Le Puits aux images

19 décembre 1983
03m 52s
Réf. 00538

Notice

Résumé :

Le Puits aux images a planté son chapiteau à Annecy. Le montage du chapiteau, des extraits du spectacle et les propos de Christian Taguet donnent à voir le travail et l'engagement des artistes assez significatifs des débuts du nouveau cirque.

Date de diffusion :
19 décembre 1983
Source :
A2 (Collection: C'est la vie )
Artistes et personnalités :

Éclairage

Le nouveau cirque avant de s'affirmer comme un genre spectaculaire identifié et reconnu institutionnellement, va bégayer ses premiers émois dans la rue, sur des tréteaux ou sur un palc (aire du spectacle sur la voie publique), avant même de s'engouffrer sous le chapiteau ou d'investir les salles. Les trublions qui participent à cette aventure bricolent un théâtre d'images et de mises en jeu du corps, tout en rejetant la toute-puissance du texte assimilée à l'exercice de la domination bourgeoise. Ils investissent la ville alors que celle-ci se réorganise : les classes populaires sont chassées des centres et les barres de béton essaiment en banlieue ; les quartiers historiques sont restaurés et rendus aux piétons. Les baladins entrent par effraction dans cette rue en passe d'être policée. Pour Nicolas Roméas, « Réintroduire la dimension ludique de la vie dans ce monde d'adulte fait de béton, d'angoisse et de poussière était alors l'acte le plus profondément subversif » [1].

Le Puits aux images est emblématique de cette évolution et se constitue suite à la demande faite à Christian Taguet de rassembler une équipe de saltimbanques [2], pour « animer » le parvis du Théâtre National de Strasbourg, par Jean-Louis Thamin, qui en est alors le directeur.

Christian Taguet, né en 1948, consacre ses études à la comédie et à la musique, apprend le saxo et la trompette au sein de la Fanfare des Beaux-Arts (1969-1970). Comme la majorité de ceux qui s'engagent dans cette mouvance, les artistes dont il s'entoure, ne sont pas des "enfants de la balle", ils s'essayent au jeu dramatique, à la musique, mais également à l'acrobatie. Ces apprentis-circassiens découvrent les techniques de cirque lors des répétitions, et se perfectionnent au fil des représentations. Certains d'entre eux, à la recherche de référentiels de connaissances techniques, investissent les écoles de cirque pour amateurs ou pour professionnels qui apparaissent alors.

Dans la tradition du théâtre de tréteaux, Le Puits aux images revendique la référence à la commedia dell'arte et met à son répertoire des farces de Molière auxquelles va, rapidement, s'adjoindre la prouesse circassienne.

En 1979, une « envie de cirque » conduit la troupe à expérimenter la création sous chapiteau [3]. Ce nouveau parti pris esthétique, encore très marqué par les engagements initiaux, permet une mise en valeur de la présentation des numéros de cirque par une recherche en acte sur l'entité spectaculaire et un attachement tout particulier à la musique en live [4]. En 1987, la maturation artistique est manifeste, avec Noir Baroque, que Christian Taguet qualifie lui-même de « premier spectacle de création ». Pour confirmer une affirmation de son évolution artistique, Le Puits aux Images devient le Cirque Baroque, en 1989.

Il est à noter que parmi les premiers acteurs du Puits aux images nous pouvons rencontrer Jacques Maistre (Paillette) [5], Igor et son frère Branlo (Branlotin la désespérance), qui, en 1976, se séparent de la compagnie et fondent le Cirque Aligre.

[1] Nicolas Roméas, « Enfance d'un itinéraire de la rue », in : Le Théâtre de rue, 10 ans d'Eclat à Aurillac, Paris, Editions Plume, 1995, p. 11.

[2] De l'italien saltimbanco, littéralement : saute en banc (le banc ou la banque étant utilisé pour tréteaux).

[3] Jean-Philippe Lecat, Ministre de la Culture et de la Communication (1978-1981), en fondant l'ASPEC (Association Pour le Soutien, la Promotion et l'Enseignement du Cirque), en 1979, rend possible l'obtention de subventions pour l'acquisition de chapiteau. Le Puits aux Images qui adopte le statut de SARL est la première troupe attachée à l'histoire du nouveau cirque à en être adhérente.

[4] Philippe Lapeyre et Luc Le Masne, Musique Pour Le Cirque Le Puits Aux Images, 33 Tours vinyle, Le Puits Aux Images Editeur.

[5] Jacques Maistre (dit Paillette) est entre autre l'auteur de Le Cogne-trottoir (joué par le Puits aux images) et conçoit, aujourd'hui, des costumes et des accessoires pour le théâtre.

Martine Maleval

Transcription

Jeune fille
Cette semaine nous avons donc choisi de mener l’enquête sur le cirque, ce qui est une manière d’oublier un petit peu nos soucis quotidiens. Michèle Barbier, c’est vous qui allez nous aider à découvrir le monde du cirque français. Puis on va commencer aujourd’hui par le commencement, en plantant le chapiteau à Annecy, avec un cirque qui s’appelle le Puits aux images.
Michèle Barbier
Oui, effectivement nous sommes au mois de décembre, et le mois de décembre est un mois faste pour les cirques. Heureusement d’ailleurs, qu’il y a le mois de décembre puisque toute l’année c’est très difficile, mais enfin pendant la période des fêtes…
Présentateur
C’est un peu comme pour les huîtres, c’est dommage, il faudrait que ce soit la saison toute l’année.
Michèle Barbier
Exactement, ce sont les huîtres de Noel, mais ce sont aussi des spectacles offerts par les comités d’entreprises et qui sont une manne bien sûr pour les artistes. Alors les artistes se promènent, ils vont planter leur chapiteau dans différentes villes de France, et c’est ainsi que nous avons retrouvé le Puits aux Images, qui actuellement se trouve à Annecy.
Présentateur
Alors le plus simple, et bien c’est encore d’aller à Annecy et de regarder votre reportage.
(Bruit)
Journaliste
Chacun met la main à la pâte, comme dans tous les petits cirques, on deviendra artiste après avoir monté le chapiteau. Mais ici, personne n’est né dans un cirque. Le Puits aux images, c’est une troupe de 17 personnes venues de tous les horizons et qui ont choisi le métier de la piste.
Inconnu
C’est bon là, lâchez tout ! Qu’est ce que ça dit dans l’axe ?
Journaliste
Ils se déplacent ainsi, de ville en ville.
Christian Taguet
Disons peut être une quarantaine. En général, on reste le plus souvent une semaine, quand on travaille. Notre action étant partagée entre les spectacles et des animations, répétitions publiques, ateliers, l’animation de rue.
Journaliste
L’originalité de leur spectacle, c’est l’utilisation de l’orchestre et la présentation Commedia Dell’Arte.
(Musique)
Comédien
Hommes et femmes écoutez bien, taisez-vous ! Taisez-vous pour que le silence retrouve sa transparence de source. Taisez-vous !
Christian Taguet
Je pense qu’on a simplement, profité de nos acquis de spectacle de rue, du travail théâtral qu’on avait pu faire avant, et on les a intégrés dans ce spectacle. C’est peut être ce qui lui donne un petit peu de son originalité.
(Musique)
Comédien
Bon, regarde, tu les prends comme ça, tu les prends, tu les passes par l’intérieur, t’as compris ? Oui, il a compris, ça se voit.
(Musique)
Christian Taguet
Le premier spectacle de cirque que nous avons monté il y a toujours tout de suite eu un orchestre. Et dès que nous avons pu le faire, nous avons une musique originale, écrite pour le spectacle. Les musiciens participent au spectacle en dehors de leur travail de musicien, et participent même au montage et au démontage du chapiteau bien sûr, mais ça fait vraiment partie intégrante de ce spectacle.
(Musique)
Christian Taguet
Dont tu ne trouves trace dans aucun manuel, et…et… et qui s’appelle de son nom scientifique, euh… nom de vulgaris, princessa graciosa, Christina.
(Musique)