Le reportage tourné en 1996 fait le point sur la deuxième saison de récolte de la traditionnelle « Bonnotte de Noirmoutier » dont la culture a été réintroduite sur l’île vendéenne après avoir fait l’objet des soins des chercheurs de l’INRA d’Angers. La coopérative agricole de Noirmoutier a commencé à commercialiser une très petite quantité de la pomme de terre traditionnelle de l’île en 1995 en procédant à une vente aux enchères aux halles de Rungis, afin de retenir l’attention des grossistes spécialisés dans la vente de produits agricoles de luxe aux restaurateurs et commerces de bouche des beaux quartiers de la capitale. Pourtant, les origines de la bonnotte se situent aux antipodes des tables bourgeoises, le tubercule n’a été introduit sur la grande île vendéenne qu’au cours de l’entre-deux-guerres depuis Barfleur dans la Manche où sa culture ne donnait pas les résultats escomptés du fait de sa fragilité. S’accoutumant mieux du climat plus doux et moins arrosé de la côte vendéenne, la bonnotte n’a cependant pas résisté à la mécanisation de l’après Seconde guerre mondiale au point de n’être plus cultivée dans les années 1970 que sur quelques ares dans quelques potagers. Considérée comme « la Rolls » des pommes de terre, la bonnotte est réputée pour sa richesse au goût et sa chair ferme, elle est résolument devenue un produit de niche bénéficiant d’un marketing soigné (vendue en petite caissette ou panier), s’échangeant à des prix inavouables. Afin de maintenir sa cote auprès des amateurs, les sociétaires de la Coopérative agricole de Noirmoutier ne lui consacrent qu’environ 1 % (5 ha sur 550 ha) de la superficie dédiée à la culture de la pomme de terre sur l’île, ce qui explique que bon nombre de consommateurs croient consommer de la bonnotte lorsqu’ils achètent des tubercules en provenance de Noirmoutier alors qu’il s’agit en réalité de pomme de terre ordinaire.
Eric Kocher-Marboeuf