L'Apremont : le vin blanc de Savoie

22 novembre 1968
04m 48s
Réf. 00238

Notice

Résumé :

Le vin blanc Apremont est un vin de Savoie. Les vendanges de l'année 1968 ont été bonnes. Les nouveaux traitements ont contribué à la bonne santé des vignes. De plus, la mécanisation a permis un meilleur rendement.

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Date de diffusion :
22 novembre 1968
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Éclairage

Tout aurait commencé par un tragique éboulement ! Dans la nuit du 24 au 25 novembre 1248, alors qu'il pleut à torrent depuis plusieurs jours, le flanc nord du mont Granier, situé au croisement de la vallée du Grésivaudan, de la combe de Savoie et de la cluse de Chambéry, s'effondre, ensevelissant plusieurs paroisses, dont celle de Saint-André, siège du décanat de Savoie. On déplore alors, selon les chroniques, plusieurs milliers de victimes.

Du même coup, ce glissement de terrain forme une langue de couches marneuses, de pierraille et de blocs calcaires qui s'étend sur quelque 30 km². L'avalanche s'arrête au pied du village de Myans grâce, dit la légende, à l'intervention miraculeuse de la Vierge noire. La zone d'éboulis prend à juste titre le nom d'Abymes de Myans.

Les terres incultes au pied du Granier sont défrichées dès le XIVe siècle, mais la vigne, qui existe pourtant dès l'époque romaine en Savoie, n'est plantée ici qu'au début du XVIIIe siècle et se développe au début du XIXe. On y produit un vin de « basse qualité », ainsi que le note le négociant en vin et œnologue André Jullien, en 1816, dans la première édition de sa Topographie de tous les vignobles connus. Une piquette qui ne sert qu'à la consommation locale. L'arrivée du phylloxéra en Savoie en 1877 va changer la donne ; les viticulteurs trouvent le salut en greffant des plants américains, plus résistants, sur la traditionnelle jacquère, cépage à la base des vins blancs apremont et abymes. L'Apremont gagne en qualité. Et il le faut, car la concurrence avec les vins du Midi, qui commencent à se répandre sur les tables de France, grâce notamment à l'essor du chemin de fer, est rude.

La première reconnaissance officielle arrive en 1957, quand les vins de Savoie obtiennent l'appellation VDQS. La mode des sports d'hiver leur donne un nouvel essor et un débouché commercial en Savoie, Haute-Savoie et Isère. Pourtant, en 1968, le commentaire du reportage des Hommes de la terre déplore encore que ce « petit blanc qui mérite d'être connu ne [le soit] pas suffisamment ». C'est désormais sur la commercialisation que se penche la coopérative Le Vigneron savoyard, regroupement de huit viticulteurs créée en 1966, pour que les 200 000 bouteilles de vins primeurs produites chaque année, soient diffusées au-delà des frontières régionales et notamment à Lyon et à Paris. Sans céder toutefois au chant des sirènes, en privilégiant une démarche qualitative et non simplement quantitative. Les résultats seront au rendez-vous. En 1973, l'Apremont et l'Abymes obtiennent la prestigieuse appellation d'origine contrôlée (AOC).

Aujourd'hui, le vignoble s'épanouit sur 400 hectares. Il produit, entre les communes d'Apremont, des Marches et de Saint-Baldoph, 24 500 hl / an de vin, soit 28 % des blancs savoyards et demeure le cru le plus important et le plus connu des vins de Savoie. Une histoire à découvrir au musée de la Viticulture, à Saint-André-Les-Marches en Savoie, qui rassemble aussi une collection d'outils et d'ustensiles anciens.

Michelle Zancarini

Transcription

(Musique)
Journaliste
Connaissez-vous la Savoie vinicole et viticole ? Peut-être par ouï-dire. Et pourtant sur les coteaux d’Apremont, de Miance, d’Abîmes, sont plantées des vignes qui donnent un petit blanc qui mérite d’être connu. Il l’est déjà mais à notre avis, pas suffisamment. Bien sûr, en fin de maturation, les vignerons savoyards ont eu peur. Après cet été pluvieux, froid, sans soleil. Puis il y eut les rayons, suffisants juste avant les vendanges et surtout pendant. Tout fut sauvé ou presque. Et la Savoie, connue pour son lait, ses fromages, pourra encore cette année montrer que son agriculteur sait être un vigneron qui n’a rien à envier au bourguignon. Il sait et connaît sont métier. Mais revenons à l'Apremont 68. Monsieur Félix, comment se présente la vendange 68 ?
Intervenant 1
Et bien comme vous pouvez le constater, la vendange est saine malgré, malgré le mauvais temps que nous avons eu tout l’été.
Journaliste
Pas trop de pourriture quand même ?
Intervenant 1
Il y a pas trop de pourriture, la Jaquère étant un plan tardif, à maturité tardive quoi,
Journaliste
Le raisin a tenu, il y a pas…
Intervenant 1
Le raisin a tenu. Je crois que les traitements ont beaucoup aidé, l’influence des traitements a beaucoup contribué à garder une vendange saine jusqu’à…
Journaliste
Au ramassage.
Intervenant 1
Jusqu’au ramassage.
Journaliste
Et en plus, vous avez la chance d’avoir le beau temps maintenant.
Intervenant 1
Oui, l’arrière-saison a été bonne et ça a contribué à faire quand même malgré tout un vin de qualité.
Journaliste
Vous espérez que Apremont 68 sera quand même un bon vin.
Intervenant 1
Je pense que ce sera un bon vin.
Journaliste
Vous avez déjà du titrage, vous avez déjà vu ?
Intervenant 1
Oui, en coteau nous arrivons à 9, 8, 10 degrés.
Journaliste
C’est bon.
Intervenant 1
Ce qui est bon pour la saison.
Journaliste
Ce ne sera pas une année exceptionnelle, mais ce sera une bonne année.
Intervenant 1
Ce sera une bonne année.
(Musique)
Journaliste
Produire était bien, mais encore fallait-il commercialiser. Vendre. Les hommes se groupèrent, 8 vignerons. Au milieu des villages d’Apremont et des Abîmes. Ils créèrent un groupement de producteurs, mais pourquoi et comment ? Monsieur [Duprat], pourquoi fut créé le Vigneron Savoyard et qu’est-ce exactement ?
Intervenant 2
Le Vigneron Savoyard est un groupement de 8 viticulteurs qui a été créé pour faciliter la commercialisation de nos produits et pour faciliter surtout nos investissements. Pour la commercialisation de ces produits, nos vins de Savoie étant des vins de primeurs qui sont très frais, très jeunes, qu’il faut mettre en bouteille dans de bonnes conditions au printemps. Et ceci nous supposait des investissements importants, chacun au stade particulier, ce qui fait qu’à 8, on a pu réaliser ça d’une façon beaucoup moins onéreuse et surtout pouvoir mettre sur le marché un volume de bouteilles beaucoup plus important et d’une qualité suivie.
Journaliste
Je crois aussi que au point de vue matériel agricole aussi ça vous a permis de faire des achats et de moderniser.
Intervenant 2
De moderniser aussi même du côté des exploitations, quoi que le vigneron savoyard prenne effectivement son action qu’au moment de la vendange, c’est-à dire l’organisation déjà du chantier de vendange. Ce qui est différent avec les autres coopératives.
Journaliste
C’est-à dire qu’au départ vous prenez le, l’organisation.
Intervenant 2
L’organisation du chantier de vendange, nous employons nous-mêmes les vendangeurs, les 40 vendangeurs.
Journaliste
Combien vous produisez à peu près, approximativement, à l’heure actuelle ?
Intervenant 2
Nous produisons à peu près 2000 hectolitres de vin à 8. Nos objectifs d’avenir, on pense que d’ici 70, 71, nous produirons 3000 hectolitres, c’est-à dire environ 400000 bouteilles de vin.
Journaliste
Et je crois aussi que le Vigneron Savoyard a été créé pour la commercialisation, parce que vous aviez un centre technique au départ.
Intervenant 2
Oui, euh nous avions, en revenant un petit peu en arrière, nous avions un centre d’étude technique viticole, où on a essayé de débroussailler les différents problèmes techniques de la vigne, c’est-à-dire produits de traitement, fumures et tout. On s’est aperçu très vite au bout de 2 ans de travail qu’un problème restait à résoudre et le plus important, c’était la commercialisation de nos produits et je pense que la suite de ces études est arrivée logiquement à la commercialisation donc au Vigneron Savoyard.
Journaliste
Et au point de vue commercialisation, vous êtes resté quand même régional, ou est-ce que vous avez des idées d’expansion hors région ?
Intervenant 2
Le plus gros de notre commercialisation se fait dans les départements de Savoie, Haute Savoie, Ain, Isère. Par contre, on essaie à l’heure actuelle d’élargir un peu plus loin, donc on part sur Lyon, sur Paris la commercialisation de nos produits.
Journaliste
Ce qui voudrait dire que vous auriez un réseau commercial alors.
Intervenant 2
Oui.
Journaliste
Qui existe déjà, elle est embryonnaire ou bien qui existe ?
Intervenant 2
Euh, disons que le réseau commercial existe pour à peu près les 200000 bouteilles qu’on a produit jusqu’à présent, on va essayer de l’élargir pour les 300000 à peu près qu’on va faire cette année et on l’élargira pour arriver à 400000 bien entendu.
Journaliste
Je crois qu’en conclusion, Monsieur [Duprat], on peut souhaiter longue vie au Vigneron savoyard et trinquer avec un Apremont ?
Intervenant 2
Ouais.
(Musique)