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Naissance d'Arte, télévision franco-allemande

Institut national de l’audiovisuel

Proposé par Institut national de l’audiovisuel

Date de diffusion : 30 mai 1992

La chaîne de télévision franco-allemande Arte a commencé à émettre le 30 mai 1992, sur les réseaux câblés des deux pays. L'entreprise doit trouver une organisation capable d'assurer l'orientation culturelle des programmes, le bilinguisme et la coopération de deux Etats aux traditions télévisuelles différentes.

Niveaux et disciplines

Ressources pédagogiques utilisant ce média

Informations et crédits

Type de ressource :
Forme :
Collection :
Date de diffusion du média :
30 mai 1992
Production :
INA
Page publiée le :
21 juin 2013
Modifiée le :
29 juin 2023
Référence :
00000001412

Contexte historique

Par Claude Robinot

L'idée d'une chaîne culturelle franco-allemande naît à la fin des années 80. A cette époque le paysage audiovisuel français a changé avec l'apparition des opérateurs privés : Canal+ en 1984, La Cinq et TV6 en 1986. Cette brèche dans le monopole de diffusion du service public, le président Mitterrand en a pris l'initiative, tout en exerçant un contrôle strict sur les attributions de fréquences. Le gouvernement de cohabitation a poursuivi dans la même direction en procédant à la privatisation de TF1, en 1987. Ce bouleversement accompagne les changements des techniques de diffusion qui, avec le câble et le satellite, multiplient le nombre de chaînes potentielles.

En contrepoint de ces logiques commerciales et privées, le président français propose de réfléchir, dès 1984, à la mise en place d'une chaîne culturelle et éducative à vocation européenne. L'idée est de créer un pôle de production et de diffusion de programmes capables de renforcer l'identité européenne pour ensuite tracer sur le continent les contours d'un espace audiovisuel indépendant des influences américaines. Le projet débouche, en février 1986, sur la création de la Sept dont le nom signifie Société d'Edition de Programmes de Télévision. Le conseil de surveillance est présidé par un professeur du collège de France, le médiéviste Georges Duby. Ce choix indique à lui seul les ambitions de l'entreprise tournée vers des productions culturelles de qualité. L'action de la Sept se limite à la production de programmes et d'échanges avec les télévisions européennes. Elle manque de moyens propres de diffusion. Il faudra attendre 1989 et sa présence sur le satellite pour que la chaîne puisse enfin toucher un public européen. En France, l'audience reste confidentielle, même si la Sept bénéficie d'horaires réservés sur FR3 pour parvenir jusqu'aux téléspectateurs équipés en hertzien. L'audience dépasse rarement 10 %. Quelques émissions ont un succès d'estime comme Histoire parallèle de Marc Ferro qui compare et commente les actualités de la Seconde Guerre mondiale, à cinquante ans de distance. Le programme culturel et réellement européen répond bien au cahier des charges. Pourtant la Sept reste très française. C'est la volonté politique de François Mitterrand, allié à Helmut Kohl, qui va faire bouger les lignes. Au sommet franco-allemand de Francfort (octobre 1986), consacré à la coopération culturelle, le communiqué final évoque dans des termes très généraux la nécessité de renforcer le poids politique de l'Europe par la communication audiovisuelle. Un groupe de travail binational est constitué pour étudier la question. Deux ans plus tard, en novembre 1988, les deux chefs d'Etats s'accordent pour créer « une chaîne culturelle franco-allemande, noyau d'une future télévision culturelle européenne ». Encore une fois, c'est au plus haut que les décisions sont prises pour éviter l'enlisement du projet. Les difficultés sont nombreuses : en Allemagne c'est au niveau des Länder que la télévision est gérée. En France quelques dents grincent. Il faudra en passer par la signature d'un traité bilatéral, entre la France et tous les Länder, le 2 octobre 1990, à la veille de la réunification allemande. Conséquence du traité, « une société de télévision commune et indépendante à vocation culturelle et européenne » s'installe à Strasbourg ; elle prendra plus tard le nom d'ARTE. La nouvelle société adopte une structure originale, c'est un GIEE, groupement d'intérêt économique européen, composé de trois entités : une direction centrale à Strasbourg et deux pôles nationaux, Arte-France et Arte Deutschland-TV. Cette nouvelle chaîne assure la diffusion multilingue de programmes conçus à parité par les Français et les Allemands. La première soirée d'émissions à lieu le 30 mai 1992. En septembre, elle étend son volume de diffusion en émettant en soirée sur la fréquence autrefois attribuée à la Cinq. L'accueil est plutôt réservé des deux côtés du Rhin, mais elle trouvera petit à petit sa place dans les deux pays.

Éclairage média

Par Claude Robinot

Ce sujet du journal télévisé de FR3 date du 30 mai 1992 ; il annonce le lancement des émissions d'Arte simultanément sur les écrans français et allemand. Le présentateur lance le sujet par la phrase : « la Sept c'est fini ...». En effet les programmes de la Sept qui ont été le laboratoire de la chaîne franco-allemande étaient diffusés sur le canal de la troisième chaîne le samedi en soirée. La direction de FR3 obéissait à une injonction du pouvoir politique, mais s'exécutait avec mauvaise grâce. Pour être plus précis, la Sept s'est fondue dans la partie française d'Arte et continue son travail de production. Le changement vient de nouvelles obligations liées au multilinguisme et aux commandes du comité des programmes qui veille à la parité entre les émissions d'origine allemande et française. L'équilibre n'est pas facile à trouver car les traditions télévisuelles et les goûts des spectateurs sont assez différents. Le commentaire précise aussi que la chaîne peut être vue par 900 000 personnes en France et 10 millions en Allemagne. Cet écart de 1 à 10 s'explique par les disparités d'équipement entre les deux pays. La France est encore très en retard pour le câble comme pour le satellite. Le 28 septembre, la diffusion en hertzien sur la fréquence de la 5 correspond à un deuxième lancement de la chaîne pour une grande partie des Français. La réception est loin de couvrir l'ensemble des deux territoires pour des raisons techniques et juridiques. Les cinq nouveaux Länder de l'Est attendront jusqu'en 1996. En mai, la première émission diffusée était La malédiction du Pharaon ; en septembre, le choix portait sur le film de Wim Wenders Les ailes du Désir. Le cinéma européen de qualité occupe une grande place sur la chaîne franco-allemande, comme les soirées « Thema » qui consacrent une fiction, un documentaire et un débat sur un sujet unique. Si la qualité est au rendez-vous, l'audimat est faible (2,5 % en 2010). Pendant plus de vingt ans, Jérôme Clément a présidé Arte qui est restée toujours indépendante du pouvoir politique. Elle est devenue une chaîne franco-allemande, appréciée à l'étranger mais elle est encore loin d'être une chaîne culturelle européenne.

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