Le Vieux copain à L'Ile d'Yeu

25 juillet 1994
02m 41s
Réf. 00224

Notice

Résumé :
Le Vieux copain, thonier mis en service en 1940 est de retour à son port d'attache de l'Île d'Yeu après restauration. De ses deux capitaines ou de ses anciens matelots, chacun se souvient de la vie à bord, des bons moments et entonne à nouveau le chant du navire.
Date de diffusion :
25 juillet 1994
Source :
FR3 (Collection: Rennes soir )
Personnalité(s) :
Lieux :

Éclairage

En 1953, Port-Joinville enregistrait le départ de ses deux derniers thoniers à voile : L’Alouette Bleue et la Fleur de Paris. Depuis la fin des années 1930, la propulsion mixte avait progressé, associant la puissance et la souplesse du moteur diesel à la voile, utilisée sur les zones de pêche. Le Vieux Copain fait partie de cette nouvelle génération de thoniers. Il a été construit en 1940 dans les chantiers navals l'Espoir Sablais aux Sables-d'Olonne pour René Gaborit et Gaston Poireau, capitaines de pêche à l'île d'Yeu. L'été, le navire était armé pour la pêche au thon, l'hiver pour la pêche au chalut. L’équipage était composé de cinq à six hommes : un capitaine, son second, le mécanicien, deux matelots et un mousse. Sa carrière en Vendée a pris fin en 1974, quatre ans avant la dernière sortie d’un ligneur de sa génération, survenue en 1978. Le Vieux Copain a fait quelques campagnes au Groënland puis il a été désarmé et vendu comme épave, pour le franc symbolique, à un acheteur de Granville.
L’histoire de ce navire est donc très liée à la pêche aux lignes, que les Islais tendaient au bout de grandes perches – les tangons – hissées de chaque côté de la coque, et qui étaient traînées dans le but de leurrer le prédateur des mers : le thon blanc. Ce navire, classé monument historique depuis 1986, n’a dû son salut qu’à la passion d’un Paimpolais, Serge Le Joliff, qui  lui a consacré 9.000 heures de travail en six ans, en employant les techniques traditionnelles mises en œuvre lors de sa construction. Après avoir été remis à l’eau en 1989, Le Vieux Copain a même été homologué pour le transport de passagers en 1992. Au départ de Paimpol ce beau côtre à tape-cul, du nom de la voile qu’il porte sur son mât d’artimon, proposait alors des sorties en mer vers les îles voisines comme Bréhat et participait aux rassemblements de vieux gréements comme les fêtes maritimes de Brest ou Douarnenez. Le bateau a quitté Paimpol le 17 février 2009 pour un nouveau port d’attache, Cherbourg, où il navigue avec l'association Voiles écarlates.
En 1994, c’est barré par son bienfaiteur qu’il faisait son retour à L'Ile d'Yeu, d’où il était parti en mer pour la première fois. Son arrivée à Port-Joinville met en scène l’émotion de ses deux capitaines et l’évocation de souvenirs par deux de ses anciens matelots. Lorsqu’il était armé en pêche, Le Vieux Copain pratiquait la traîne dans le golfe de Gascogne. A l’aide de sa voilure de 232 m², il pouvait ainsi rôder pendant des jours à la recherche du poisson qui était stocké dans sa glacière, aménagée au creux d’une coque respectable (18 mètres de long, 5 mètres de large, 2,50 mètres de tirant d’eau). Charles Viaud et Roger Robard, les anciens matelots surnommés – tradition bien ancrée chez les pêcheurs des petits ports – De Gaulle et La Hurlette, évoquent leurs conditions de travail avec nostalgie. Certes, le navire était « tellement ras-l’eau, qu’on était toujours dans l’eau au moindre vent. » Pourtant, la vie à bord était agréable, les campagnes habituelles avaient une durée de 10 jours l’hiver (pêche au chalut) et de 25 à 40 jour l’été (pêche au thon). Soudain, La Hurlette parle d’une campagne où, après un départ en avril il était resté 304 jours de mer sans rentrer à l’île d’Yeu. Souvenir d’une pêche difficile, passée à errer à la recherche du thon ? Peut-être. Si l’île d’Yeu n’est pas Marseille, c’est sûrement un peu exagéré ! L’histoire se termine dans un éclat de rire, signe de connivence entre les marins, heureux de se jouer de la caméra.
Thierry Sauzeau

Transcription

Présentateur
Pour finir, revenons un peu à la pêche au thon, mais une pêche un peu différente de celle qui a fait la une de l’actualité ces derniers jours. En 1940, un équipage de L’Ile-d’Yeu partait en mer sur le Vieux Copain. 50 ans plus tard, le vieux thonier était de retour à son port d’attache.
bruit
(bruit)
Journaliste
Retour en fanfare pour un ami qu’on n’attendait plus, Le Vieux Copain, un thonier qui navigua de 1940 à 1974 avec comme port d’attache, L’Ile-d’Yeu. Pêche au thon l’été, pêche au chalut l’hiver, on ne compte plus ces campagnes. Vendu en 1974, il part un temps pour le Groenland avant de pourrir dans la baie de Paimpol. Sans l’obstination d’un fou de voile, Serge Le Joliff, le bateau ne serait plus qu’une épave. Jamais il ne serait revenu vers son île, l’île d’Yeu, revoir ceux qui l’ont accompagné pendant des années. René Gaborit et Gaston Poireau, les deux patrons pêcheurs qui se sont succédé à la barre du Vieux Copain ne remonteront pas à bord. Ils disent avoir fait leur temps. Ils laisseront ce plaisir à leurs anciens matelots.
bruit
(bruit)
Journaliste
Aussitôt à bord, les souvenirs, les gestes reviennent. Charles Viaud débuta comme mousse sur ce bateau. Avec Roger Robard, ils naviguèrent près de 10 ans dessus. De Gaulle et la Hurlette, comme on les appelait, faisaient la paire. Le Vieux Copain, c’est une partie de leur vie.
Charles Viaud
C’était un très beau bateau, il voyait beaucoup d’eau ! Il était tellement au ras d'eau qu’au moindre vent, on était toujours dans l’eau quoi.
Journaliste
Et l’équipage, vous étiez assez nombreux ? Comment ça se passait sur le bateau, la vie à bord, c’était comment ?
Charles Viaud
Oh, la vie à bord c’était très bien. Le capitaine, il était très bien, le mécanicien aussi, le second aussi, c'était une vie de famille dans l’ensemble.
Roger Robard
On a été une équipe de joyeux lurons, on travaillait commes des noirs mais on rigolait comme des fous. L’hiver, on faisait 10 jours maximum, mais on faisait le sud, on allait à La Rochelle vendre, on repartait en mer, puis on rentrait tous les mois à la maison. Puis au thon, ça variait entre 25 et puis 40 jours.
Journaliste
Cette fois, la balade aura été plus courte, et c’est en chanson qu’elle s’est terminée, la chanson du Vieux Copain.
bruit
(bruit)