Consultation pour l'entrée de Tarnos dans la communauté du BAB
27 septembre 2011
02m 13s
Réf. 00850
Notice
Résumé :
Consultation (référendum) pour l'entrée de Tarnos dans la communauté de communes du BAB initiée par le maire PC Jean Marc LESPADE qui veut anticiper les réformes territoriales et de la taxe professionnelle. Pour le PS et la communauté de communes de Seignanx, les Basques convoitent leur territoire. Henri EMMANUELLI, lui aussi est contre ce rapprochement : plus d'impôts, risque d'être minoritaire
Type de média :
Date de diffusion :
27 septembre 2011
Source :
FR3
(Collection:
19/20 Le journal d'Aquitaine
)
Éclairage
Organisée par la municipalité communiste (1), la consultation de la population de Tarnos à propos de l’adhésion à la communauté d’agglomération de Bayonne renvoie, d’une part, à la question ancienne et récurrente des limites administratives, et pose, d’autre part, celle des problématiques très contemporaines d’ordre économique et urbanistique qui font bouger lignes de partage, zones d’attractivité et autres bassins de vie.
Le découpage départemental de 1790, légèrement retouché ensuite, a légèrement écorné le vieux pays du Seignanx (2), aux confins des Landes et des Pyrénées-Atlantiques. L’ancien Seignanx correspondait aux communes actuelles de Boucau (quartier de Tarnos jusqu’en 1857), Ondres, Saint-André-de-Seignanx, Saint-Barthélémy (qui appartint à Saint-André jusqu’en 1790), Saint-Martin-de-Seignanx, et à une commune aujourd’hui annexée par Bayonne, Saint-Étienne-d’Arribe-Labourd qui dépendit de Saint-Esprit (quartier de Bayonne sur la rive droite de l’Adour). Aujourd’hui le canton de Saint-Martin-de-Seignanx est de plus en plus présenté comme le “Pays de Seignanx” (une communauté de communes, en fait) qui englobe : Biaudos, Biarrotte, Tarnos, Ondres, Saint-André-de-Seignanx, Saint-Barthélémy, Saint-Martin-de-Seignanx, Saint-Laurent-de-Gosse et Tarnos.
L’attractivité de la Côte basque (3) en général et de Bayonne en particulier (4) a fait que la croissance de ce qui jadis était considéré comme une des rares « conurbations » de l’Hexagone avec Lille, Roubaix et Tourcoing, ne s’est pas démentie… Dès 1972 est ainsi créé le district Bayonne-Anglet-Biarritz qui prend notamment en compte les infrastructures de transport. Le 31 décembre 1999 cette entité se transforme, en application de la loi Chevènement, en communauté d’agglomération et se dote de compétences nouvelles. L’évolution se poursuit lorsqu’au 1er janvier 2011 le « BAB » passe de 3 à 5 communes et change ipso facto de nom : c’est désormais l’ “Agglomération Côte Basque” avec deux nouveaux membres, les communes de Bidart et de Boucau. Elle compte plus de 120 000 habitants (5). Même si Bayonne (cité de Lapurdum dans l’Antiquité, d’où la province basque du Labour dont Ustaritz est la “capitale”) est historiquement une ville gasconne qui en garde indéniablement le souvenir, la force de l’identité basque se fait amplement sentir dans ce secteur.
Ces éléments, historiques, culturels et économiques, permettent de comprendre la démarche, en apparence pragmatique, engagée par le maire de Tarnos. D’autant que sur le plan de l’aire de chalandise du commerce bayonnais ou quant aux migrations pendulaires de travail, d’indéniables liens sont établis avec l’agglomération de Bayonne. D’où la pression foncière qui ne cesse de s’exercer, sur Tarnos et sur tout le Seignanx, voire plus loin (Bas-Adour en général, communes du pays dit “ MACS” (Maremne-Adour-Côte Sud). Cependant, si Tarnos semble “officiellement” motivée pour franchir le pas d’une relation plus étroite avec Bayonne et ses voisines, le débat est ouvert et les mises en garde, en particulier celle du Président du Conseil général des Landes, ne manquent pas. Au final, la proposition n’a pas été suivie.
(1) L’amélioration de l’accès au port de Bayonne malgré la redoutable barre de l’Adour, la desserte ferroviaire à partir de 1855 qui entraîne en 1857 la création du Boucau comme commune à part entière (rattachée aux Basses-Pyrénées d’antan), la proximité de l’Espagne riche du minerai de fer de Biscaye, conduisent à l’implantation de l’usine des Forges de l’Adour en 1881. On y produit fonte, aciers Martin ou Bessemer et produits laminés (rails et accessoires ferroviaires). Le charbon alimentant les hauts-fourneaux vient d’Angleterre ou du Pays de Galles, cependant que les cargos exportent les poteaux de mine de la forêt landaise.
Les deux villages du Boucau et de Tarnos connaissent alors une transformation de ville-champignon : 2659 habitants au total en 1882, 8561 en 1902 parmi lesquels se mêlent paysans gascons, basques ou ouvriers sidérurgistes venus de Saint-Chamond ou de Lorraine. De véritables cités ouvrières se constituent. L’identité de cette communauté se construit aussi aux éclats des luttes sociales où le parti communiste s’implante dès le lendemain de la Première Guerre mondiale. Les Forges sont démantelées en 1965. Néanmoins d’autres activités industrielles ont pris le relais : aéronautique, engrais et, dans les années 1990, une nouvelle activité sidérurgique à l’initiative de capitaux espagnols.
(2) Mentionné Seygnanz, par les clercs en 1242, Seignanx en 1305, de Senhanxa en 1527, le nom de cette contrée gasconne vient probablement du nom de la tribu des Cocosates citée par Pline à laquelle les Romains avaient donné le surnom de Sexsignani ; on peut comprendre cette appellation comme une allusion aux « six rameaux » composant cette petite peuplade aquitaine [source : communication de Jean-Pierre Bost dans L’Adour maritime de Dax à Bayonne, Fédération Historique du Sud-Ouest / Société de Borda / Société des Sciences Lettres et Arts de Bayonne, 2001].
(3) Lancé en 1905 par Maurice Martin, le concept touristique de la « Côte d’Argent » fut initialement très large, de la Pointe de Grave à Biarritz, voire de Royan jusqu’à Hendaye ! Mais celui de « Côte basque » bien vite se démarque, en particulier après la Première Guerre mondiale. Pour la côte landaise, on peut observe que depuis les années 1980, dépliants et autres sites touristiques répandent plutôt le concept de « côte sud », un peu « tendance » mais évinçant en partie les notions de Marensin, Maremne ou Seignanx [Référence : Fénié (Jean-Jacques), L’invention de la Côte d’Argent, Confluences, 2005].
(4) Le gascon bocau a le sens de « bouche d’un ruisseau ou d’une rivière ». Les courants littoraux débouchant sur l’Océan se terminent donc tous par un bocau. L’Adour, le grand fleuve du sud de la Gascogne, se jetait encore à Capbreton en 1367, son cours suivant vers le nord une direction parallèle à la côte, puis les tempêtes et les sables l’obligèrent à remonter jusqu’à Port-d’Albret (commune de Vieux-Boucau ou Bocau Vielh) avant que les Bayonnais et l’ingénieur Louis de Foix, en 1578, ne captent définitivement ses eaux et développent l’essentiel de la zone portuaire bayonnaise.
(5) Le chiffre atteint même 128 595 habitants au recensement de 2012, dont 45 855 pour Bayonne, 39 223 pour Anglet et 25 330 pour Biarritz.
Le découpage départemental de 1790, légèrement retouché ensuite, a légèrement écorné le vieux pays du Seignanx (2), aux confins des Landes et des Pyrénées-Atlantiques. L’ancien Seignanx correspondait aux communes actuelles de Boucau (quartier de Tarnos jusqu’en 1857), Ondres, Saint-André-de-Seignanx, Saint-Barthélémy (qui appartint à Saint-André jusqu’en 1790), Saint-Martin-de-Seignanx, et à une commune aujourd’hui annexée par Bayonne, Saint-Étienne-d’Arribe-Labourd qui dépendit de Saint-Esprit (quartier de Bayonne sur la rive droite de l’Adour). Aujourd’hui le canton de Saint-Martin-de-Seignanx est de plus en plus présenté comme le “Pays de Seignanx” (une communauté de communes, en fait) qui englobe : Biaudos, Biarrotte, Tarnos, Ondres, Saint-André-de-Seignanx, Saint-Barthélémy, Saint-Martin-de-Seignanx, Saint-Laurent-de-Gosse et Tarnos.
L’attractivité de la Côte basque (3) en général et de Bayonne en particulier (4) a fait que la croissance de ce qui jadis était considéré comme une des rares « conurbations » de l’Hexagone avec Lille, Roubaix et Tourcoing, ne s’est pas démentie… Dès 1972 est ainsi créé le district Bayonne-Anglet-Biarritz qui prend notamment en compte les infrastructures de transport. Le 31 décembre 1999 cette entité se transforme, en application de la loi Chevènement, en communauté d’agglomération et se dote de compétences nouvelles. L’évolution se poursuit lorsqu’au 1er janvier 2011 le « BAB » passe de 3 à 5 communes et change ipso facto de nom : c’est désormais l’ “Agglomération Côte Basque” avec deux nouveaux membres, les communes de Bidart et de Boucau. Elle compte plus de 120 000 habitants (5). Même si Bayonne (cité de Lapurdum dans l’Antiquité, d’où la province basque du Labour dont Ustaritz est la “capitale”) est historiquement une ville gasconne qui en garde indéniablement le souvenir, la force de l’identité basque se fait amplement sentir dans ce secteur.
Ces éléments, historiques, culturels et économiques, permettent de comprendre la démarche, en apparence pragmatique, engagée par le maire de Tarnos. D’autant que sur le plan de l’aire de chalandise du commerce bayonnais ou quant aux migrations pendulaires de travail, d’indéniables liens sont établis avec l’agglomération de Bayonne. D’où la pression foncière qui ne cesse de s’exercer, sur Tarnos et sur tout le Seignanx, voire plus loin (Bas-Adour en général, communes du pays dit “ MACS” (Maremne-Adour-Côte Sud). Cependant, si Tarnos semble “officiellement” motivée pour franchir le pas d’une relation plus étroite avec Bayonne et ses voisines, le débat est ouvert et les mises en garde, en particulier celle du Président du Conseil général des Landes, ne manquent pas. Au final, la proposition n’a pas été suivie.
(1) L’amélioration de l’accès au port de Bayonne malgré la redoutable barre de l’Adour, la desserte ferroviaire à partir de 1855 qui entraîne en 1857 la création du Boucau comme commune à part entière (rattachée aux Basses-Pyrénées d’antan), la proximité de l’Espagne riche du minerai de fer de Biscaye, conduisent à l’implantation de l’usine des Forges de l’Adour en 1881. On y produit fonte, aciers Martin ou Bessemer et produits laminés (rails et accessoires ferroviaires). Le charbon alimentant les hauts-fourneaux vient d’Angleterre ou du Pays de Galles, cependant que les cargos exportent les poteaux de mine de la forêt landaise.
Les deux villages du Boucau et de Tarnos connaissent alors une transformation de ville-champignon : 2659 habitants au total en 1882, 8561 en 1902 parmi lesquels se mêlent paysans gascons, basques ou ouvriers sidérurgistes venus de Saint-Chamond ou de Lorraine. De véritables cités ouvrières se constituent. L’identité de cette communauté se construit aussi aux éclats des luttes sociales où le parti communiste s’implante dès le lendemain de la Première Guerre mondiale. Les Forges sont démantelées en 1965. Néanmoins d’autres activités industrielles ont pris le relais : aéronautique, engrais et, dans les années 1990, une nouvelle activité sidérurgique à l’initiative de capitaux espagnols.
(2) Mentionné Seygnanz, par les clercs en 1242, Seignanx en 1305, de Senhanxa en 1527, le nom de cette contrée gasconne vient probablement du nom de la tribu des Cocosates citée par Pline à laquelle les Romains avaient donné le surnom de Sexsignani ; on peut comprendre cette appellation comme une allusion aux « six rameaux » composant cette petite peuplade aquitaine [source : communication de Jean-Pierre Bost dans L’Adour maritime de Dax à Bayonne, Fédération Historique du Sud-Ouest / Société de Borda / Société des Sciences Lettres et Arts de Bayonne, 2001].
(3) Lancé en 1905 par Maurice Martin, le concept touristique de la « Côte d’Argent » fut initialement très large, de la Pointe de Grave à Biarritz, voire de Royan jusqu’à Hendaye ! Mais celui de « Côte basque » bien vite se démarque, en particulier après la Première Guerre mondiale. Pour la côte landaise, on peut observe que depuis les années 1980, dépliants et autres sites touristiques répandent plutôt le concept de « côte sud », un peu « tendance » mais évinçant en partie les notions de Marensin, Maremne ou Seignanx [Référence : Fénié (Jean-Jacques), L’invention de la Côte d’Argent, Confluences, 2005].
(4) Le gascon bocau a le sens de « bouche d’un ruisseau ou d’une rivière ». Les courants littoraux débouchant sur l’Océan se terminent donc tous par un bocau. L’Adour, le grand fleuve du sud de la Gascogne, se jetait encore à Capbreton en 1367, son cours suivant vers le nord une direction parallèle à la côte, puis les tempêtes et les sables l’obligèrent à remonter jusqu’à Port-d’Albret (commune de Vieux-Boucau ou Bocau Vielh) avant que les Bayonnais et l’ingénieur Louis de Foix, en 1578, ne captent définitivement ses eaux et développent l’essentiel de la zone portuaire bayonnaise.
(5) Le chiffre atteint même 128 595 habitants au recensement de 2012, dont 45 855 pour Bayonne, 39 223 pour Anglet et 25 330 pour Biarritz.
Jean-Jacques Fénié