Bilan de la Conférence atlantique de Rome

29 novembre 1951
01m 17s
Réf. 00266

Éclairage

Organisée dans le cadre de l'OTAN, la Conférence de Rome avait pour but de permettre aux États européens de s'entendre sur un plan de défense de l'Europe face à la menace représentée pour l'Ouest par une éventuelle attaque soviétique, rendue sensible par le contexte de la guerre de Corée. L'alliance défensive du traité de Bruxelles, signé en 1949 par la France, la Grande-Bretagne et les États du Benelux, ne semble plus suffisante. Face à la demande française et allemande de repousser la ligne de défense en Europe occidentale du Rhin à l'Elbe, les Américains notamment exigent une participation accrue des Européens à la défense de leur territoire, ce qui suppose une participation de troupes allemandes.

Cinq ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, la perspective d'un réarmement allemand fait resurgir en France la crainte d'un renouveau de l'impérialisme germanique. Face à l'instance des Américains et isolée parmi ses partenaires européens, la France, dont l'armée est par ailleurs mobilisée par une guerre coloniale en Indochine, tente de reprendre la main en présentant un plan de création d'une armée européenne.

Préparé par Jean Monnet puis endossé par le président du Conseil René Pleven, le plan français vise à étendre au secteur de la Défense, les mécanismes communautaires européens de la nouvelle Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA). Des divisions européennes composées de bataillons nationaux seraient ainsi placées sous l'autorité d'un ministre européen de la Défense, chaque État membre restant responsable de l'entretien de ses troupes. Commandant suprême de l'OTAN, le général Eisenhower, par ailleurs favorable à l'abandon des discriminations et occupations imposées à l'Allemagne après la guerre, milite à Rome pour le plan français, qui lui apparaît le seul susceptible d'emporter l'adhésion de tous. Pour la France, le plan Pleven est une manière d'accepter le réarmement allemand devenu inévitable tout en l'encadrant dans une organisation européenne.
Vincent Duchaussoy

Transcription

Présentateur
François Mitterrand demande la parole.
François Mitterrand
Je suis absolument d’accord avec Daniel Mayer lorsqu’il rappelle l’origine du plan Pleven. Je m’en souviens très bien pour y avoir très peu, mais un peu participé. Mais je crois qu’il a tort de s’insurger contre les conclusions d’aujourd’hui et c’est là qu’on ne va pas…
Daniel Mayer
Je les espère très provisoires.
François Mitterrand
C’est là que pour ma part, je donne raison à Raymond-Laurent. Il est absolument certain que tout l’effort de la France a tendu à freiner. Ce qui nous paraissait inquiétant. Elle a réussi, je crois, à freiner pour une part, mais peut-elle faire davantage ? Et le plan qu’elle propose n’est-il pas le seul moyen tout de même concret et je répète de ce qui a déjà été dit, d’englober, de réduire ou de limiter un réarmement allemand indiscutable certainement très énorme, mais qui est imposé par d’autres encore que par nos propres alliés directs. Tout à l’heure j’entendais Gilbert de Chambrun tout de même, le Chancelier Adenauer était l’autre jour à Paris. On a crié Heraus!, cela peut se concevoir. Lorsque Messieurs Pieck et Grotewohl se rendent à Moscou, il semble bien qu’ils sont reçus avec tous les honneurs dus à leur rang.