Économie et attractivité
Économie et attractivité
Au cours des XVIIIe et XIXe siècles, Nantes se développe autour du port et de ses échanges : construction navale, transformation des produits importés et exportés, outils financiers. L’État accompagne ce développement économique par des monopoles de trafics intercontinentaux et de détaxation. Il crée Saint-Nazaire mieux à même d’accompagner l’accroissement de la taille des bateaux.
Nantes est alors une ville monde qui vit sur ses échanges maritimes et fluviaux plus que sur son hinterland. Fernand Braudel la qualifierait de ville phénicienne opposée à la ville romaine qui vit sur un territoire local.
L’évolution économique d’après-guerre va peu à peu transformer Nantes et Saint-Nazaire, toujours accompagnées par les politiques publiques qui se réorientent vers l’aménagement du territoire et son organisation.
# Les métropoles d’équilibre et leurs conséquences économiques
# Les métropoles d’équilibre
En 1963, est créée la délégation interministérielle à l’aménagement du territoire (DATAR) chargée de préparer les orientations et de mettre en œuvre les décisions arrêtées par le comité interministériel d’aménagement et de développement du territoire (CIADT). Olivier Guichard en est responsable et il continuera les « travaux pratiques » plus tard comme Président de la région des Pays de la Loire. Le 2 juin 1964, le CIADT désigne huit métropoles d’équilibre dont celle de « Nantes Saint-Nazaire ».
En 1967, sont créés les organismes régionaux d’étude et d’aménagement du territoire (OREAM) qui devaient établir des schémas de développement de l’espace métropolitain (les OREAM seront dissous en 1983).
Le cadre et l’ingénierie sont en place. Restent l’accompagnement économique et la prise en main locale.
# Les premiers effets économiques
La politique de décentralisation des services publics, comme ceux du ministère des Affaires étrangères, s’accompagne d’une vague de création, d’implantation ou de développement d’activités comme la SERCEL en 1965, la Compagnie Industrielle de l’Ouest (CPIO) filiale de la régie Renault ou les usines LMT en 1971.
L’économie nantaise se diversifie et se développe sur de nouvelles zones économiques comme Carquefou ou Nantes-est.
# Nantes et Saint-Nazaire
Ces deux villes concurrentes, parfois hostiles l’une vis à vis de l’autre, Nantes « la bourgeoise » et Saint-Nazaire « l’ouvrière », vont voir leurs destins s’unir. En 1989, Jean-Marc Ayrault et Joël Batteux présentent un projet politique commun pour le développement de l’estuaire, qui mènera au schéma de cohérence territoriale et à l’actuel pôle métropolitain institutionnel.
# Les chantiers navals
Le lent déclin des chantiers navals et le dernier bateau lancé à Nantes en 1987, auquel succèdent les paquebots-villes construits aujourd’hui à Saint-Nazaire, illustrent la mutation industrielle de Nantes, la mondialisation de l’économie d’aujourd’hui et les concentrations qu’elle entraîne.
Les grandes grèves de 1955-1956, d’une ampleur jusqu’alors inconnue, montrent l’impact profond sur les ouvriers du territoire de la désindustrialisation et des modes de production.
# Le port
Les négociants portuaires de Nantes ont lutté contre Saint-Nazaire considérée comme « étatique » en voulant développer un avant-port à Paimboeuf et en creusant le canal de la Martinière.
La création du Port-Atlantique Nantes Saint-Nazaire en 1966 regroupe les sites de Donges, Saint Nazaire et Nantes. Celui-ci va permettre une stratégie commune et peser, avec l’appui d’Olivier Guichard et du préfet Camous, pour diversifier les trafics, développer les projets de raffinerie et de centrale à Cordemais dont la mise en service aura lieu en 1970.
# L’accompagnement des acteurs locaux
En 1970, des entrepreneurs bretons et ligériens créent l’association Ouest-Atlantique pour attirer des entreprises sur leurs territoires. Les régions et les autres collectivités ayant par la suite développé leurs propres outils de développement, cette association sera dissoute en 2013.
En 1993, les CCI de Nantes et Saint-Nazaire s’unissent pour une stratégie commune. C’est l’aboutissement d’un processus où Jean-Joseph Régent, président de la Chambre de commerce de Nantes, jouera un rôle important de liaison entre les représentants des anciennes entreprises et des nouvelles. Venant du Croisic, sans relation dans le monde économique nantais, il avait créé seul son entreprise. Autant dire qu’il connaissait l’importance de ce lien au cœur du tissu économique local.
Entre-temps, en 1980, l’Association communautaire de l’estuaire de la Loire (ACEL) est créée entre les représentants politiques, la CCI et le port, afin de construire une vision stratégique partagée du devenir de l’estuaire.
# Les infrastructures
Dans une économie de réseau, il faut des liens avec le reste de la France, l’Europe et le monde.
# Des routes
Le général de Gaulle initie le plan routier breton. Cela se poursuit vers Paris avec l’ouverture en 2 fois 2 voies en 1981 entre Nantes et Angers, puis la route des estuaires de l’atlantique, la liaison Nantes-Angers-Lyon et le réseau autoroutier européen.
# Des trains
Amélioration des lignes vers Lyon et le réseau européen dans les années 80 et aujourd’hui la connexion TGV avec le réseau européen.
# L’avion
Dès 1974 est créée une réserve pour un futur aéroport régional. En 1989 cela devient un projet pour le grand Ouest, demain nous dira la suite.
# Les télécommunications
En 1982, Alain Chénard met en place TELEM, réseau télématique municipal. Dans les années 90, Internet arrive. La fibre optique permettant la mise en réseau à haut débit se développe à partir de 1995, et le réseau 0-méga créé en 2003 relie les principaux sites publics de l’agglomération nantaise (santé, enseignement supérieur, collectivités locales et zones d’activités).
# Des équipements pour accueillir des événements internationaux
Propriété de Nantes métropole, exploité par la CCI Nantes-Saint Nazaire, le parc des expositions de la Beaujoire construit en 1969 sera complété par l’ouverture du Palais international des Congrès en 1992 puis du Zénith en 2006.
L’acculturation entre Nantes et Saint-Nazaire est longue mais elle est le début d’une métropole qui se construit autour de l’estuaire, rencontre de la Loire et de l’Atlantique.
L’agence d’urbanisme de la région nantaise créée par Alain Chénard en 1978 permet d’accompagner ce long projet.
# Les principales mutations économiques
Entre 1975 et 1999, chaque année l’agglomération nantaise va perdre 900 emplois dans le secteur secondaire et en gagner 3600 dans le secteur tertiaire. Il faut prendre ces chiffres avec précaution, une partie des activités tertiaires des entreprises n’étant plus assurée par elles, mais par des entreprises spécialisées.
Par ailleurs, ce solde positif en matière d’emploi et ces mutations sont accompagnées par un fort développement de l’enseignement supérieur et de la recherche qui permet de sauvegarder, de développer et de créer des nouvelles activités.
Mais commençons par le commerce.
# Le commerce
En France plus particulièrement et à Nantes singulièrement, ces mutations ont été très fortes.
Dès 1967, un des tous premiers hypermarchés s’installe route de Vannes à Saint-Herblain sous l’enseigne « Record ». Il s’ensuit un fort développement des zones commerciales aux entrées des villes, déséquilibrant le petit commerce et celui du centre-ville. L’arrivée en centre-ville en 1996 de la FNAC dans l’ancien Palais de la Bourse est l’illustration d’une volonté de rééquilibrage.
# L’enseignement supérieur et la recherche
Fermée pendant deux siècles, l’université où seule la faculté de médecine subsiste, est rouverte en 1962. Les étudiants passeront de 15 000 à la fin des années 1970 à environ 50 000 en 2005.
# L’école centrale et l’école de commerce (AUDENCIA)
L’école centrale et l’école de commerce (AUDENCIA) se développent, mais un grand nombre d’écoles d’ingénieurs se créent : ENITIAA (1974), École vétérinaire (1979), CNAM (1981), IRESTE et ISITEM (1985), ICAM et École de design (1988), École des mines (1991), École supérieure du Bois (1993) …
# L’université
L’université développe et diversifie ses formations, offrant une forte augmentation du niveau des diplômes aux habitants de la métropole.
Au plus fort de la crise d’Airbus, elle sait valoriser et développer la crédibilité du maintien et du développement des sites de Nantes Saint-Nazaire avec la création de pôle de compétitivité EMC2.
# Des adaptations difficiles
L’agro-alimentaire est fortement touchée, et particulièrement la conserverie : Saupiquet, après avoir été absorbé par Cassegrain, ferme ses sites nantais en 2005. Frigécrème ferme en 1998 après un incendie. Les abattoirs sont vendus puis fermés en 1995. Beghin-Say, transformateur de sucre de canne, voit son activité décliner. Les entreprises liées à la conserverie sont en difficulté.
# Des entreprises se confortent, d’autres se créent
Certes LU, BN, Armor se délocalisent à la périphérie de Nantes mais se confortent dans des secteurs en concentration et délocalisation. Saunier Duval s’adapte avec beaucoup de volonté ainsi qu’Airbus et Waterman qui se consolident.
Eurofins Scientific est l’exemple brillant d’une grande entreprise à l’international qui s’est développée sur l’essor des biotechnologies et des recherches de la faculté de médecine.
Tipiak a su s’adapter aux nouveaux modes de vie en développant des plats préparés.
Les maraîchers se développent maintenant autour de Nantes en restant leaders européens de la mâche et très bien placés sur le marché du muguet.
# Conclusion
La mutation de l'économie nantaise a accompagné celle de l'économie mondiale. Peu à peu la ville s'est "tertiarisée" tout en gardant une activité industrielle non négligeable.
Si traditionnellement les hommes allaient vers les matières premières et les ressources, aujourd'hui, ils vont aux territoires les plus attractifs. La concurrence devient de plus en plus celle des villes entre elles. Celles-ci sont prises entre les tenailles du temps court, le quotidien des habitants, et le temps long des réponses politiques.
Nous pouvons en voir le chemin à travers le parcours vers l'intercommunalité, la métropole et la construction de politiques cohérentes à la bonne échelle, malgré le « jeu à la nantaise ». Celui-ci tient beaucoup à la capacité des acteurs à travailler ensemble au-delà de leurs différences et de leurs prés carrés.
Un des enjeux majeurs de l'avenir de Nantes et de l'estuaire de la Loire, est de conjuguer ces temps pour devenir visible au niveau européen, espace économique majeur au niveau mondial.
C'est sans doute ainsi que nous aurons la capacité de répondre aux nouveaux défis du développement durable et de l'économie numérique.