La ville nouvelle de Lille Est

07 avril 1972
03m 16s
Réf. 00094

Notice

Résumé :
Décidée en 1969, la ville nouvelle Lille Est a vu les premiers travaux débuter en 1971. Il faut construire des habitations pour une population estimée à 120 000 habitants en 1985, mais aussi prévoir des emplois dans le secteur tertiaire. A l'occasion d'une exposition de maquettes de cette future ville, reportage sur l'avancée des constructions un an après.
Date de diffusion :
07 avril 1972
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Éclairage

1972 : une exposition à la communauté urbaine présente les maquettes et croquis de la ville nouvelle qui, à l’est de Lille, commence à sortir de terre. L’aventure commence le 6 février 1967 quand pour répondre à la demande de l’Etat de renforcer les métropoles d’équilibre et d’en finir avec "Paris et le désert français", le ministre de l’équipement, Edgar Pisani, décide de la création d’une ville nouvelle à l'est de Lille.

Après une première phase d’études, l’EPALE, établissement public d’aménagement de Lille-Est, est créé en 1969 avec à sa tête, l’ingénieur des Ponts et Chaussées Jean-Claude Ralite. Le territoire couvre trois communes et près de 2700 hectares dont 2000 pour l’édification de la ville nouvelle. En 1970, les communes de Flers, Annappes et Ascq fusionnent pour fonder Villeneuve d’Ascq qui peut dès lors accueillir le chantier qui démarre en 1971. L’ambition est de taille : construire une ville pour 120 000 habitants à l’horizon de 1985, 6000 logements, 8000 emplois. Et ce dont a le plus besoin la métropole et la région Nord-Pas-de-Calais, ce sont des emplois tertiaires dans l’administration et la recherche. On attend donc une population jeune et éduquée, susceptible de relever le niveau socio-culturel de la métropole.

Dans son entretien, Jean-Claude Ralite évoque les priorités de l’aménagement en déclarant que "ce qui sort, c’est ce qui ne sort pas". En tant qu’ingénieur, ses préoccupations premières sont le sol et le sous-sol du site choisi. Truffé de carrières, encombré de zones humides et de marécages, le site est difficilement constructible et demande une grande ingéniosité ne serait-ce que pour le passage des égouts et des réseaux. Une des solutions, à l’origine de la "ville verte", est la constitution d’un axe paysager central est-ouest où une succession de lacs et de parcs permet le drainage des terrains et le tamponnage des eaux pluviales. Le problème des accès est résolu par la création d’un axe nord-sud, le boulevard du Breucq, raccordé au réseau autoroutier nord-européen qui dessert en arborescence les différents quartiers en projet. Un métro automatique léger est à l’étude pour relier la ville nouvelle à Lille en quelques minutes : un prototype du VAL mis au point par les chercheurs de l’université de Lille 1 et la société MATRA sera expérimenté en 1973 mais il faut attendre 1983 pour un service effectif.

Quand le recteur Guy Debeyre décide la délocalisation des universités lilloises, c’est le site d’Annappes qui est choisi pour l’édification de la Cité Scientifique dès 1964 et celui de Flers pour les facultés de Lettres et Droit en 1966. La vocation tertiaire de Villeneuve d’Ascq est la résultante de ces implantations et la multiplication de laboratoires de recherches et de sièges sociaux d’entreprises permettra de définir la ville comme une technopole.

Loin des grands ensembles ou des banlieues pavillonnaires, la ville nouvelle se veut innovante dans l’art de vivre et devient un vrai laboratoire de l’habitat tant collectif qu’individuel. C’est l’habitat intermédiaire qui sera privilégié dans les nouveaux quartiers en lien avec les espaces de nature et la circulation douce, pour une ville écologique avant la lettre.

Réalisation exemplaire ? En fait la ville plafonnera à 65 000 habitants avant de décliner légèrement et son statut privilégié dans la métropole d’accueil d’une classe moyenne jeune et dynamique va s’évaporer avec les ans. Il reste que, de la politique de la DATAR (Délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale) des années 60, Villeneuve d’Ascq est la ville nouvelle française la plus réussie et la plus aboutie.
Dominique Mons

Transcription

Philippe Coudert
La ville, elle vit, elle s’agrandit. Elle s’agrandit à tel point qu’elle doit parfois sortir de ses murs, ainsi naît une ville nouvelle. En France, ces villes nouvelles commencent à peine sortir de terre et dans le Nord, une ville nouvelle devient peu à peu réalité. C’est la nouvelle ville Lille-Est, sur le papier, elle est née en 1967. En 1969, on lui donne la possibilité d’exister, deux ans plus tard, en 1971, les premiers travaux commencent. Et cette année, donc en 1972, les chantiers prennent forme et l’on peut se rendre compte sur le terrain de ce qu’elle représentera effectivement. Une exposition inaugurée demain la présentera au grand public. Déjà, existe le complexe universitaire d’Annapes, mais on prévoit qu’en 1985, elle abritera, cette ville, 120 000 habitants. On prévoit aussi que sur le site choisi, soit 2000 hectares, on construira près de 6000 logements aux titres des sixième, septième et huitième plans. 120000 habitants en 1985, cela sous-entend la création d’emplois. 8000 au total d’ici 10 ans, dont une large part sera réservée à des emplois du secteur tertiaire, des administrations, de la recherche. Ce sont ces emplois qui manquent actuellement à la métropole, ce sont ces emplois dont la région Nord-Pas-de-Calais a le plus besoin. Pour l’instant donc, la ville nouvelle Est, est un vaste chantier, un chantier que les gens du Nord on tout intérêt à visiter, pourquoi ? Jean-Claude Ralite, le directeur de l’Établissement Public d’Aménagement de cette nouvelle ville nous le précise.
Jean-Claude Ralite
Ce qui sort actuellement, si vous voulez, d’abord, c’est ce qui ne sort pas. Ce qui sort, c’est ce qui ne sort pas, je veux dire que c’est ce qui est sous terre. Et pour commencer à faire une ville, il faut d’abord faire les infrastructures, les égouts. Ça ne se voit pas mais c’est très important, il faut commencer par là. Il y a les accès, les autoroutes qui donnent accès directement depuis le réseau autoroutier régional à la ville nouvelle sont en chantier ; et pratiquement, on va pouvoir circuler sur un premier tronçon de l’autoroute Nord Sud de la ville nouvelle, qui rejoint l’autoroute de Paris au Sud et l’autoroute d’Anvers au Nord au début de 73. Et puis, les structures principales, le transport en commun automatique, le VAL, qui va permettre d’accéder depuis Lille en quelques minutes avec une rame toutes les minutes. Et c’est, vous savez maintenant, adjugé à l’entreprise Matra qui va le développer et dont un prototype fonctionnera dans le cours de l’année 73. Les facultés de Droit et Lettres sont en chantier, sortent de terre actuellement et c’est assez impressionnant, c’est un élément considérable.
Philippe Coudert
Au-delà de ces chantiers, c’est peut-être un nouvel art de vivre qui sera proposé aux gens du Nord. Logement collectif ou individuel, on aura le choix. Ce qui est certain c’est que la qualité de la vie sera la même pour tous. Un exemple, la ville Est comportera en son enceinte 120 hectares de verdures, de parcs et de plans de d’eau, les gens du Nord en avaient perdu l’habitude. Puissent-ils savoir les redécouvrir, une nouvelle ville, c’est sans doute un pari, un pari qu’il faut savoir gagner. Les investissements sont tels que la collectivité doit avoir à coeur de ne pas les gaspiller. À chacun de comprendre qu’une part de l’avenir de la région est engagée sur Lille-Est, architectes, urbanistes l’ont compris, les pouvoirs publics les aident, les citoyens, cela est certain, ne sauraient rester indifférents.