François Mitterrand au Creusot et Jacques Chirac dans le Nord

08 décembre 1987
04m 17s
Réf. 00122

Notice

Résumé :
A l’occasion d’une visite en Saône-et-Loire pour François Mitterrand et dans le Nord-Pas de Calais pour Jacques Chirac, le Président et le Premier ministre affichent leurs visions économique respectives pour la reprise de deux territoires fortement frappés par la crise. Au cours de sa visite, Mitterrand revient sur le traité FNI signé à Washington le jour même et souligne le plein appui de la France au processus de désarmement nucléaire en cours.
Date de diffusion :
08 décembre 1987
Source :
Antenne 2 (Collection: JT 20H )

Éclairage

Le 8 décembre 1987, Ronald Reagan et Mikhaïl Gorbatchev signent à Washington le traité FNI (Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire), par lequel ils s’engagent à retirer d’Europe toute arme d’une portée de 500 à 5000 km. Après huit ans de confrontation, la crise des euromissiles prend fin par un accord négocié qui ramène au niveau le plus bas possible la concentration d’armes nucléaires en Europe. François Mitterrand donne son appui à cette résolution, mais son avis n’est pas unanimement partagé par son gouvernement.

Dès la rencontre américano-soviétique de Reykjavík, datant d’octobre 1986 (voir ce document), Jacques Chirac et plus encore son ministre de la Défense, André Giraud, craignent que les propositions de désarmement soviétiques ne soient qu’une autre tentative de Moscou pour provoquer le départ des Américains du sol européen. Alors que Mikhaïl Gorbatchev formalise sa volonté de procéder à une première option zéro sur les systèmes d’une portée entre 1000 et 5000 km, le 28 février 1987, André Giraud crie au « Munich européen ». Le ministre de Jacques Chirac n'est pas moins critique lorsque Moscou propose une deuxième option zéro, le 10 avril, censée éliminer aussi les missiles d’une portée entre 500 et 1000 km : pour le ministre de la Défense, il s’agit d’une véritable "finlandisation" de l’Europe. Jacques Chirac est lui aussi assez sceptique face aux propositions de Mikhaïl Gorbatchev et il ne partage pas l’attitude positive de François Mitterrand pour ces déclarations sur le désarmement. Néanmoins, afin de garder l’unité du discours français, le Premier ministre reste discret et avance ses réserves directement auprès du Président.

Pour François Mitterrand, tout doit être fait pour favoriser le dialogue sur le désarmement et cela l’amène à soutenir fermement le traité FNI et les efforts accomplis par les deux Grands pour y parvenir. C’est la position qu’il exprime au nom de la France et qui l’amène à affirmer que ceux qui s’en éloignent se rangent du côté de ceux qui veulent surarmer. Une critique subtile envers ceux qui, dans le gouvernement, avancent des réserves vers la double option zéro.
Ilaria Parisi

Transcription

Hervé Claude
François Mitterrand, en visite au Creusot, a évoqué l’accord américano-soviétique. Justement, le Chef de l’État a de nouveau apporté son ferme soutien à cet accord. Monsieur Mitterrand a dit qu’il valait mieux désarmer que surarmer. Il a déploré aussi, vous allez l’entendre, l’échec du Sommet Européen de Copenhague, écoutez.
François Mitterrand
Il faut désarmer et il faut refuser la proposition de ceux qui vous disent, non, parce que ce non doit être accompagné d’une explication. Et cette explication devrait être, si elle est honnête, celle-ci, alors surarmons. Et dans cette course-là, êtes-vous sûrs qu’un pays comme la France serait forcément le gagnant ?
Hervé Claude
Le Président de la République était en effet au Creusot, en Saône-et-Loire aujourd’hui, dans l’un des bassins sidérurgique les plus touchés par la crise. L’occasion pour Monsieur Mitterrand de défendre la politique industrielle menée par la Gauche et aussi de critiquer ses adversaires politiques, reportage Jean-Michel Mercurol.
Jean-Michel Mercurol
Le Creusot, l’un des bassins industriels les plus touchés par la crise. Les anciennes activités, mines et sidérurgies, n’ont pu résister à la compétition mondiale. En venant saluer cette ville de forte tradition syndicale, François Mitterrand voulait à la fois rendre hommage à ceux qui ont lutté pour la conquête des droits sociaux et rendre espoir aux victimes de la crise. L’usine SNECMA, société nationale installée depuis peu au Creusot pour produire des moteurs d’avions, lui a fourni l’exemple d’une conversion possible vers une nouvelle prospérité. L’illustration en tout cas de la politique industrielle décidée par la Gauche, a expliqué François Mitterrand pour remédier au manquement des responsables d’avant 81.
François Mitterrand
Le premier des intérêts de la Nation, c’est l’intérêt des populations qui vivent sur son sol et particulièrement, des catégories sociales qui souffrent plus que d’autres. On ne peut toujours demander les sacrifices aux mêmes, on ne peut toujours demander l’effort aux mêmes.
Jean-Michel Mercurol
En se situant clairement à Gauche, défenseur de la classe ouvrière, François Mitterrand a tenu aujourd’hui à se démarquer du libéralisme. Une réponse sans doute aux Communistes qui tentent d’accréditer l’idée que les Socialistes et la Droite, c’est la même chose.
Hervé Claude
Et au même moment, Jacques Chirac, dans le Nord, défendait la politique menée par son équipe depuis 86. Tant à Lille hier qu’à Saint-Omer, Calais ou Dunkerque aujourd’hui, le Premier Ministre en a profité pour esquisser le portrait de la France qu’il entend conduire après 88, reportage Jean-Louis Lescene.
Jean-Louis Lescene
La seconde journée de Jacques Chirac dans le Nord-Pas-de-Calais a commencé par une évocation du passé. À Notre Dame de Lorette, deuxième plus grand cimetière militaire de France, le Premier Ministre a voulu rendre hommage aux morts de toutes les guerres de ce siècle. Après le passé, le présent et la politique du gouvernement, à Saint-Omer devant 900 maires de la région conviés à un banquet républicain, Monsieur Chirac a redit sa volonté d’aider deux départements particulièrement touchés par la crise. Encore faut-il, selon lui, ne pas confondre solidarité et assistance.
Jacques Chirac
Aider les plus démunis, ce n’est pas les enfermer dans un mécanisme généralisé et automatique d’aides sociales auquel certains aiment à rêver. Ce n’est pas leur assurer seulement un revenu, mais c’est associer des ressources à une activité. C’est prendre en compte leur souci de conserver leur dignité, c’est promouvoir leur responsabilité. C’est leur redonner les moyens de se tourner avec confiance vers l’avenir, c’est une autre philosophie.
Jean-Louis Lescene
Et après le présent, l’avenir avec la visite du chantier Eurotunnel, le futur tunnel sous la Manche. Ce chantier durera six ans et permettra la création de 4000 emplois. Jacques Chirac s’est félicité que 75% des travailleurs soient recrutés localement. Le Premier Ministre terminait ce soir ce voyage nordique par Calais et Dunkerque, à chaque fois, quelques dizaines de manifestants étaient tenus à l’écart.