas si on peut dire ça comme ça. Mais en tout cas, en 99, vous avez décidé, donc, de créer l’Amiénoise, une course qui, à l’origine, était destinée aux femmes. Pour quelle raison vous avez eu envie de créer cette course ?
Langlacé§Chantal
Je trouvais qu’il manquait une grande course dans la capitale régionale, déjà. Bon, le pari de faire une course féminine mais pas exclusivement féminine, puisque dès la première année, ça a été ouvert à toute la population d’Amiens et d’Amiens métropole. Mon but, c’était surtout d’organiser une grande course sur Amiens et de donner la priorité aux femmes. Pourquoi ? Parce que nous, dans les pelotons, on ne savait jamais où on était situées. Et puis, dans les courses mixtes, souvent, les femmes se retrouvent un peu isolées en queue de peloton, et je trouvais ça un peu dommage. Et on s’est aperçu très rapidement que le fait d’organiser des courses uniquement féminines, eh bien, on donnait le goût à des femmes à pratiquer la course à pieds et à venir participer à des petites compétitions comme l’Amiénoise.
Karine Hallaf
Alors la prochaine édition, ça sera le 26 mai. Et puis alors la nouveauté, cette année, pour inciter encore davantage de femmes à participer à cette course, c’est que vous avez mis en place des entraînements tous les lundis soir. On regarde le reportage tourné par Julien Lanchas et Julien Guéry.
(Musique)
Lanchas§Julien
Courir et courir encore comme un musicien qui répète ses gammes, pour que le jour J, elles aillent au bout de la partition. L’Amiénoise, la plus grande course féminine du nord de la France. Créée il y a 13 ans, elle connaît, aujourd'hui, un grand succès avec près de 5000 participantes sur la ligne de départ. A sa tête, une ancienne détentrice du record du marathon, Chantal Langlacé.
Langlacé§Chantal
On met tout en place pour que vraiment, l’Amiénoise soit abordable à toutes les femmes, et notamment, justement, les femmes qui sont un peu en souffrance, qui ont besoin de parler aux autres, qui ont besoin de se changer les idées.
Lanchas§Julien
Tout est mis en œuvre pour épauler ces femmes. La coureuse de fond, Saliha Rarbi, se charge du coaching.
Rarbi§Saliha
Allez ! Allez ! On baisse les bras de temps en temps et on respire bien.
Lanchas§Julien
Et une garderie est même mise à la disposition des mamans sportives.
Enfant 1
Ma mère, elle va courir.
Enfant 2
Elle va s’entraîner.
(Musique)
Coureuse 1
Un petit peu dur.
Lanchas§Julien
C’est vrai ?
Enfant 1
Oui. J’ai déjà fait 10 km hier en marche rapide.
Lanchas§Julien
Après le footing, des petites accélérations pour finir avec des exercices physiques.
(Musique)
Coureuse 2
C’est dur. Je n’ai pas l’habitude. C’est la première fois que je vais faire l’Amiénoise donc je monte tout doucement en charge donc je n’hésite pas à m’arrêter entre deux. Voilà. Je fais à mon rythme. Voilà. Ce n’est pas évident.
Coureuse 3
Moi, j’ai l’habitude de courir donc c’est facile.
Rarbi§Saliha
Là, elles ont pris confiance en elles. Et puis, forcément, au niveau du souffle, au nouveau des entraînements, ça vient tout doucement. Donc là, le fait d’être en groupe, justement, ça leur permet d’être motivées et de s’entraider entre elles pour essayer d’aller jusqu'au bout.
Lanchas§Julien
Encore quelques semaines d’entraînement pour fignoler sa préparation, pour pouvoir, dans un mois, franchir la ligne d’arrivée en sueur mais…
Coureuse 4
Avec le sourire !
(Musique)
Karine Hallaf
Voilà. Donc les entraînements, on l’a vu, avec le sourire. Ça remporte un franc succès, ces entraînements.
Langlacé§Chantal
Oui, on est même étonnées. On a presque 100 femmes tous les lundis. C’est extraordinaire. Il y a une ambiance extraordinaire. On a mis tout en place pour que ça marche bien…
Karine Hallaf
Je rappelle, c’est gratuit.
Langlacé§Chantal
Oui, c’est gratuit. On a des vestiaires gardés qu’on ferme à clé. Donc c’est rendez-vous 18 heures au coliseum.
Karine Hallaf
Donc tous les lundis soirs.
Langlacé§Chantal
Tous les lundis soirs.
Karine Hallaf
Et on n’est pas obligée de s’inscrire, on peut venir directement.
Langlacé§Chantal
Vous êtes la bienvenue Karine Hallaf !