Un port de plaisance à Talmont

21 octobre 1982
07m 41s
Réf. 00239

Notice

Résumé :
Talmont-Saint-Hilaire veut se doter, avec l'accord du Conseil général de Vendée, d'un port de plaisance et d'un grand centre de loisir. Mais si celui-ci est bien admis par la population, l'ADEV (Association pour la défense de l'environnement en Vendée) s'oppose au port de plaisance. Le maire de Talmont, Jean de la Rochethulon, répond que le coût sera nul pour les habitants.
Type de média :
Date de diffusion :
21 octobre 1982
Source :
FR3 (Collection: Magazine )

Éclairage

Le port de plaisance de Bourgenay est une réalisation typique de la 2e phase du développement du littoral vendéen, celle qui répond à un effort de planification. En novembre 1971, le Ministère de l'Équipement adoptait le schéma d'Aménagement du Littoral Centre Ouest Atlantique (ALCOA). L’Etat lui fixait pour mission de promouvoir un développement conciliant la préservation d’activités traditionnelles (agriculture, ostréiculture, pêche), le développement d’une économie résidentielle confinée dans des bornes plus strictes et le développement de nouvelles infrastructures de loisirs (plans d’eau et ports de plaisance). Il s’agissait de tirer les leçons d’une décennie 1960 au développement anarchique.
Le littoral de l’estuaire du Payré, petit fleuve côtier, près de la modeste cité de Talmont-Saint-Hilaire fut alors choisi pour expérimenter cette nouvelle politique d’aménagement du territoire. Sous la houlette du maire et conseiller général Jean de la Rochethulon (1974-2001), un Syndicat mixte pour l’aménagement du Talmondais (SMAT), rassembla le tour de table nécessaire à la réalisation de ses grands projets, financés à 50% par l’Etat. Les rivages concernés ne possédaient pas les atouts de la côte de Monts ou des Sables d’Olonne tout proches. On y trouvait peu de plages, la seule zone sableuse étant celle du Veillon, préservée sur intervention du Conservatoire du littoral. Le choix fut donc fait de créer de toutes pièces un port de plaisance.
Port Bourgenay a été bâti au beau milieu d'un plateau rocheux, sous la forme de deux jetées embrassant un bassin relié à la mer par un chenal dragué dans la roche. Sa capacité d’accueil a été calibrée à 500 navires et il en accueille 630 aujourd’hui. Dès l’origine du projet, des contestations se sont élevées, notamment de la part d’associations de sauvegarde des paysages et de l’environnement, qui montaient en puissance dans les années 1980. Les dangers de la navigation de plaisance à travers les hauts fonds rocheux furent soulignés et les risques de désordres environnementaux sur la côte pointés du doigt. Une fois le chantier terminé, l’ensablement est effectivement venu s’inviter dans le fonctionnement de cet outil de développement nautique. Port Bourgenay mis en service en 1985, a été dragué une première fois en 1996/1997 et une deuxième fois en 2010 pour un coût total d’un demi million d’euros.
A côté du port, fréquenté par seulement 50 navires à son inauguration, un village « Pierre & vacances » mettant en œuvre le concept de multipropriété, visait à accueillir un tourisme de villégiature de Pâques à octobre. Etendu sur 90 ha. le village de Port Bourgenay offre depuis 30 ans à ses résidents son plan d’eau, dont l’aménagement a fait disparaître une zone humide, et l’accès à la plage du Veillon, via un cheminement forestier de 2 km de long. A Talmont, la population communale est passée de 2.500 habitants en 1982 à 6.000 aujourd’hui, le nombre de résidences principales a doublé. Celui des résidences secondaires a triplé et le Talmondais triple sa population en haute saison (juillet-août). Si l’étalement urbain sur la bande côtière a été évité et le mitage des pinèdes limité, il n’en demeure pas moins que les paysages et littoraux ruraux du Talmondais ont été profondément modifiés par ces réalisations. L’investissement public a offert des occasions de profits pour les initiés mais aussi un regain d’activité sur le bassin d’emploi : le taux de chômage est stable à 11% depuis 15 ans, 3.000 emplois sont offerts sur la commune et ils sont occupés à 90% par les habitants.
Thierry Sauzeau

Transcription

bruit
(bruit)
Journaliste
Talmont-Saint-Hilaire, 4 000 habitants est à l’image de ce que l’on appelle la France profonde. La vie y est tranquille, il ne s’y passe jamais grand-chose. On vit sans bousculade, au rythme du temps qui passe, sauf une fois par mois. Quand au pied du vieux château, fierté de la commune, il y a le marché. La mer et la côte, qui sont pourtant toutes proches, on y a jusqu’à présent guère pensé. Il est vrai qu’au littoral, ce sont surtout les falaises désertes et sauvages qui, parfois laissent entrevoir le coin d’une plage. A 10 km de là, au nord, le grand port qui monopolise presque toutes les énergies, qui attire, qui envoûte, Les Sables-d’Olonne et ses grandes plages où il fait bon de bronzer. C’est peut-être pour échapper à cette emprise que la commune de Talmont-Saint-Hilaire s’est dotée à l’initiative des ingénieurs de la DDE d’un ambitieux projet ; qui fut adopter à l’unanimité moins une voix par le conseil général de Vendée. Construire un port de plaisance et à quelques centaines de mètres de là, un important centre de loisirs qui puisse accueillir au moins 20 semaines par an et non 8 semaines 5 000 personnes. Le centre de loisirs n’est guère contesté. On le qualifie d’harmonieux, de bien intégré, et on s’attend à ce qu’il véhicule vers la commune de nouvelles richesses. Même si les 5 000 locataires viendront y vivre en vase clos. Il n’en va pas de même, loin de là, avec le projet du port de plaisance qui prévoit un port totalement artificiel, constitué essentiellement de deux jetées qui abriteront 500 bateaux. Le chenal d’accès sera dragué à la côte moins 1m. Pour donner un ordre de grandeur, le plan des Sables-d’Olonne, le grand rival est dragué à moins de 2 m. Un rapport du laboratoire central d’hydraulique de France conclut que l’accès du port sera, je cite, toujours difficile ; voire même impraticable par gros temps et dangereux pour les navigateurs occasionnels par mauvais temps. Une des raisons parmi d’autres qui ont conduit la DEV une association, qui en regroupe onze autres à contester ce projet.
Anne-Marie Grimaud
Nous avons été amenés à contester ce projet de port, tel qu’il nous est présenté, parce que nous pensons qu’il n’est pas nécessaire. Un port de plaisance en eau profonde entre Les Sables-d’Olonne et La Rochelle, ça ne nous parait pas indispensable d’autant que le port des Sables-d’Olonne est loin de fonctionner à plein. D’autre part, ce projet de port, selon les spécialistes, semble présenter des dangers au niveau donc de la sécurité des usagers ; parce qu’au large de Bourgenay, il y a des hauts fonds, qui sont d’ailleurs bien connus des marins du littoral. Et c’est un point qui nous parait être très important, encore que ça ne relève pas directement de notre compétence. Enfin, ce qui nous parait très marqué, c’est le risque que présente ce port vis-à-vis de l’équilibre sédimentaire des côtes. Ce risque en réalité n’a pas été évalué par les études préalables, alors qu’on est en droit d’attendre bien sûr que cela soit fait, compte tenu des conséquences qui peuvent être vraiment extrêmement importantes. D’autre part, il nous semble évident que ce port, n’ayant aucune nécessité réelle est un port prétexte. C’est un port qui n’est là que pour permettre de faire vendre l’immobilier que l’on construit derrière.
Journaliste
Le maire de Talmont défend le projet et espère l’amener contre vents et marées sur les fonds baptismaux, même si le port sera financé à 50% par les collectivités locales.
Jean (de la) Rochethulon
Le financement de ce nouveau port a été établi de façon à ce que ça ne coûte absolument rien aux contribuables de la commune et des communes ; des habitants des communes qui font partie du syndicat mixte d’aménagement du Talmondais. Et d’ailleurs, pour le reste du développement touristique, il en est exactement de même. Nous souhaitions que contrairement à ce qui se passe dans tous les développements touristiques qui se font sur littoral ; où les équipements sont prévus après coup, où l’assainissement, la viabilité se fait souvent après coup, et où le contribuable qui ne profite pas forcément du développement touristique, paie ; dans cette opération, où le contribuable ne supporte pas le développement touristique. Ça profite au maximum aux gens du pays.
Journaliste
Au total, port de Plaisance, projet immobilier, quelle sera l’activité économique engendrée ?
Didier Grégory
Je crois que c’est un des points importants du développement. La présence d’un parc locatif avec un étalement de la saison touristique de Pâques à octobre va engendrer une activité économique totalement différente de ce qu’on peut trouver en résidence secondaire sur la côte vendéenne. La location avec la présence de familles qui se renouvelle toutes les semaines ou tous les 15 jours va permettre la création de nombreux emplois. On a essayé de chiffrer pour Bourgenay. Nous estimons qu’il y aura environ 500 emplois qui seront créés, ce qui est totalement différent d’un développement purement copropriété. Je crois que c’est un des points importants parce que dans les temps actuels, l’emploi c’est quand même important.
bruit
(bruit)
Journaliste
La décision finale, véritable feu vert à la construction sera donnée par le préfet de Vendée qui devrait signer prochainement la concession du domaine public maritime.
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(bruit)
Dominique Le Vert
En effet, si je refuse la concession dans le domaine de la politique maritime, le port ne pourra pas se faire, ça c’est exact, si c’est ça que vous voulez dire. Mais les responsables et les promoteurs de cette opération, je tiens à le dire, sont les collectivités locales.
Journaliste
Alors, quand allez-vous prendre votre décision et quelle sera-t-elle ?
Dominique Le Vert
Il y a d’abord un certain nombre de préalables que j’ai demandé à la commune de Talmont de régler, et sur lesquels j’ai demandé au département et à la commune de s’engager. Je veillerai à ce que ces engagements soient tenus au préalable. C’est ensuite que je pourrai prendre ma décision.
Journaliste
Si ces conditions sont remplies, j’en reviens à ma question, quand allez vous donner votre réponse ?
Dominique Le Vert
Ma réponse interviendra à l’issue, lorsque ces conditions auront été remplies. A l’issue d’une procédure, je ne peux pas vous donner la nature exacte de ma réponse puisqu’il y a une procédure en cours. Il faut bien attendre que les uns et les autres se soient bien expliqués. Je pense que si tout va bien et si notamment la société constructrice avec laquelle le département et la commune vont signer l’accord de construction, de l’aménagement. Si cette société constructrice se met en place dans les semaines qui viennent, je pense que dans les deux mois suivants, l’autorisation pourra être donnée sous condition que l’ensemble de ce que je viens de vous indiquer ait été réalisé.
Journaliste
Pensez vous que l’impact du projet ait été suffisamment évalué ?
Dominique Le Vert
On peut toujours demander d’autres études, des études complémentaires. On peut toujours demander que l’on y regarde plus longuement. Je pense que l’administration, pour ce qui la concerne, a fait un gros effort d’information, d’allongement des délais de procédure, de concertation, comme je vous l’ai indiqué. Je pense que le public a à la disposition les éléments de son information.
Journaliste
Le ministère de l’Environnement a pourtant jugé cette étude superficielle, je cite. Et comme étant plus souvent un guide, plus souvent un guide touristique que des analyses en profondeur.
Dominique Le Vert
Mais depuis cette étude, nous avons fait un certain nombre de réunions sur place, qui ont apporté, je crois, justement les éléments d’information complémentaire. C’est bien pour cela que nous avons fait faire une information complémentaire, qui me paraissait manquer au départ. Je ne dis pas que tout soit parfait, il faut toujours faire mieux. Mais je pense qu’il y a eu un effort sensible d’amélioration de l’information qui a été fait autour de ce projet.